Près de 700 hommes, femmes et enfants ont été attaqués par la police alors qu’ils étaient en route pour aller porter plainte contre Formosa Plastics et réclamer 20 millions de dollars d’indemnisation pour le préjudice subi. L’entreprise taïwanaise, basée dans la province de Hà Tĩnh, a admis sa responsabilité pour la catastrophe écologique d’avril 2016, qui a eu de graves répercussions sur la vie de centaines de milliers de personnes.
Tôt dans la matinée du 14 février 2017, près de 700 personnes, des pêcheurs pour la plupart et d’autres personnes vivant des activités de la pêche, se sont réunies à Song Ngọc, dans la province de Nghệ An, pour aller déposer 619 plaintes individuelles dans la province voisine de Hà Tĩnh contre Formosa Plastics. Ils réclament collectivement près de 20 millions de dollars d’indemnisation pour la destruction des réserves de poissons provoquée par le désastre d’avril 2016.
Le groupe effectuait à pied et à moto le trajet de 170 kilomètres, car l’entreprise d’autocars qui avait accepté de les transporter à Hà Tĩnh s’est rétractée après avoir reçu des menaces de la part des autorités. Le groupe, qui était suivi de près par des centaines de policiers armés, a été stoppé par un barrage routier, à 20 kilomètres de Song Ngọc, où d’autres policiers les attendaient, le nombre total de policiers déployés avoisinant dès lors les 2 000. Alors qu’ils étaient en train de parler avec les autorités, les manifestants pacifiques ont été attaqués par plusieurs dizaines d’hommes en civil qui, selon un témoin, ont agressé les hommes, les femmes et les enfants à coups de poing et à coups de pied.
Les hommes en civil ont attaqué ceux qui avaient une caméra ou un téléphone. Un véhicule dans lequel se trouvaient dix personnes, dont deux qui transmettaient en direct sur Facebook cet événement, a été éloigné des lieux – ce que confirme une vidéo postée sur YouTube. Ces violences ont duré plusieurs minutes, mais les très nombreux policiers qui y assistaient n’ont rien fait pour y mettre fin.
Quand les violences se sont calmées, les membres du groupe, majoritairement catholiques, se sont assis sur le sol et ont prié. Le témoin, qui a aidé à coordonner et rassembler les plaintes déposées auprès de la justice, croit que des hommes en civil non identifiés ont infiltré le groupe qui priait et lancé des pierres sur les policiers, qui ont alors lancé sur le groupe des gaz lacrymogènes et des grenades flash. Les manifestants qui s’enfuyaient ont de nouveau été attaqués, cette fois par la police, à coups de poing et avec des barres et des grenades électriques.
Selon le témoin interrogé par Amnesty International, au moins 15 hommes ont été embarqués par la police, frappés et abandonnés dans des lieux éloignés ; ils ont dû rentrer chez eux par leurs propres moyens. D’autres personnes ont été hospitalisées, notamment un homme qui a subi des lésions à la colonne vertébrale et perdu quatre dents, et trois ou quatre autres sont toujours hospitalisées pour des blessures non précisées. Les images qui ont circulé sur les réseaux sociaux montrent que cinq personnes au moins ont subi de graves blessures à la tête.