Écrire Sixième décès sur l’ile de Manus : le gouvernement reste dans l’inaction

Le dernier décès survenu à l’hôpital de Lorengau, sur l’île de Manus, met en lumière les graves risques auxquels sont exposés les réfugiés en Papouasie-Nouvelle-Guinée en termes de soins de santé inadaptés et d’attaques violentes. La politique australienne de détention et de traitement des réfugiés hors des frontières sur l’île de Manus, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, est à l’origine des violences systématiques dont sont victimes des centaines de personnes.

Le corps d’un réfugié sri-lankais de 33 ans a été découvert aux premières heures du 2 octobre dans la blanchisserie de l’hôpital de Lorengau, sur l’île de Manus. Il y avait été admis le 29 septembre afin d’être soigné pour des blessures physiques, causées par des automutilations, et des troubles de santé mentale. La police a ouvert une enquête sur les circonstances de sa mort, mais a laissé entendre qu’il s’agissait d’un suicide. Le gouvernement australien aurait demandé à sa famille de verser 6 000 dollars américains (environ 5 000 euros) pour que son corps soit rapatrié au Sri Lanka. Il est la sixième personne dont la mort est liée à la délocalisation par l’Australie du traitement des demandes d’asile sur l’île de Manus depuis 2014.

Sa mort survient moins de deux mois après que le corps d’un demandeur d’asile iranien, Hamed Shamshiripour, a été retrouvé dans des buissons près du centre pour réfugiés de Lorengau. Malgré les demandes en faveur d’une enquête indépendante sur sa mort, rien n’a encore été fait et les résultats de l’autopsie n’ont pas été communiqués à sa famille.

Suite à l’annonce de la fermeture du centre pour réfugiés de Lombrum et du transfert de tous les réfugiés vers un autre centre à Lorengau d’ici au 31 octobre, plus de 700 réfugiés devraient être privés de services d’aide, y compris de soins médicaux vitaux. L’incertitude et l’anxiété quant aux projets envisagés sont d’autant plus vives que le gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée a annoncé le 25 août qu’il n’était pas d’accord avec la décision du gouvernement australien de supprimer et de fermer le centre de Lombrum.

S’ils sont réinstallés de force plus près de la ville, les réfugiés craignent encore davantage pour leur sécurité. Plus de 100 personnes résident actuellement dans une chambre d’hôtes à Port Moresby dans l’attente de soins médicaux. Dans certains cas, du fait des ressources limitées, les soins requis ne peuvent pas être prodigués en Papouasie-Nouvelle-Guinée.

En août 2012, l’Australie a mis en place un système de détention des réfugiés hors de ses frontières, dans le cadre duquel toute personne arrivant en bateau sur un territoire extérieur de l’Australie est placée en détention dans un centre de traitement à Nauru ou en Papouasie-Nouvelle-Guinée. À la mi-2013, le pays a adopté une nouvelle loi au titre de laquelle toute personne arrivant en bateau sur le territoire australien, y compris en Australie continentale, se voit interdire de demander l’asile dans le pays. Les autorités australiennes affirment que cette politique décourage les passeurs et protège les migrants qui, ainsi, n’entreprennent pas la périlleuse traversée pour atteindre le pays.

Le gouvernement n’a cependant pas publiquement reconnu que cette politique de détention et de traitement des réfugiés hors de ses frontières représente en réalité une mesure punitive et a pour conséquence de soumettre des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants à des violences systématiques sur l’île de Manus, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, et à Nauru.

Les demandeurs d’asile et réfugiés sont envoyés sur l’île de Manus dans le cadre d’un accord bilatéral entre l’Australie et la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Près de 800 réfugiés et demandeurs d’asile se trouvent actuellement en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Il y a deux centres sur l’île de Manus : un dans la ville de Lorengau, l’autre sur la base navale de Lombrum.

Le 26 avril 2016, la Cour suprême de Papouasie-Nouvelle-Guinée a statué qu’il était illégal de transférer et de placer des demandeurs d’asile en détention sur l’île de Manus et que cela bafouait le droit à la liberté individuelle garanti par la Constitution de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Le ministre australien de l’Immigration a alors annoncé que le centre pour réfugiés de l’île de Manus serait fermé, mais que les personnes qui y étaient détenues ne seraient pas conduites en Australie.

Le centre de transit de Lorengau aurait été construit pour accueillir entre 300 et 400 personnes. Or, près de 800 personnes se trouvent actuellement au centre de détention. Leur transfert au centre de transit entraînerait une surpopulation dangereuse. De plus, le centre de transit de Lorengau se situe plus près des habitants de l’île, dont certains ont attaqué des réfugiés et demandeurs d’asile. Les récentes violences ont exacerbé les inquiétudes des réfugiés quant à leur transfert forcé vers le centre de transit. Ils ont organisé des manifestations contre le transfert et lancé des appels à l’aide sur les réseaux sociaux. D’après les informations d’Amnesty International, afin de forcer les réfugiés à accepter le transfert, les autorités ont rendu les conditions au centre de détention plus difficiles et ont menacé les réfugiés de les arrêter s’ils ne se rendaient pas au centre de transit de Lorengau.

Cependant, les autorités n’ont pas confirmé ces informations. Le gouvernement australien est tout aussi responsable que le gouvernement papouan-néo-guinéen de la sécurité et du respect des droits des réfugiés et demandeurs d’asile. Le centre de détention est géré par le gouvernement australien.

Fin septembre 2017, environ 25 réfugiés ont été transférés aux États-Unis, où ils ont obtenu l’asile. Si cette nouvelle est positive pour les réfugiés concernés, elle ne doit pas détourner l’attention de la responsabilité qui incombe au gouvernement australien d’accueillir et de traiter de manière équitable les demandes d’asile des réfugiés arrivant sur son territoire. Des centaines de personnes se trouvent encore à Nauru et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, la majorité d’entre elles ont été reconnues en tant que réfugiés et attendent leur réinstallation.

Amnesty International demande que le centre de détention pour réfugiés sur l’île de Manus soit fermé et que tous les réfugiés et demandeurs d’asile soient mis en sécurité en Australie. Si la fermeture du centre de détention se traduit par le déplacement des réfugiés vers un camp de transit en Papouasie-Nouvelle-Guinée, leurs droits seront encore davantage menacés.

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a publiquement exprimé ses inquiétudes quant à la détérioration de la situation et a déclaré que « la fermeture du centre de l’île Manus ne doit avoir lieu qu’à la condition que les services vitaux continuent d’être assurés, conformément aux obligations actuelles de l’Australie envers les réfugiés et les demandeurs d’asile que le pays a transférés en Papouasie-Nouvelle-Guinée et à Nauru. »

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