Écrire DES POPULATIONS PAYSANNES RISQUENT D’ÊTRE DÉPLACÉES

Miguel Briceño, dirigeant de la communauté paysanne d’El Porvenir, dans le centre de la Colombie, est visé par des menaces tandis que les tentatives d’expulser cette population de force s’intensifient.

Le 16 août, Miguel Briceño, dirigeant de la communauté d’El Porvenir, dans la commune de Puerto Gaitán (département du Meta), a reçu un appel téléphonique menaçant de la part d’un homme qui s’est présenté comme un commandant des « Urabeños », un groupe paramilitaire. Cet homme a dit à Miguel Briceño : « quand je vous aurai sous la main, ligotés, toi ou quelqu’un de ta famille, des larmes de sang vont couler ». Il s’agit là des dernières menaces en date dont Miguel Briceño ait été victime. Il a signalé les faits aux autorités. Actuellement, la seule mesure concrète de sécurité que les autorités lui fournissent est un téléphone portable.

Les paysans d’El Porvenir font paître leur bétail dans une savane depuis une cinquantaine d’années. Dans les années 1990, l’organisme public chargé d’attribuer les parcelles appartenant à l’État à des paysans sans terre a adjugé illégalement ces terres à Víctor Carranza, qui était, jusqu’à son décès en 2013, l’un des plus puissants entrepreneurs du pays dans le secteur des émeraudes, soupçonné de longue date d’entretenir des liens solides avec des groupes paramilitaires. En juillet 2014, à la suite des demandes formulées par des organisations colombiennes de défense des droits humains, l’Institut colombien de développement rural (INCODER) a émis une résolution annulant les titres fonciers illégaux. Le président Juan Manuel Santos a déclaré en avril 2015 que les héritiers de Víctor Carranza avaient restitué les terres à l’État, mais la communauté n’en a toujours pas la propriété légale, tandis que les menaces contre elle continuent.

Ces derniers mois, des dirigeants de la communauté paysane de Matarraton, non loin, et la communauté autochtone cubeo-sikuani installée dans la zone d’El Porvenir ont également été la cible de nombreuses menaces visant à provoquer leur déplacement forcé.

Les défenseurs des droits humains, ainsi que les populations indigènes, afro-colombiennes et paysannes, sont les principales victimes du conflit armé qui déchire la Colombie depuis des années. Les parties au conflit – d’un côté, les forces de sécurité et les groupes paramilitaires, agissant seuls ou en collusion, et de l’autre, les guérilleros – se rendent coupables d’atteintes aux droits humains, parmi lesquelles des homicides, des disparitions forcées ou des enlèvements, des actes de torture, des violences sexuelles et des déplacements forcés. Depuis le début du conflit, quelque huit millions d’hectares de terres ont été abandonnés ou ont fait l’objet d’une expropriation.

Des dirigeants de communautés déplacées et des personnes militant pour récupérer les terres volées ont été tués ou menacés, surtout depuis que la Loi n° 1448 sur les victimes et la restitution de terres a été approuvée en juin 2011, avant d’entrer en vigueur début 2012. Ce texte prévoit des réparations, notamment la restitution de terres, pour nombre de personnes ayant subi des atteintes aux droits humains, y compris perpétrées par des représentants de l’État. Cependant, de nombreuses autres victimes du conflit n’ont pas la possibilité de demander réparation, alors que de vastes étendues de terre n’ont toujours pas été rendues à leurs propriétaires légitimes. Pour plus d’informations sur le processus de restitution des terres et les obstacles qui s’y opposent, voir le rapport intitulé A land title is not enough : Ensuring sustainable land restitution in Colombia (http://www.amnesty.org/fr/documents/AMR23/031/2014/en/).

Les paysans d’El Porvenir tentent d’obtenir des titres fonciers légaux relatifs aux terres sur lesquelles ils vivent depuis une cinquantaine d’années, par l’intermédiaire de l’INCODER, qui attribue des parcelles appartenant à l’État dans le cadre de la Loi n° 160. L’INCODER doit prendre les mesures nécessaires pour que la population d’El Porvenir puisse obtenir un titre foncier, et faire de même dans de nombreuses affaires liées à des terres appartenant à l’État. Pour en savoir plus sur le cas d’El Porvenir, voir Powerless : the fight for land in Porvenir (https://www.amnesty.org/en/latest/campaigns/2015/02/powerless-the-fight-for-land-in-porvenir/).

En raison de ces difficultés, des membres de la communauté d’El Porvenir, ainsi que la communauté paysanne voisine de Matarraton et la communauté autochtone cubeo-sikuani qui s’est installée dans la zone d’El Porvenir ont été visés par des menaces de mort répétées. Le 21 juin 2016, le président du conseil de l’action communale de Matarraton a reçu l’appel d’un homme, qui s’est présenté comme un membre des « Urabeños » et lui a annoncé qu’il était sur une liste de 350 personnes à abattre, dont 15 de Matarraton, qui seraient tuées si elles ne quittaient pas les terres qu’elles occupent. Le 15 juin 2016, un dirigeant de la communauté autochtone cubeo-sikuani a reçu un appel téléphonique durant lequel son correspondant lui a proposé de l’argent en vue d’acquérir chaque maison de la communauté et lui a dit qu’il devait participer à une réunion pour discuter de cette proposition. Cette personne a ajouté que tout refus d’assister à cette réunion mettrait la communauté entière en danger.

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