Écrire Poursuivie pour avoir critiqué le gouvernement

Ekaterina Vologjeninova, une vendeuse, sera jugée le 27 octobre pour « incitation à la haine et à l’inimitié » contre le gouvernement russe et les Russes combattant dans l’est de l’Ukraine. Ces charges sont en relation avec des propos qu’elle a tenus sur les médias sociaux, qui condamnaient l’annexion de la Crimée par la Russie et la présence russe dans le Donbass, dans l’est de l’Ukraine.
Ekaterina Vologjeninova, une vendeuse d’Ekaterinbourg, dans la région de l’Oural, en Russie, passera en jugement le 27 octobre pour « incitation publique à la haine ou l’inimitié, et dénigrement de la dignité humaine ». Les charges retenues contre elles sont en rapport avec des publications sur le site de médias sociaux VKontakte, dans lesquelles elle critiquait l’annexion de la Crimée par la Russie et l’implication de la Russie dans le Donbass, dans l’est de l’Ukraine.
En 2014, Ekaterina Vologjeninova a partagé sur son compte VKontakte des contenus provenant de plusieurs publications, films, textes et images en relation avec la situation en Ukraine. Plusieurs de ces statuts critiquaient l’annexion de la Crimée par la Russie (cette annexion est contraire au droit international) et la présence de la Russie dans le Donbass, dans l’est de l’Ukraine. Son profil n’est visible que par ses amis ayant également un compte sur VKontakte. Le 12 décembre 2014, son appartement a été perquisitionné par des responsables de l’application des lois, et elle a été emmenée au poste de police pour un interrogatoire. Elle a alors appris qu’elle faisait l’objet de poursuites pénales pour « incitation publique à la haine ou l’inimitié, et dénigrement de la dignité humaine » (article 282, 1ère partie du Code pénal russe). Si elle est déclarée coupable, elle encourt une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.
Durant l’enquête sur cette affaire, les autorités ont sollicité une « expertise psycholinguistique » afin d’analyser ses publications, et ont interrogé ses collègues et d’autres connaissances dans le but de prouver qu’elle avait spécifiquement eu l’intention d’inciter à la haine. L’enquête a conclu que l’intention d’Ekaterina Vologjeninova, en critiquant les politiques du gouvernement sur Internet (uniquement avec ses amis), était d’inciter à la haine contre le gouvernement russe et contre les Russes combattant dans l’est de l’Ukraine. Fin septembre 2015, le cas a été transmis au tribunal de Jeleznodorojnyi, à Ekaterinbourg. Le procès doit s’ouvrir le 27 octobre.

Depuis l’annexion de la Crimée par la Russie et le début des combats entre forces ukrainiennes et groupes armés soutenus par la Russie dans le Donbass (est de l’Ukraine) au printemps 2014, plusieurs personnes ont été condamnées en Russie, pour incitation à la haine et à l’inimitié sur Internet en relation avec des propos dénonçant la politique russe vis-à-vis de l’Ukraine et l’annexion de la Crimée.
Le nombre d’internautes poursuivis pour leurs opinions pacifiques mais critiques concernant la politique russe actuelle est en augmentation. L’article 280 (appels publics à se livrer à des activités extrémistes) et l’article 282 du Code pénal russe sont de plus en plus souvent utilisés pour étouffer la dissidence et menacer ceux qui remettent en question les agissements du gouvernement vis-à-vis de l’Ukraine.
L’Observation générale n° 34 du Comité des droits de l’homme des Nations unies sur la liberté d’expression indique que ce droit « s’étend même à l’expression qui peut être considérée comme profondément offensante ». Dans tous les cas de figure, des sanctions pénales pour des propos tenus en privé sur les médias sociaux seraient excessives et disproportionnées au regard des normes internationales en matière de droits humains, et enfreindraient le droit à la liberté d’expression. Les publications d’Ekaterina Vologjeninova incluent des contenus provenant de sources ukrainiennes, notamment un dessin satirique représentant le président Vladimir Poutine un couteau à la main au-dessus d’une carte du Donbass. Sa main est retenue par une autre main et on peut lire « Arrêtons cet être nuisible ! » en-dessous de l’image. Elle a également publié plusieurs poèmes et déclarations dans lesquels les Russes sont décrits comme des « esclaves éternels - corps et âme », et comme ayant « des cerveaux de poule », et affirmé que ceux qui combattent dans le Donbass ont conclu un « pacte sanguinaire ».
Ekaterina Vologjeninova a dit à Amnesty International que son compte sur VKontakte n’était pas public et n’était visible que par ses amis. Elle a parcouru les médias ukrainiens parce qu’elle était à la recherche d’informations différentes de celles qui étaient relayées par la télévision publique et les autres médias contrôlés par l’État en Russie, et a partagé des publications ukrainiennes sur sa page personnelle. L’enquête a affirmé que les « j’aime » sous certains de ses billets indiquent qu’elle a bien incité à la haine avec ces publications.
Pendant plusieurs mois en 2014, son adresse électronique a figuré sur une liste de diffusion du mouvement nationaliste ukrainien Pravy Sektor (secteur droit), une organisation interdite en Russie en novembre 2014 au motif qu’elle était extrémiste. L’enquête a affirmé qu’Ekaterina Vologjeninova était membre de Pravy Sektor, ce qu’elle nie catégoriquement.
Les autorités russes nient systématiquement l’implication directe de la Russie dans le conflit dans l’est de l’Ukraine, malgré l’accumulation de preuves montrant le contraire. La télévision publique et d’autres médias contrôlés par l’État ont présenté le conflit dans le Donbass comme une attaque menée contre une population russophone pacifique par des forces se trouvant sous le commandement d’un gouvernement « fasciste » à Kiev.

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