Écrire Le procès de Shawkan repoussé au 23 avril

Les autorités égyptiennes ont repoussé le procès du photographe de presse Mahmoud Abu Zeid, plus connu sous le nom de Shawkan, au 23 avril. Il est poursuivi pour des accusations forgées de toutes pièces en raison de son travail de journalisme. Cet homme est un prisonnier d’opinion et risque la peine de mort s’il est condamné.

Le 26 mars, le tribunal pénal du Caire a repoussé le procès de Mahmoud Abu Zeid au 23 avril 2016. L’audience a été repoussée pour que les avocats de la défense puissent obtenir les éléments du dossier et préparer sa défense et pour que le parquet puisse soumettre des éléments de preuve corroborant les accusations.

Depuis la première audience de son procès le 26 mars, Mahmoud Abu Zeid fait l’objet d’accusations spécifiques forgées de toutes pièces, notamment des accusations de « participation à une bande criminelle », « meurtre », « tentative de meurtre », « participation à un rassemblement en vue d’intimider, de générer la terreur et de mettre la vie des citoyens en danger », « obstruction des services publics », tentative de « renverser le régime par la force et la violence, une démonstration de force et la menace du recours à la violence », « résistance aux autorités », « obstruction à l’application des lois, surveillance » et « trouble à l’ordre public ». Mahmoud Abu Zeid a nié toutes les accusations portées contre lui. S’il est déclaré coupable, il risque la peine de mort.

Mahmoud Abu Zeid est détenu depuis le 14 août 2013, lorsqu’il a été arrêté alors qu’il prenait des photos de la violente dispersion du sit-in de la place Rabaa al Adawiya, au Caire. Il a maintenant passé plus de 950 jours en détention provisoire, ce qui dépasse la limite de deux ans de détention provisoire prévue pour les personnes n’ayant pas été condamnées à la prison à perpétuité ou à la peine de mort, tel qu’énoncé à l’article 143 du Code égyptien de procédure pénale. La détention de Shawkan est illégale au regard de cet article et de la loi égyptienne. Son avocat a présenté un recours devant un juge demandant la libération immédiate de Mahmoud Abu Zeid en attendant son procès le 23 avril 2016, mais celui-ci a été rejeté.

Depuis qu’il a appris qu’il était atteint de l’hépatite C, Mahmoud Abu Zeid s’est à plusieurs reprises vu refuser l’accès à des soins médicaux pendant sa détention au centre pénitentiaire de Tora, ce qui a entraîné une dégradation de son état de santé. Sa famille a demandé au parquet de le libérer pour raisons médicales à plusieurs reprises.

Photographe de presse indépendant, Mahmoud Abu Zeid a été arrêté au cours d’une mission pour l’agence britannique Demotix basée à Londres. Il avait précédemment travaillé pour plusieurs journaux, notamment le Time Magazine, Die Zeit, BILD et Media Group. Au moment de son arrestation, il couvrait l’intervention violente des forces de sécurité égyptiennes contre le sit-in de la place Rabaa al Adawiya du Caire, le 14 août 2013. L’agence Demotix a confirmé aux services du procureur que le journaliste travaillait pour elle au moment de son arrestation, mais il a tout de même été arrêté.

L’ordonnance de maintien en détention a été renouvelée à plusieurs reprises, pour permettre au ministère public de poursuivre son enquête et de procéder à des interrogatoires. Aux termes du Code égyptien de procédure pénale, la détention provisoire à de telles fins est limitée à six mois pour les personnes inculpées d’un délit, à 18 mois en cas d’inculpation pour un crime et à deux ans si le chef d’accusation concerne un crime passible de l’emprisonnement à vie ou de la peine de mort (article 143 du Code de procédure pénale). La détention provisoire de Mahmoud Abu Zeid a dépassé cette limite en août 2015. Ses avocats ont déposé un recours devant la cour d’appel en vue d’obtenir sa remise en liberté immédiate, sans succès.

Mahmoud Abu Zeid a déclaré que des policiers et des militaires l’ont frappé pendant son premier jour de détention et le 17 août 2013, lorsqu’il a été transféré d’une cellule surpeuplée du poste de police du Caire à la prison d’Abu Zaabal, au Caire. Les agents l’auraient frappé à coups de poing et de pied ainsi qu’avec des bâtons. Il a également été détenu dans une camionnette garée pendant huit heures alors que la température dépassait les 30 °C, sans nourriture, sans eau et sans air frais, lorsqu’il a été emmené à la prison d’Abu Zaabal. Dans une lettre publiée en avril 2015 par Amnesty International, il décrivait les conditions épouvantables dans lesquelles il était maintenu et qualifiait sa détention illimitée de « psychologiquement insupportable ».

Le procès de Mahmoud Abu Zeid a été repoussé du 12 décembre 2015 au 6 février 2016, apparemment dans le but de laisser du temps pour les travaux d’agrandissement des boxes des accusés, car des fonctionnaires du tribunal ont constaté que la salle d’audience du tribunal de l’Institut de police de Tora était trop petite pour accueillir tous les accusés. Pendant l’audience du 26 mars 2016, le parquet a introduit de nouvelles accusations spécifiques pour Mahmoud Abu Zeid. Son avocat a demandé que le procès soit repoussé pour permettre d’étudier les documents du dossier et les éléments audiovisuels fournis par le parquet. L’audience a été repoussée au 23 avril 2016.

Les procédures à l’encontre de Shawkan ont été iniques. Ses avocats se sont à plusieurs reprises vu refuser l’accès à des documents clés liés à l’affaire, notamment la liste des chefs d’accusation retenus contre lui. Ceci les empêche de préparer convenablement la défense de leur client. Il est par ailleurs plus difficile de veiller à ce que le droit à un procès équitable soit garanti pour chaque accusé dans le cadre de procès collectifs. Les autorités égyptiennes ont eu recours à des procès collectifs pour prendre pour cible des groupes d’opposition, dans le cadre desquels de nombreuses personnes poursuivies ont fait l’objet d’accusations forgées de toutes pièces sans que la responsabilité de chaque accusé n’ait besoin d’être prouvée.

L’Égypte est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) dont l’article 9 interdit le recours à la détention arbitraire. L’article 19 du PIDCP garantit par ailleurs le droit de chercher, de recevoir et de diffuser des informations et des idées. Son article 14 garantit le droit qu’a toute personne de faire entendre sa cause équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi. Cet article garantit en outre le droit, pour toute personne accusée d’une infraction pénale, à être informée dans le plus court délai de la nature et des motifs de l’accusation portée contre elle, à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, à être présente au procès et à interroger ou faire interroger les témoins à charge.

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