Écrire On ne sait pas où se trouvent des centaines de personnes arrêtées

Au moins 140 membres de partis de l’opposition, défenseurs des droits humains, étudiants et défenseurs des droits des femmes ont été arrêtés et placés en détention par le Service national de la sûreté et du renseignement soudanais (NISS) entre le 6 janvier et le 10 février. Tout ceci est lié à des manifestations sporadiques qui ont lieu au Soudan pour protester contre l’augmentation des prix de la nourriture et des médicaments. On ignore où ces personnes se trouvent.

Les défenseurs des droits humains des femmes Amel Habani, journaliste et lauréate du Prix Ginetta Sagan 2015, Nahid Jabrallah, directrice du Centre de Sima pour la formation et la protection des droits des femmes et des enfants, Egbal Mohamed Ali et Hanan Hassan Hussein, membres du Parti du Congrès soudanais, et Sarah Nugdallah, secrétaire générale du parti politique Oumma, ont été arrêtés et placés en détention arbitrairement les 16 et 17 janvier.

Les 7 et 8 janvier, trois dirigeants du Parti du Congrès soudanais ont également été arrêtés et placés en détention arbitrairement, notamment Omer Yousef El Digair, le directeur, et Almahi Suliman, le directeur du Parti du Congrès soudanais dans l’État de Sannar. D’autres dirigeants de partis de l’opposition ont été arrêtés entre le 16 janvier et le 1er février, entre autres Mohamed Mukhtar al Khatib, secrétaire politique du Parti communiste soudanais ; Mohamed Abdalla Aldoma, directeur adjoint du parti politique Oumma ; Mohamed Farouk Salman, membre de premier plan de l’Alliance des Forces du Soudan ; et deux membres du comité central du Parti communiste soudanais, Mohieldeen Eljalad et Sidgi Kaballo.

Trois défenseurs des droits humains ont également été arrêtés ; Amjed Farid, également médecin, le 18 janvier, Omer Ushari le 16 janvier et Salih Mahmoud Osman, également vice-directeur du barreau du Darfour et lauréat de beaucoup de prix des droits humains, le 1er février.

Ils font partie d’au moins 140 membres de partis de l’opposition, défenseurs des droits humains, étudiants et militants des droits des femmes arrêtés par le NISS pour des raisons liées à des manifestations sporadiques organisées par des militants de l’opposition pour protester contre l’augmentation du prix de la nourriture et des médicaments depuis le début du mois de janvier. Les autorités n’ont pas révélé le lieu où ils se trouvent malgré plusieurs demandes de leurs proches.

Salih Mahmoud Osman, défenseur des droits humains et vice-président du barreau du Darfour, a été lauréat de beaucoup de prix des droits humains, notamment le Prix Sakharov annuel décerné par le Parlement européen.
À la fin de l’année 2017, le gouvernement soudanais a approuvé un nouveau budget national pour 2018, qui inclut plus de mesures d’austérité économiques et de réductions des dépenses destinées à la santé et à l’éducation, tout en augmentant les dépenses destinées au secteur de la sécurité. Ces nouvelles mesures économiques ont entraîné une hausse importante des prix de la nourriture et des médicaments.

Le prix d’une miche de pain est passé de 50 centimes à 1 livre soudanaise, l’équivalent de 0,055 dollars américains (taux officiel). Cette augmentation du coût de la vie a été à l’origine de nombreuses manifestations publiques dans plusieurs villes. Depuis le début des manifestations début janvier, plus de 319 personnes ont été arrêtées au Soudan. Au moins 140 d’entre elles se trouvent toujours en détention, dans un lieu inconnu.

Depuis l’annonce du nouveau budget pour 2018, la valeur de la livre soudanaise a continué à baisser. Le taux de change du dollar américain est monté de 24 à 34 livres soudanaises sur le marché parallèle depuis le début du mois de février 2018.

Le Service national de la sûreté et du renseignement détient toujours des pouvoirs étendus en matière d’arrestation et de détention en vertu de la Loi de 2010 relative à la sécurité nationale, qui lui permet de maintenir des suspects en détention jusqu’à quatre mois et demi sans contrôle judiciaire, et ses membres usent de leur autorité pour procéder à des arrestations arbitraires et placer en détention des personnes, dont beaucoup se voient infliger des actes de torture ou d’autres mauvais traitements.

La même loi les protège de toute poursuite pour les actes commis dans l’exercice de leurs fonctions, d’où une culture généralisée de l’impunité. La modification en date du 5 janvier 2015 de l’article 151 de la Constitution a étendu le mandat du NISS, ce qui n’a fait qu’aggraver la situation. Cette modification a transformé le NISS : autrefois service de renseignement spécialisé dans la collecte et l’analyse d’informations et le conseil, il est devenu une agence de sécurité à part entière, dotée d’un vaste mandat lui permettant d’exercer toute une palette de fonctions qui sont habituellement celles de l’armée ou des organes chargés du maintien de l’ordre public.

Le nouveau texte a accordé au NISS un pouvoir discrétionnaire illimité pour déterminer ce qui constitue une menace politique, économique ou sociale et comment y faire face. Ni la Loi relative à la sécurité nationale ni l’article 151 tel que modifié n’exigent, explicitement ou implicitement, que les agents du NISS respectent le droit international, régional et national applicable dans l’exercice de leurs fonctions.

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