Écrire Reprise du procès d’une militante jugée sur la base d’accusations sans fondement

Le procès au pénal contre Ioulia Tsvetkova, une artiste et militante de Komsomolsk-sur-l’Amour, dans l’Extrême-Orient russe, va reprendre le 22 février.

Elle encourt jusqu’à six ans de prison si elle est déclarée coupable d’accusations absurdes de « production et diffusion de matériaux pornographiques » pour avoir mis en ligne ses dessins, destinés à promouvoir une perception positive du corps féminin.

Artiste et metteuse en scène de théâtre habitant à Komsomolsk-sur-l’Amour, dans l’Extrême-Orient russe, Ioulia Tsvetkova a été arrêtée arbitrairement le 20 novembre 2019 et placée en résidence surveillée deux jours plus tard, après avoir été inculpée de « production et diffusion de matériaux pornographiques » (article 242(3b) du Code pénal russe). Ces accusations absurdes se fondent sur ses dessins du corps féminin, notamment des dessins des organes reproducteurs féminins présentant une image positive, qu’elle a publiés sur les réseaux sociaux dans le cadre de sa campagne d’émancipation des femmes.

Le jour de son arrestation, son appartement a été perquisitionné, ainsi que le club éducatif pour enfants où elle travaillait auparavant. La police a saisi ses appareils électroniques, des documents et des brochures sur les questions de genre. Ioulia Tsvetkova se souvient que durant la perquisition, les policiers ont déclaré qu’elle était « lesbienne, formatrice sexuelle et meneuse de propagande ».

Ioulia Tsvetkova est la cible d’une campagne ouvertement homophobe depuis mars 2019, lorsqu’elle a dû quitter son travail au sein de la jeune compagnie de théâtre amateur Merak, la police ayant ouvert une enquête pour « propagande en faveur de relations sexuelles non traditionnelles auprès des mineurs » liée à sa pièce Bleu et rose, qui dénonce le harcèlement et la discrimination. La compagnie de théâtre qu’elle avait fondée en 2018 a été contrainte de cesser ses activités.

Le 11 décembre 2019, Ioulia Tsvetkova a été déclarée coupable d’infraction à l’article 6.21 du Code des infractions administratives (« propagande en faveur de relations sexuelles non traditionnelles auprès des mineurs »), et condamnée à une amende de 50 000 roubles (environ 780 dollars) parce qu’elle gérait deux groupes en ligne sur des thèmes LGBTI, sur le réseau social russe bien connu VKontakte. Ces deux groupes étaient signalés « + de 18 ans », comme l’exige le droit russe, et l’amende qui lui a été infligée au titre de la loi homophobe contre la « propagande gay » n’a donc aucun fondement (cette « infraction » n’est caractérisée que si le support de « propagande » cible des personnes mineures).

Le 17 janvier 2020, Ioulia Tsvetkova a informé les médias qu’une nouvelle procédure administrative avait été ouverte à son encontre, au titre du même article, cette fois-ci pour avoir diffusé sur les réseaux sociaux son dessin intitulé « La famille est là où est l’amour. Soutenez les familles LGBT+ », qui représentait deux couples de même sexe avec des enfants. Elle avait publié ce dessin en soutien à un couple homosexuel qui avait dû fuir la Russie avec ses enfants adoptés, car les autorités menaçaient de les leur retirer. Le 10 juillet 2020, elle a été condamnée à une amende de 75 000 roubles (environ 1 050 dollars des États-Unis) pour cette « infraction ».

Au cours de l’année 2020, la procédure pénale contre Ioulia Tsvetkova a été renvoyée à cinq reprises entre l’enquêteur en charge du dossier et le procureur. Ce n’est qu’en janvier 2021 que le parquet de Komsomolsk-sur-l’Amour a validé le dossier. Le procès a débuté mais, en novembre 2021, a été reporté au mois de février 2022.

En septembre 2021, Ioulia Tsvetkova a fait appel avec succès de la décision des autorités de bloquer son groupe en ligne intitulé « Les monologues du vagin », où elle avait posté les dessins du corps féminin qui, par la suite, avaient servi de base à l’ouverture de la procédure pénale à son encontre pour « pornographie ».
Cependant, en février 2022, la décision relative aux « Monologues du vagin » a été réexaminée par une juridiction et le groupe a été de nouveau bloqué pour des motifs arbitraires, décision préjudiciable qui risque d’avoir des répercussions importantes et préoccupantes sur les poursuites pénales visant la militante.

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