Écrire Une prisonnière a besoin d’une opération chirurgicale urgente

Sibel Çapraz est emprisonnée et les autorités lui refusent une opération vitale et urgente, ainsi que des soins médicaux adéquats. Elle a été blessée par balles en novembre 2015 à Yüksekova, dans le sud-est de la Turquie, lors d’affrontements entre les forces de sécurité et le PKK. Elle a été arrêtée en mars 2016, alors qu’elle était hospitalisée.

Détenue à la prison pour femmes de Bakırköy, à Istanbul, Sibel Çapraz est actuellement en instance de jugement pour « incitation du public à la haine ou à l’hostilité » et « appartenance à une organisation terroriste armée » (le Parti des travailleurs du Kurdistan / Union des communautés du Kurdistan, PKK/KCK). On lui refuse une intervention chirurgicale urgente, qui aurait dû avoir lieu en février 2016, pour fermer une colostomie. Différer cette opération, selon une expertise médicale dont Amnesty International a pris connaissance, augmente le risque de complications et pourrait mettre la vie de cette femme en danger.

Dans la nuit du 27 novembre 2015, Sibel Çapraz, membre du conseil municipal de Hakkari, a été blessée par balles au bras droit et à l’abdomen à Yüksekova, une ville du département de Hakkari (sud-est de la Turquie), lors d’affrontements opposant les forces de sécurité à des individus armés affiliés au PKK. Le lendemain de la fusillade, Sibel Çapraz a subi une opération du bras, ainsi qu’une colostomie d’urgence, ses intestins ayant été touchés. Le 23 décembre, elle a été transférée à l’hôpital des pathologies osseuses de Baltalımanı, à Istanbul, pour une nouvelle opération du bras. En février 2016, une intervention chirurgicale était prévue pour refermer la colostomie, mais l’opération n’a pas pu avoir lieu, Sibel Çapraz recevant toujours des soins pour sa blessure au bras.

Son frère a expliqué que, le 4 mars 2016, la police était venue à l’hôpital et l’avait emmenée au palais de justice de Çağlayan. Le tribunal a ordonné le placement de Sibel Çapraz en détention provisoire.

Près d’un an après, cette femme n’a toujours pas bénéficié de l’opération de fermeture de colostomie qui était initialement prévue pour février 2016. Elle dit souffrir énormément et, en raison de sa blessure au bras, doit s’en remettre à ses codétenues pour le changement de sa poche de colostomie, qui doit être effectué plusieurs fois par jour. Les avocats de Sibel Çapraz ont alerté le tribunal au sujet de ces questions médicales, demandant que leur cliente puisse être soignée et obtenir la levée de son régime de détention provisoire. Ils n’ont pas obtenu gain de cause.

La Fondation turque des droits humains (TİHV) a également adressé une requête à la Direction générale des prisons et des centres de détention, demandant que Sibel Çaprqui puisse bénéficier d’urgence de l’opération dont elle a besoin et poursuivre les soins nécessaires pour son bras. Les autorités, sans répondre directement à la question de l’intervention médicale urgente, ont affirmé qu’elle recevait tous les soins qui lui étaient nécessaires. L’avocat de Sibel Çapraz a indiqué à Amnesty International que ces soins consistaient en un traitement de rééducation, qui ne saurait se substituer à l’intervention chirurgicale dont elle a besoin.

Sibel Çapraz a été blessée lors d’une fusillade à Yüksekova, peu après la fin d’un couvre-feu imposé dans cette ville 24 heures sur 24 pendant trois jours. D’après sa famille, elle a été touchée par des balles tirées par la police devant la maison de sa sœur, chez qui elle séjournait.

En raison de l’absence d’enquêtes efficaces et de l’existence de témoignages contradictoires, les circonstances dans lesquelles se sont déroulées nombre de fusillades dans le sud-est de la Turquie à l’époque restent obscures. Cependant, des recherches menées par Amnesty International après l’instauration d’un couvre-feu à Cizre en septembre 2015 ont montré que les forces de sécurité utilisaient des armes à feu de manière imprudente dans les zones sous couvre-feu et que les opérations étaient menées dans le but de tuer - et non d’arrêter - des individus armés. Pour en savoir plus, voir le document suivant (en anglais) : https://www.amnesty.org/en/documents/eur44/3230/2016/en/. Au nombre des personnes tuées dans les zones sous couvre-feu figuraient des enfants en bas âge et des personnes âgées, peu susceptibles d’avoir joué un rôle dans les affrontements armés. Amnesty International considère que l’imposition par les autorités de couvre-feux à durée illimitée, 24 heures sur 24, est une mesure disproportionnée, contraire aux droits humains et, dans certains cas, assimilable à un châtiment collectif.

En vertu de dispositions du droit international que la Turquie est tenue de respecter, Sibel Çapraz a le droit de recevoir les soins médicaux dont elle a besoin, dès que possible et sans frais. Les détenus qui, comme Sibel Çapraz, nécessitent des soins spéciaux doivent être transférés dans un établissement médical à même de dispenser ces soins.

Le refus de soins médicaux dont Sibel Çapraz fait l’objet est interdit par l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus (également appelées Règles Nelson Mandela). En vertu de la Règle 24, les détenus doivent « recevoir des soins de même qualité que ceux disponibles dans la société et avoir accès aux services nécessaires sans frais et sans discrimination fondée sur leur statut juridique. » La Règle 27 dispose : « Tous les établissements pénitentiaires doivent garantir l’accès rapide aux soins médicaux en cas d’urgence. Les détenus qui requièrent des traitements spécialisés ou soins chirurgicaux doivent être transférés vers des établissements spécialisés ou vers des hôpitaux civils. Lorsqu’un établissement pénitentiaire dispose de ses propres installations hospitalières, le personnel affecté et le matériel fourni doivent y être suffisants pour assurer un traitement et des soins adéquats aux détenus qui y sont envoyés. »

En outre, la Turquie est liée par une série de traités relatifs aux droits humains garantissant le droit de recevoir des soins médicaux quel que soit le statut du patient. L’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, instrument que la Turquie a ratifié, interdit les traitements inhumains ou dégradants. La Cour européenne des droits de l’homme a statué que l’absence de soins médicaux appropriés pour les personnes en détention pouvait constituer une violation de l’article 3. La Turquie a de plus ratifié le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies, dont l’article 12 consacre le droit à la santé, qui garantit l’accès à des soins et à des traitements médicaux adéquats.

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