Écrire Un professeur d’université palestinien en détention

Le 13 juin, un juge militaire israélien a confirmé l’ordre de mise en détention administrative visant Ahmad Qatamesh pour une durée de trois mois. Cet universitaire palestinien était détenu de manière arbitraire au titre d’un ordre de détention administrative émis le 17 mai. Il est détenu depuis le 14 mai, sans inculpation ni jugement, à la prison d’Ofer. Ahmad Qatamesh est un prisonnier d’opinion.

Ahmad Qatamesh, 67 ans, s’est vu remettre un ordre de détention administrative de trois mois signé par le commandant militaire des Forces de défense d’Israël en Cisjordanie occupée, le 17 mai. Selon son avocat, Mahmoud Hassan de l’Association Addameer, cet ordre a été confirmé lors d’une audience le 13 juin. Ahmad Qatamesh a été arrêté une première fois par des soldats israéliens lors d’un raid à son domicile le 14 mai, juste avant l’aube.

Ahmad Qatamesh est un commentateur politique et un professeur d’université. Il critique haut et fort les autorités israéliennes et palestiniennes, ainsi que les accords d’Oslo, un accord intérimaire ayant transféré aux autorités palestiniennes un contrôle partiel sur certains secteurs des territoires palestiniens occupés. Il a appelé à un changement radical dans le paysage politique palestinien et la stratégie des Palestiniens, et à la fin des divisions entre le Hamas et l’Autorité palestinienne en Cisjordanie, et a souligné que la population palestinienne est mécontente de ses dirigeants. Récemment, il a fait part de son soutien à la grève de la faim collective de prisonniers palestiniens, entamée le 17 avril : environ 1 500 détenus ont refusé toute nourriture pendant plus de 40 jours, pour contester les conditions de leur détention dans les geôles israéliennes. Amnesty International pense qu’il a été arrêté uniquement en raison de ses écrits et activités politiques non violents et afin de dissuader d’autres Palestiniens d’avoir des activités militantes.

Ce n’est pas la première fois qu’Ahmed Qatamesh est un prisonnier d’opinion ou est détenu dans les prisons israéliennes sans inculpation ni jugement. Il a au total passé plus de huit ans en détention administrative aux mains des autorités israéliennes. Il a été libéré de détention administrative en décembre 2013. L’épouse d’Ahmad Qatamesh a déclaré à Amnesty International qu’il a subi des lésions à l’oreille interne affectant son équilibre, à cause du traitement auquel il a été soumis et du manque de soins médicaux lors de ses précédentes détentions. Elle a ajouté que, depuis sa libération en 2013, il s’est évanoui et a perdu connaissance à maintes reprises et qu’elle demeure inquiète pour son état de santé.

Selon des témoins, la descente effectuée dans la nuit qui a mené à l’arrestation d’Ahmad Qatamesh a eu lieu le 14 mai. Vers quatre heures du matin, entre 40 et 50 soldats israéliens circulant à bord d’au moins sept jeeps de l’armée et d’un véhicule blindé sont arrivés dans le quartier d’al Bireh à Ramallah, en Cisjordanie occupée, où a vécu Ahmed Qatamesh. D’après les témoins, les soldats ont défoncé la porte d’entrée de son ancien domicile, qui était vide. Ils ont alors brisé les portes des voisins, avant de se diriger vers le domicile des frères d’Ahmad Qatamesh.

Vers 4 h 30, les soldats sont entrés chez deux de ses frères, réveillant les deux familles. Comme ils ne l’y ont pas trouvé non plus, ils ont forcé son frère Khaled à les conduire au domicile actuel d’Ahmad Qatamesh, non loin de là. Selon Khaled Qatamesh, les soldats l’ont fait marcher devant eux et lui ont ordonné de frapper à la porte, comme s’il était « une espèce de bouclier ». Ahmad Qatamesh a alors été interpellé chez lui et emmené par des soldats dans un véhicule blindé. Les soldats n’ont pas fouillé la maison et ils n’ont pris aucun document, selon Khaled Qatamesh.

Avant d’être interpellé, Ahmad Qatamesh est souvent apparu à la télévision locale et est intervenu dans des émissions de radio. Il a dans ses écrits analysé diverses propositions pour des systèmes alternatifs de gouvernance entre Palestiniens et Israéliens. Selon sa famille, en 2016, le Service du renseignement israélien l’a convoqué à deux reprises pour interrogatoire. On lui a dit qu’il devait cesser ses écrits politiques et ses prises de parole en public, s’il ne voulait pas risquer d’« avoir des problèmes ». Il a refusé d’obtempérer les deux fois, répondant aux agents du Service de renseignement qu’il était écrivain et universitaire et qu’il écrirait et dirait ce qu’il voulait.

L’épouse d’Ahmad Qatamesh a informé Amnesty International que, lors d’une rencontre avec son avocat le 21 mai à la prison d’Ofer, près de Ramallah, son époux a annoncé qu’il ne prendrait plus ses médicaments en prison pour protester contre son arrestation et sa détention arbitraires, et ce tant qu’il ne serait pas autorisé à être examiné par un médecin indépendant.

La détention administrative – introduite soi-disant à titre exceptionnel pour les personnes qui représentent un danger extrême et imminent du point de vue de la sécurité – est utilisée par les autorités israéliennes en parallèle du système judiciaire pour arrêter, inculper et poursuivre des personnes soupçonnées d’infractions pénales, voire des personnes qui n’auraient jamais dû être arrêtées. Les ordres de détention administrative peuvent être renouvelés indéfiniment et Amnesty International considère les Palestiniens détenus dans ce cadre comme des prisonniers d’opinion, incarcérés uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression et d’association. Selon l’ONG israélienne HaMoked, début juin 2017, on recensait 477 « détenus administratifs » emprisonnés sans inculpation ni jugement par Israël.

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