Thomas Arthur, âgé de 75 ans, doit être exécuté en Alabama le 25 mai. C’est la huitième fois que son exécution est programmée depuis 2001, dont trois fois où elle a été annulée à moins d’un jour de la date prévue. Il continue de clamer son innocence. Si elle avait lieu, son exécution serait la première réalisée sous le mandat de la gouverneure actuelle de l’Alabama.
Le 1er février 1982, des policiers sont arrivés au domicile de Judy et Troy Wicker à Muscle Shoals, dans le nord-ouest de l’Alabama. Troy Wicker gisait dans son lit, tué d’une balle ayant traversé son œil droit. Judy Wicker était allongée par terre à côté du lit, portant des traces de sang, et sa sœur était agenouillée près d’elle. Judy Wicker a raconté à la police qu’elle était rentrée chez elle après avoir récupéré ses enfants à l’école, qu’elle avait trouvé un homme afro-américain dans la maison, qu’il l’avait violée et assommée et qu’il avait abattu son mari. Les policiers ont retrouvé sur place quatre douilles de balles .22, mais jamais l’arme du crime elle-même.
Judy Wicker a été accusée d’avoir fait tuer son mari pour toucher une prime d’assurance. Thomas Arthur, qui avait entamé une relation avec elle pendant un programme de semi-liberté au cours d’une peine de prison qu’il purgeait pour un meurtre commis en 1977, a également été inculpé. Judy Wicker a été reconnue coupable en 1982 et condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité. Lors d’un procès distinct en 1982, Thomas Arthur a été condamné à mort. En 1985, il a obtenu un nouveau procès. Une deuxième condamnation à mort a été prononcée à l’issue de cette procédure en 1987, avant d’être annulée en 1990. Le ministère public a alors contacté le comité des grâces et des libérations conditionnelles de l’Alabama pour savoir si Judy Wicker pouvait obtenir une libération anticipée en échange de son témoignage contre Thomas Arthur (elle avait jusque-là affirmé qu’il n’était pas impliqué). L’avocat qui représentait Judy Wicker lors de cette réunion est par la suite devenu procureur. Il a participé en tant que tel au nouveau procès de Thomas Arthur, où il a présenté Judy Wicker comme témoin-clé de l’accusation. Cette dernière a été libérée sous conditions un an plus tard, après 10 années de prison.
Thomas Arthur avait des doutes quant à la préparation du procès par ses avocats commis d’office. Le juge l’a autorisé à assurer lui-même sa défense, avec l’assistance de ses avocats. Il a été déclaré coupable le 5 décembre 1991, après un procès qui n’a duré que trois jours. Lors de l’audience consacrée à la détermination de sa peine, le jour même, il a demandé qu’on le condamne à la peine capitale, en indiquant au jury qu’il y avait déjà été condamné deux fois dans cette affaire et que sa condamnation serait annulée en appel. Après une audience de 90 minutes, les jurés ont voté en faveur de la peine de mort par 11 voix contre une. Le 24 janvier 1992, le juge a accepté cette recommandation, en estimant que la circonstance aggravante que constituait la précédente condamnation pour meurtre de Thomas Arthur l’emportait sur les circonstances atténuantes.
Aucun élément matériel ne relie Thomas Arthur au crime. Des cheveux et des empreintes digitales retrouvés sur la scène du crime ont été analysés ; ils ne correspondaient pas aux siens. Il a été reconnu coupable sur la base de preuves indirectes et du témoignage de Judy Wicker, qui a donc fait un faux témoignage soit lors de son propre procès en 1982 (où elle a affirmé qu’il n’était pas impliqué), soit lors du nouveau procès de Thomas Arthur en 1991 (où elle l’a accusé d’avoir tué son mari). Au cours des dernières années, le ministère public a rejeté les demandes de ses avocats en vue d’obtenir des tests ADN plus élaborés sur une perruque que l’agresseur portait selon eux, et il a déclaré qu’un kit de prélèvement destiné aux victimes de viol retrouvé sur la scène du crime avait été détruit. Au procès de 1991, Judy Wicker a indiqué que deux autres personnes étaient impliquées dans le meurtre (sa sœur et le compagnon de celle-ci), mais aucune d’elles n’a été poursuivie.