Écrire Le tribunal refuse de libérer Belén

Belén est toujours incarcérée dans la province de Tucuman, dans le nord de l’Argentine, après avoir fait une fausse couche dans un hôpital public. Le 12mai, sa libération a été refusée. Des membres du personnel médical et des policiers ont bafoué son droit à la vie privée et l’ont injustement accusée et maltraitée.

Le 21 mars 2014, Belén, souffrant de douleurs abdominales, s’est rendue à l’hôpital public d’Avellaneda à San Miguel de Tucuman. Le médecin l’a informée qu’elle était en train de faire une fausse couche. Belén a déclaré ignorer qu’elle était enceinte. Le personnel hospitalier a plus tard découvert un fœtus dans la salle de bains et a dénoncé Belén à la police, affirmant qu’il s’agissait de son « fils », sans analyse ADN ni aucune preuve de son lien de parenté avec le fœtus. À son réveil dans son lit d’hôpital après l’intervention chirurgicale, elle était encerclée par plusieurs policiers et a subi un examen « sur des parties intimes de son corps », qui pourrait constituer un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Aux termes du droit international et des normes internationales, le fait de dévoiler des informations médicales personnelles sans l’accord du patient, y compris à des représentants de la loi, constitue une violation du droit à la vie privée.

Accusée d’avoir elle-même provoqué l’avortement, Belén est maintenue en détention provisoire depuis plus de deux ans pour des accusations d’avortement. Le procureur a ensuite modifié l’inculpation en meurtre avec circonstances aggravantes, infraction passible d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à 25 ans. Le 19 avril 2016, la troisième chambre de la Cour pénale de Tucuman a condamné Belén à huit ans de prison pour meurtre. Le 12 mai, les avocats de Belén ont fait appel de cette décision et ont demandé sa libération immédiate. Cependant, le tribunal a refusé sa libération, au motif qu’elle risquait de s’enfuir. Le tribunal a affirmé que les avocats de Belén n’avaient pas prouvé sa vulnérabilité et son insuffisance supposée de moyens pour quitter la province. Belén est toujours en détention préventive, car sa condamnation n’a pas encore été signée. La détention préventive est une exception à la règle générale qui définit la liberté comme principe, tout comme la présomption d’innocence, et impose la charge de la preuve à l’État, qui doit justifier sa détention prolongée pendant ce processus.

Au titre du droit international relatif aux droits humains, la détention est une exception à la règle générale qui définit la liberté comme principe. La détention préventive est la mesure la plus sévère applicable à une personne accusée d’une infraction. C’est pourquoi son application doit être de nature exceptionnelle, puisqu’elle est limitée par les principes de légalité, de présomption d’innocence, de nécessité et de proportionnalité, tous indispensables dans une société démocratique. La prolongation arbitraire de la détention préventive fait de cette détention un châtiment lorsqu’elle est appliquée sans que la responsabilité pénale de la personne concernée n’ait été prouvée. Le principe de présomption d’innocence est l’un des fondements des garanties judiciaires. La présomption d’innocence impose la charge de la preuve à l’accusation et permet de garantir que la culpabilité d’une personne ne soit pas présumée, à moins qu’il n’existe des éléments clairs prouvant la responsabilité pénale de cette personne, au-delà de tout doute raisonnable. Lorsque ce dernier élément est insuffisant, la personne doit être acquittée.

L’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et l’article 11 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme, auxquels l’Argentine est partie, protègent le droit à la vie privée et imposent aux États de veiller à la mise en place de garanties adéquates pour protéger la confidentialité des informations médicales, particulièrement dans le cadre d’institutions de santé. Chaque femme ou jeune fille qui sollicite un avortement dans un centre médical ou fait une fausse couche ou accouche d’un enfant mort-né est protégée au titre de la confidentialité médecin-patient.

En Argentine, la personne qui pratique un avortement encourt une peine allant d’un à quatre ans de prison. La loi autorise l’avortement lorsque la santé ou la vie de la femme enceinte est en danger ou lorsque la grossesse résulte d’un viol. Les fausses couches ou autres complications liées à la grossesse ne sont pas érigées en infractions.

Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et d’autres organismes internationaux de défense des droits humains ont demandé aux États de dépénaliser l’avortement en toutes circonstances et de garantir l’accès à un avortement sûr et légal en droit et en pratique, au minimum lorsque la grossesse met en danger la vie ou la santé de la femme ou de la jeune fille, lorsque le fœtus présente une grave malformation ou n’est pas viable, ou lorsque la grossesse résulte d’un viol ou d’un inceste.

Quel que soit le statut de l’avortement, les États sont tenus de garantir l’accès à des services de santé de qualité et confidentiels pour le traitement des complications résultant d’avortements dangereux ou de fausses couches. Ce traitement doit être exempt de discrimination, de contrainte et de violence.

Les femmes et les jeunes filles qui sollicitent des soins en matière de santé sexuelle et reproductive dans des centres professionnels sont souvent exposées à des mauvais traitements, notamment à des pratiques qui infligent de fortes douleurs, ou à des procédures et examens non désirés et forcés qui peuvent constituer une torture ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant. Le refus de prodiguer certains services ou les mauvais traitements dans le cadre des soins en matière de santé sexuelle et reproductive - bien souvent fondés sur des stéréotypes liés au genre - sont discriminatoires et constituent une forme de violence à l’égard des femmes.

Les droits sexuels et reproductifs sont garantis par divers traités internationaux et régionaux relatifs aux droits humains, qui protègent le droit de chacun-e de prendre des décisions éclairées en matière de sexualité et de procréation et d’appliquer ces décisions, sans subir ni discrimination, ni contrainte, ni violence. Ces droits incluent notamment le droit à la santé, à l’intégrité personnelle, à l’autonomie et à l’égalité.

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