Écrire La Turquie ordonne la fermeture définitive de centaines d’ONG

375 associations et organisations non gouvernementales (ONG) déclarées officiellement ont été fermées définitivement et leurs avoirs ont été saisis, en vertu du décret exécutif n° 677 adopté le 22 novembre. Des ONG dont les activités avaient été suspendues le 11 novembre font partie de celles qui figurent sur la liste des organisations fermées. Ces fermetures sont injustifiables, même au titre de l’état d’urgence.

Mardi 22 novembre, 375 associations et ONG enregistrées ont dû fermer de manière définitive après l’adoption du décret exécutif n° 677. L’article 3 du décret exécutif indique : « Les associations figurant sur la liste qui sont liées à des organisations terroristes ou dont le Conseil national de sécurité a déterminé qu’elles appartiennent, adhèrent ou sont liées à des structures, des formations ou des groupes agissant contre la sécurité nationale, sont fermées. Les actifs financiers des associations sont considérés comme transférés au Trésor, gratuitement, y compris les actes de propriété correspondant à d’éventuels locaux, sans aucune restriction. » Le décret comporte une liste complète des ONG faisant l’objet d’une fermeture permanente, sur laquelle figurent des dizaines d’organisations nationales et locales de défense des droits humains et des droits des femmes, des associations culturelles locales, des associations d’aide aux personnes vivant dans la pauvreté, des associations étudiantes, des associations patronales et même des clubs de sport.

Le décret vise de nombreuses associations dont les activités ont précédemment été suspendues par le ministère de l’Intérieur le 11 novembre, y compris l’Association des avocats progressistes (ÇHD), l’Association des avocats pour la liberté (ÖHD), dont les membres ont représenté des victimes de torture et d’autres formes de mauvais traitements, l’Association des avocats de Mésopotamie (MHD), qui représentait des populations concernées par les couvre-feux dans le sud-est du pays, ainsi que l’Association de femmes Van (VAKAD), qui fournit des services aux femmes fuyant la violence familiale, et l’une des principales associations turques de défense de l’enfance, Les enfants au programme (Gündem Çocuk). Une autre organisation prise pour cible est l’association Sarmaşık, qui fournit une aide alimentaire et dispense des cours à 32 000 personnes à Diyarbakır (sud-est de la Turquie), y compris des personnes déplacées de force par l’État. Ces suspensions et maintenant les fermetures ont été annoncées sans que la raison de chacune d’elles ne soit précisée, et ne sont pas susceptibles de recours.

Ces suspensions et fermetures de grande ampleur sont disproportionnées et ne sauraient se justifier, même au titre de l’état d’urgence, et constituent une violation des droits aux libertés d’expression et d’association, garantis par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel la Turquie est partie.

Le décret exécutif n° 677, publié au Journal officiel le 22 novembre, comprend la liste complète des ONG et associations fermées, situées dans 62 départements et villes à travers le pays. Ce décret prononce par ailleurs la réouverture de 175 des 1 125 associations et ONG fermées en vertu du décret exécutif n° 667, le premier à avoir été adopté sous l’état d’urgence.

La Turquie est tenue de garantir le droit à la liberté d’expression, qui englobe le droit de chercher, de recevoir et de diffuser des informations et des idées de toutes sortes, en vertu de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), et de faire respecter le droit à la liberté d’association aux termes de l’article 22 du PIDCP et de l’article 11 de la CEDH. Les seules restrictions à l’exercice de ces droits qui soient prévues par ces textes sont celles dont il est possible de prouver qu’elles sont nécessaires pour la protection de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé ou de la moralité publiques, ou des droits et libertés d’autrui, et qui sont proportionnées au but recherché ; elles doivent en outre interdire toute propagande en faveur de la guerre et les appels à la haine constituant une incitation contre des personnes.

Bien qu’il soit possible de déroger aux droits aux libertés d’expression et d’association dans des circonstances exceptionnelles et de manière temporaire, le Comité des droits de l’homme a statué que toutes les mesures dérogatoires prises au titre de l’état d’urgence devaient s’inscrire strictement dans les limites imposées par la situation. L’impératif consistant à limiter toutes les dérogations à ce qui est strictement requis par les exigences de la situation reflète un principe de proportionnalité, qui est commun aux pouvoirs de dérogation et de restriction. En outre, les mesures spécifiques prises conformément à la dérogation doivent aussi être manifestement nécessaires compte tenu de la situation.

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