Écrire Un prisonnier n’a pas accès au traitement médical dont il a besoin

Đinh Nguyên Kha, prisonnier d’opinion, n’a pas accès au traitement médical dont il a besoin suite à une opération qu’il a subie il y a trois mois pour retirer une tumeur de son estomac. Cela s’apparente à un acte de torture ou tout autre traitement cruel, inhumain ou dégradant.

Đinh Nguyên Kha a été arrêté en octobre 2012 après avoir été accusé d’avoir distribué des tracts jugés critiques envers la réponse du gouvernement vietnamien aux actions de la Chine dans la mer de Chine méridionale/mer de l’Est, une zone controversée. Inculpé au titre de l’article 88 du Code pénal de 1999 (« propagande » contre l’État), il a été condamné à six ans d’emprisonnement suivis de trois ans de résidence surveillée par un tribunal de la province de Long An. Il est actuellement détenu à la prison de Xuyên Mộc, dans la province de Bà Rịa Vũng Tàu (sud du Viêt-Nam) et doit être libéré en octobre 2018.

Il y a trois mois, Đinh Nguyên Kha a subi une opération pour retirer de son estomac une tumeur bénigne de la taille d’un citron. Cependant, malgré ses demandes répétées et celles de sa famille, les autorités pénitentiaires lui refusent un traitement médical de suivi. La cicatrice de son opération a guéri mais on observe des gonflements et l’homme a peur que des complications internes surviennent à la suite de l’intervention.

À la suite d’une récente visite, ses proches ont déclaré qu’il souffrait physiquement et qu’il avait perdu environ 4 kg ces derniers mois. Đinh Nguyên Kha était âgé d’une vingtaine d’année et était en forme lorsqu’il est arrivé en prison. Il est maintenant incapable de faire quoi que ce soit de physique et a même du mal à lever ses bras au-dessus de sa tête. La prison a accès à un centre médical local dans la ville de Vũng Tàu, mais les autorités pénitentiaires ne lui permettent pas d’y accéder.

Le priver de traitement médical dans ces circonstances peut s’apparenter à une violation de l’interdiction de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, ce qui va à l’encontre, entre autres, de la Convention contre la torture, ratifiée par le Viêt-Nam en février 2015.
Đinh Nguyên Kha partage une cellule de 4 m² avec un autre détenu dans le quartier de haute sécurité de la prison de Xuyên Mộc. Ils n’ont pas de lits et doivent dormir sur le sol près d’un trou servant de toilettes. De plus, le toit est en acier et la cellule atteint des températures extrêmement basses en hiver et hautes en été. Đinh Nguyên Kha a déjà été placé en détention à l’isolement comme punition, dont une période de 10 jours en 2015 pendant laquelle il a été menotté après avoir introduit clandestinement de la nourriture pour un autre détenu à l’isolement.

Đinh Nguyên Kha n’a pas été autorisé à voir ses proches jusqu’à la veille de son procès, neuf mois après sa première arrestation. Bien qu’ils puissent désormais lui rendre visite une fois par mois, les visites sont surveillées par le personnel de la prison, qui les observe et les écoute. Ses proches ressentent le besoin de lui apporter de la nourriture pour compléter les maigres repas de mauvaise qualité que Đinh Nguyên Kha reçoit en prison.

Đinh Nguyên Kha a passé un dépistage du VIH au moment de son opération. On lui a dit que le test était négatif, mais il n’a pas été autorisé à voir les résultats et il est toujours préoccupé à l’idée d’avoir contracté le virus. Ses inquiétudes sont amplifiées par la mort en 2014 de Huỳnh Anh Trí, un prisonnier politique qui a contracté le VIH en purgeant une peine de prison de 14 ans pour « avoir tenté de renverser l’administration du peuple » (article 79 du Code pénal). Après sa libération, Huỳnh Anh Trí a raconté qu’il avait été menotté et que les prisonniers devaient partager les rasoirs. Il a également raconté que depuis qu’il est en prison, il a vu d’autres prisonniers politiques contracter le VIH et mourir.

Depuis son arrestation, les proches de Đinh Nguyên Kha sont victimes de harcèlement et d’intimidation par les autorités vietnamiennes. Son frère, Đinh Nhật Uy, a été arrêté et détenu pendant quatre mois en 2013 après avoir publié des commentaires sur sa page Facebook demandant la libération de Đinh Nguyên Kha. Đinh Nhật Uy a été libéré après son procès, au cours duquel il a été condamné à 15 mois d’emprisonnement avec sursis et à une mise à l’épreuve d’un an, au titre de l’article 258 du Code pénal (« abus des libertés démocratiques »).

Depuis sa libération, Đinh Nhật Uy ne peut pas trouver de travail et de logement à cause de la pression que les autorités exercent sur les propriétaires et les employeurs. Il a dû rentrer vivre chez sa mère. De même, la sœur de Đinh Nhật Kha ne peut pas trouver de travail ni louer une maison, et elle a également dû rentrer vivre chez sa mère avec son enfant. Jusqu’à récemment, la police surveillait de près leur domicile et suivait les membres de la famille lorsqu’ils vaquaient à leurs occupations. Cela s’est arrêté quand la police a installé une caméra de surveillance à l’extérieur de leur domicile.

Bien que le Viêt-Nam a ratifié la Convention contre la torture, le pays n’a pas pris de mesures suffisantes pour se mettre en conformité avec ses dispositions. Amnesty International a recueilli des informations sur des cas de torture et de mauvais traitements sur des prisonniers d’opinion au Viêt-Nam dans un rapport intitulé “Prisons Within Prisons : Torture and ill-treatment of prisoners of conscience in Viet Nam”, voir : https://www.amnesty.org/en/documents/asa41/4187/2016/en/. Đinh Nguyên Kha figure également sur la liste des 84 prisonniers d’opinion recensés au Viêt-Nam qui a été publiée en juillet 2016 (voir : https://www.amnesty.org/en/documents/asa41/4389/2016/en/).

L’article 88 du Code pénal est souvent utilisé par les autorités vietnamiennes pour emprisonner des dissidents pour leur militantisme pacifique et l’exercice de leur liberté d’expression. Amnesty International et d’autres organisations ont demandé de nombreuses fois que l’article 88 soit abrogé ou modifié pour être conforme au droit et aux normes internationaux relatifs aux droits humains. En plus de la Convention contre la torture, le Viêt-Nam est aussi lié par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques depuis 1982.

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