Écrire Quatre exécutions, 10 personnes en danger

Quatre hommes ont été exécutés le 29 juillet en Indonésie pour des infractions liées aux stupéfiants. Neuf autres hommes et une femme ont obtenu un sursis de dernière minute alors qu’ils se trouvaient déjà sur le lieu d’exécution. On ignore le motif et la durée de ce sursis et les 10 personnes concernées risquent toujours d’être exécutées.
Le 29 juillet vers 1 heure du matin, les autorités indonésiennes ont passé par les armes Humphrey Jefferson Ejike, un Nigérian, deux autres hommes de nationalité nigériane et un Indonésien sur l’île de Nusakambangan, près de Cilacap (Java central). Ces hommes avaient été condamnés pour des infractions liées aux stupéfiants. Pourtant, ces infractions n’entrent pas dans la catégorie des « crimes les plus graves » qui seuls, au regard du droit international, peuvent emporter la peine capitale. Humphrey Jefferson Ejike avait formé un recours en grâce le 26 juillet mais le président ne l’avait même pas encore examiné lorsque l’exécution a eu lieu. Le ressortissant indonésien avait fait de même le 28 juillet, un peu plus d’une semaine après que la Cour suprême a rejeté sa demande de réexamen. Le 28 juillet au matin, les autorités ont informé les familles des 14 prisonniers désignés que les exécutions se dérouleraient le jour même.
Merri Utami, Agus Hadi et Pujo Lestari, trois Indonésiens, Zulfiqar Ali, un Pakistanais, et six autres hommes avaient aussi été désignés et emmenés sur le lieu d’exécution. Cependant, ils ont été reconduits dans les cellules où les détenus sont placés avant l’application de la peine capitale, sans savoir pourquoi ils n’avaient pas été exécutés. Merri Utami a été transférée ensuite de la prison de l’île de Nusakambangan à un centre de détention pour femmes. Lors d’une conférence de presse tenue le même jour, le substitut du procureur général a déclaré que les pouvoirs publics n’avaient pas encore décidé d’une date d’exécution pour les 10 prisonniers restants. Le procureur général a indiqué plus tard que le parquet étudierait les dossiers de manière exhaustive afin de s’assurer que ces personnes n’avaient été victimes d’« aucune erreur judiciaire ou d’une autre nature ».
À maintes reprises, les autorités indonésiennes ont cité leur programme d’exécutions comme étant un moyen efficace de lutte contre le trafic de stupéfiants, alors qu’aucun élément digne de foi ne permet de soutenir cette argumentation.

Humphrey Jefferson Ejike n’a pas été autorisé à consulter un avocat au moment de son arrestation, pendant son interrogatoire ni en détention. Au total, il a été détenu cinq mois sans représentant juridique. Il a affirmé avoir été frappé à plusieurs reprises durant son interrogatoire et menacé d’être abattu s’il refusait de signer des « aveux » ou de nommer ses complices. Agus Hadi et Pujo Lestari, qui risquent d’être exécutés, sont restés neuf semaines aux mains de la police avant de comparaître devant un juge à la première audience de leur procès. Agus Hadi n’a pu bénéficier des services d’un avocat que 20 jours après son arrestation et Pujo Lestari a été pris en charge par un avocat commis d’office 78 jours après son arrestation et une semaine après que la première audience a été fixée. Merri Utami a déclaré à son avocat actuel que, peu après son arrestation, des policiers l’avaient frappée à plusieurs reprises, harcelée sexuellement et menacée de viol si elle n’« avouait » pas qu’elle était en possession de drogue. Elle affirme que sa vision a souffert des coups reçus. Elle a soumis un recours en grâce au président le 26 juillet 2016. Au cours de sa détention provisoire, Zulfiqar Ali s’est vu refuser le droit de contacter son ambassade et il n’a été autorisé à consulter un avocat qu’un mois environ après son arrestation. Lors de son interrogatoire par la police de district, il a été retenu dans une maison pendant trois jours. Il a reçu des coups de poing et de pied et été menacé d’être tué s’il ne signait pas une déclaration dans laquelle il s’incriminait lui-même, ce qu’il a fini par faire. Au bout de trois jours, il a été conduit dans un hôpital de la police, où il a été opéré pour des lésions à l’estomac et aux reins dues aux coups qu’il avait reçus. Il a décrit ces tortures pendant son procès, mais les juges ont déclaré ses « aveux » recevables à titre de preuve. Il n’a reçu qu’une assistance limitée pour la traduction tout au long de sa détention et lors de la procédure judiciaire. Lors de son procès, il a bénéficié d’une traduction du bahasa indonesia vers l’anglais, alors qu’il comprenait mal l’anglais.

