Quarante-sept étudiants originaires du Darfour sont maintenus en détention au secret. Ils ont été arrêtés par des membres des forces de sécurité lors de descentes à leur domicile, les 23 et 27 décembre 2018, dans les États de Sennar et de Khartoum. Un étudiant a été tué lors d’une de ces descentes. Au cours de conférences de presse, les 23 et 28 décembre 2018, les autorités ont accusé ces étudiants de s’être infiltrés dans les manifestations, d’avoir des liens avec un groupe rebelle et d’avoir projeté de tuer des manifestants lors des actions de protestation en cours dans le pays.
Écrire Quarante-sept étudiants détenus au secret, un étudiant tué
Le 19 décembre 2018, des manifestations ont débuté au Soudan en raison de la hausse du prix du pain, ainsi que des pénuries d’essence et de liquidités dans les banques. Ces manifestations se poursuivent et se sont étendues à au moins 35 villes, dans 15 des 18 États que compte le Soudan.
Le 20 décembre 2018, les autorités soudanaises ont bloqué la plupart des sites de réseaux sociaux et des applications de messagerie tels que Facebook, WhatsApp, Twitter et Instagram. Elles ont également censuré la presse écrite, qui reçoit régulièrement des instructions lui interdisant de publier des informations sur les manifestations.
Les 20 et 21 décembre 2018, le gouvernement soudanais a imposé l’état d’urgence dans trois États : le Nil, Al Qadarif et le Nil Blanc, ainsi qu’un couvre-feu dans plusieurs villes, dont Dongola et Atbara, où les manifestations ont débuté. L’état d’urgence est en vigueur dans les États du Darfour depuis 2003, dans le Kordofan du Sud depuis 2011, et dans le Kordofan du Nord et le Kassala depuis 2017. Douze États sur 18 sont donc actuellement en état d’urgence au Soudan.
Les cours ont été suspendus dans la plupart des établissements d’enseignement du pays. Amnesty International estime que plus de 40 personnes ont été tuées et au moins 175 autres blessées lors de la répression brutale des manifestations par les autorités. Beaucoup ont subi des blessures invalidantes. Plus de 1 269 arrestations ont eu lieu et ce nombre ne cesse d’augmenter.
Amnesty International a recueilli des informations sur de graves violations des droits humains à l’encontre d’étudiants du Darfour. Depuis le début du conflit au Darfour, les étudiants de la région qui suivent des études dans d’autres régions du Soudan sont particulièrement visés par des arrestations arbitraires, des expulsions de leurs logements universitaires, des actes de torture et d’autres mauvais traitements, ainsi que des homicides illégaux commis par les forces de sécurité.
Le Service national de la sûreté et du renseignement (NISS) dispose de vastes pouvoirs en matière d’arrestation et de détention en vertu de la Loi de 2010 relative à la sécurité nationale, qui lui permet notamment de maintenir des suspects en détention jusqu’à quatre mois et demi sans contrôle judiciaire. Des membres du NISS usent de ces pouvoirs pour procéder à des arrestations et placements en détention arbitraires, et nombre de personnes privées de liberté au Soudan se voient infliger des actes de torture et d’autres mauvais traitements. La Loi relative à la sécurité nationale protège les membres du NISS de toute poursuite pour les actes commis dans l’exercice de leurs fonctions, d’où une culture généralisée de l’impunité. Cette loi a été modifiée en janvier 2015 pour élargir le mandat du NISS, qui était jusqu’alors un service de renseignement dédié à la collecte et l’analyse d’informations, afin de lui permettre d’exercer diverses fonctions relevant d’ordinaire des compétences des forces armées ou des forces de l’ordre. Ces modifications confèrent au NISS des pouvoirs discrétionnaires illimités pour déterminer ce qui constitue une menace politique, économique ou sociale et comment y faire face. Ni la Loi relative à la sécurité nationale ni l’article 151 révisé n’exigent, explicitement ou implicitement, que les agents du NISS respectent le droit international, régional et national applicable dans l’exercice de leurs fonctions.
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