Écrire des syndicalistes et des membres de l’opposition maintenus en détention

À la suite des arrestations de membres de l’opposition et de syndicalistes opérées à l’approche de l’élection du 11 octobre, 10 des 35 membres de l’opposition, au moins, arrêtés à Koundara, dans le nord de la Guinée, ont été remis en liberté sous caution. Les 25 autres, dont un adolescent, sont toujours détenus. Cinq syndicalistes, parmi lesquels Jean Dougou Guilavogui, continuent d’être détenus de façon arbitraire à Conakry, la capitale du pays. Leur procès a été ajourné et Jean Dougou Guilavogui n’a pas été autorisé à recevoir les soins médicaux dont il a besoin.

Jean Dougou Guilavogui, secrétaire général du Syndicat national des militaires retraités et veuves de Guinée et militaire à la retraite, a été arrêté à Conakry le 19 septembre, à l’approche de l’élection présidentielle du 11 octobre. Le 29 septembre, une information judiciaire a été ouverte à son encontre pour outrage au chef de l’État et à l’armée. Les syndicalistes Jean Bangoura, Sekou Kourouma, Souleymane Diallo et Sekou Kouyate ont été arrêtés début octobre pour leur participation à l’organisation d’une manifestation pacifique appelant à la libération de Jean Dougou Guilavogui.

Ils ont été inculpés d’outrage au chef de l’État et de diffamation.

Ces cinq hommes sont actuellement détenus à la Maison centrale de Conakry avec des prisonniers condamnés. Jean Dougou Guilavogui, qui souffre de problèmes cardiaques chroniques, ne reçoit pas les soins médicaux dont il a besoin. Leur procès, qui devait avoir lieu le 8 décembre, a été ajourné, mais aucune nouvelle date n’a été fixée. Ces hommes sont des prisonniers d’opinion : ils sont détenus uniquement pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression.

Le 20 septembre, au moins 35 militants de l’opposition ont été arrêtés à la suite d’affrontements violents avec des sympathisants du parti au pouvoir à Koundara, dans le nord du pays. Certains ont affirmé qu’ils n’avaient pas pris part aux violences et qu’ils étaient détenus arbitrairement. Dix d’entre eux ont depuis été remis en liberté, dont deux mineurs et un homme handicapé visuel qui ne peut pas se déplacer seul. Ils restent placés sous contrôle judiciaire. Les 25 autres membres de l’opposition sont toujours détenus. Parmi eux se trouve un adolescent de 17 ans détenu avec des adultes condamnés à des peines d’emprisonnement.

Au cours des 10 dernières années, au moins 360 personnes sont mortes au cours de mouvements de protestation dans le pays, dont 20 en 2015, et plus de 1 800 autres ont été blessées. Entre le 8 et le 10 octobre, des affrontements ont éclaté entre des membres de groupes politiques, armés de pierres et de machettes, ainsi qu’avec les forces de sécurité. Ces violences ont fait au moins six morts à Conakry et plus de 50 blessés, outre d’importants dommages matériels. Au moins une personne est morte dans des échauffourées similaires à Nzérékoré, dans la région de Guinée forestière, entre le 2 et le 3 octobre. L’élection présidentielle s’est tenue le 11 octobre dans un climat de tension. Le 12, tous les candidats, à l’exception du président en exercice Alpha Condé, ont déclaré que le scrutin était entaché de graves irrégularités et qu’ils n’acceptaient pas les résultats. Le président Alpha Condé a été réélu, et il a prêté serment le 14 décembre 2015. Le lendemain, des affrontements ont éclaté entre des manifestants et des policiers dans les quartiers de Bambeto et Hamdallaye. Des policiers blessés par des jets de pierres ont été emmenés dans des dispensaires.

Plusieurs jeunes hommes ont aussi été blessés, dont deux par balle.

Le 2 juin, l’Assemblée nationale a adopté un texte de loi sur le maintien de l’ordre public, qui définit quand et comment il est possible d’avoir recours à la force pour des opérations de maintien de l’ordre pendant des manifestations. Tout en se félicitant que des mesures aient été prises afin d’établir les missions et les responsabilités des forces de sécurité guinéennes, Amnesty International souligne que la nouvelle loi – qui doit encore être approuvée par le président – présente des lacunes importantes qui pourraient restreindre le droit de réunion pacifique. En effet, celle-ci n’autorise pas les rassemblements publics spontanés, tandis que les forces de sécurité sont toujours habilitées à disperser des groupes de manifestants pacifiques si elles soupçonnent ne serait-ce qu’une personne d’avoir une arme. Ces dispositions pourraient aussi servir à interdire ou à réprimer les manifestations pacifiques. Par ailleurs, l’Assemblée nationale a adopté un autre texte à la même séance. Celui-ci prévoit des peines allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et de lourdes amendes pour outrage, diffamation, offense ou publication de « fausses informations » visant le président ou d’autres représentants de l’État. Ces dispositions constituent une restriction totalement injustifiée de la liberté d’expression, qui pourrait servir à incriminer la dissidence ; le président ne doit pas approuver le texte.

Dans un rapport publié en septembre, Amnesty International a appelé les responsables politiques et les forces de sécurité à respecter pleinement le droit à la liberté de réunion pacifique et à veiller à ce qu’une force excessive ne soit pas utilisée contre les manifestants et les autres citoyens durant la période électorale et par la suite (voir le document intitulé Guinée. Empêcher le recours excessif à la force et respecter le droit à la liberté de réunion pacifique avant et après les élections de 2015 – Appel à l’action, à l’adresse https://www.amnesty.org/fr/documents/afr29/2160/2015/fr/).

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