D’après des recherches menées par la Commission nationale des droits humains (Komnas HAM), Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits humains, les dysfonctionnements systémiques de la justice en Indonésie ont donné lieu à des violations du principe d’équité des procès et d’autres garanties internationales qui, dans toutes les affaires où l’accusé est passible de la peine de mort, doivent être observés de la manière la plus stricte. Dans plusieurs de ces affaires, les accusés n’ont pas eu la possibilité de consulter un avocat dès leur arrestation ni à d’autres stades de leur procès et de leur appel. Certains ont été maltraités par la police qui voulait leur faire « avouer » des crimes ou les forcer à contresigner des rapports d’enquête policière destinés à servir de preuve devant le tribunal. Pour plusieurs personnes, la première comparution devant un tribunal a eu lieu à l’ouverture du procès, plusieurs mois après leur arrestation. Certaines n’ont pas été assistées d’un avocat lorsqu’elles ont fait appel de leur déclaration de culpabilité ou de leur condamnation, ou n’ont même pas interjeté appel par manque d’information de la part de leurs avocats. En 2015 et 2016, des exécutions ont eu lieu alors même que les tribunaux indonésiens avaient accepté d’examiner les appels formés par les prisonniers concernés. Malgré l’interdiction formelle du droit international d’imposer la peine de mort aux personnes âgées de moins de 18 ans ou souffrant de handicaps mentaux, Amnesty International a établi que les affirmations mises en avant par deux prisonniers concernant pour l’un son jeune âge au moment des faits, et pour l’autre son handicap mental, n’avaient pas fait l’objet d’une enquête approfondie, ce qui a donné lieu à l’imposition illicite de la peine de mort et, dans un cas au moins, à une exécution.

Au moins 46 condamnations à mort ont été prononcées en 2015, soit bien plus qu’en 2014, où seulement six condamnations ont été enregistrées. Parmi les peines de mort prononcées en 2015, 29 concernaient des infractions à la législation sur les stupéfiants et 17 des affaires de meurtre. Au moins 165 prisonniers étaient sous le coup d’une sentence capitale à la fin de l’année. Toutes les exécutions qui ont eu lieu en 2015 et 2016 étaient en rapport avec des infractions liées aux stupéfiants, qui n’entrent pourtant pas dans la catégorie des « crimes les plus graves » au regard du droit international et des normes connexes. Des organes des Nations unies et des experts indépendants ont déclaré que la peine de mort ne pouvait être infligée qu’en cas d’homicide volontaire et que les conventions internationales de lutte contre la drogue ne favorisaient aucunement le recours à ce châtiment.

La plupart des pays du globe ont désormais aboli ce châtiment pour tous les crimes, et 140 pays sont abolitionnistes en droit ou dans la pratique. Amnesty International est opposée à la peine de mort dans tous les cas et en toutes circonstances.

Noms : Merri Utami (f), Zulfikar Ali (h), Humphrey « Jeff » Jefferson Ejike (h), Agus Hadi (h), Pujo Lestari (h) et neuf autres hommes
Hommes et femme

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