Écrire Un défenseur des droits humains disparu risque la torture

Nguyễn Bắc Truyển, ancien prisonnier d’opinion, a été vu pour la dernière fois le 30 juillet 2017 après avoir déposé sa femme devant son lieu de travail à Ho Chi Minh-Ville, au Viêt-Nam. Bien que les médias d’État aient rapporté qu’il avait été arrêté par les autorités, plus de trois semaines plus tard, sa femme n’a reçu aucune confirmation officielle de la police quant aux accusations portées contre lui ou à son lieu de détention. Il risque d’être victime de torture ou de mauvais traitements et souffre de problèmes de santé préexistants nécessitant un traitement.

On ne sait pas où se trouve Nguyễn Bắc Truyển depuis sa disparition forcée le 30 juillet 2017. D’après les médias d’État, il a été arrêté pour « activités visant à renverser le gouvernement populaire », au titre de l’article 79 du Code pénal de 1999. Cette infraction, qui relève de la section « sécurité nationale » du Code pénal, au libellé vague, est passible de sanctions pouvant aller jusqu’à la peine capitale, en passant par la réclusion à perpétuité.

Le même jour que celui de la disparition forcée de Nguyễn Bắc Truyển, trois autres militants ont été arrêtés officiellement en la présence d’un ou plusieurs membres de leurs familles. Les familles de ces militants ont depuis été informées, que ce soit verbalement ou par écrit, que ces hommes sont détenus dans la prison B14 de Hanoï. Alors qu’ils ont exigé des informations de la part de la police, les proches de Nguyễn Bắc Truyển n’ont reçu aucune confirmation similaire quant au lieu où il se trouve et craignent pour sa sécurité. Nguyễn Bắc Truyển souffre de problèmes au cœur et aux intestins, qui pourraient s’aggraver s’il n’a pas accès aux médicaments dont il a besoin.

Nguyễn Bắc Truyển, ancien prisonnier d’opinion, est un adepte du bouddhisme Hòa Hảo, une tradition religieuse minoritaire que l’on trouve principalement dans le sud du Viêt-Nam. Il a été arrêté en 2006 et emprisonné pendant trois ans et demi après avoir été reconnu coupable de « propagande » contre l’État pour avoir dispensé des conseils juridiques à des victimes de saisies de terres. Le 24 février 2014, Nguyễn Bắc Truyển et sa femme ont été sortis d’un taxi à Hanoï par des hommes en civil et roués de coups alors qu’ils se rendaient à l’ambassade d’Australie pour parler du harcèlement que leur a fait subir la police dans la province de Đồng Tháp avant leur mariage. Sa femme a rappelé quatre autres incidents spécifiques en 2015 et 2016, où l’un ou l’autre, ou les deux, ont été frappés ou attaqués par des hommes en civil.

Avant son arrestation, Nguyễn Bắc Truyển travaillait pour une église chrétienne à Ho Chi Minh-Ville. Il participait à un programme de bienfaisance en soutien aux anciens combattants. Il a surveillé et rapporté le harcèlement des minorités religieuses au Viêt-Nam et, en 2014, il a rencontré le rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme de l’ONU sur la liberté de religion ou de conviction lors de sa venue au Viêt-Nam. Il a également dispensé des conseils juridiques à des victimes de saisies de terres et de harcèlement policier, et a aidé à faciliter le soutien charitable des familles de prisonniers d’opinion.

Les trois autres militants arrêtés le même jour que Nguyễn Bắc Truyển sont Phạm Văn Trội, 45 ans, de Hanoï ; Trương Minh Đức, 57 ans, de Ho Chi Minh-Ville ; et Nguyễn Trung Tôn, 45 ans, de la province de Thanh Hoa. Chacun d’entre eux avait déjà été emprisonné pour ses activités pacifiques (voir https://www.amnesty.org/fr/documents/asa41/6855/2017/fr/). Une cinquième personne, Nguyen Trung Truc, a été arrêté le 4 août 2017. Selon les médias d’État, les cinq hommes auraient tous un lien avec l’avocat des droits humains Nguyễn Văn Đài, qui a lui-même été arrêté à Hanoï le 16 décembre 2015 et qui, avec son collègue Le Thu Ha, est également accusé d’avoir commis une infraction au titre de l’article 79 du Code pénal (voir ASA 41/3098/2015).

Bien que le bouddhisme Hòa Hảo soit une religion officiellement reconnue au Viêt-Nam, il existe une tension historique entre ses membres et le parti communiste vietnamien. Les personnes et les familles qui ont choisi de pratiquer cette religion indépendamment des autorités religieuses approuvées par l’État sont souvent harcelées par les autorités.

Nguyễn Bắc Truyển est un ancien prisonnier d’opinion. Il a été arrêté en novembre 2006 et emprisonné pendant trois ans et demi après avoir été reconnu coupable de « propagande » contre l’État. D’après sa femme, Bui Thi Kim Phuong, il a été accusé d’avoir donné des informations incorrectes à des victimes de saisies de terre, les tournant ainsi contre le gouvernement.

Nguyễn Bắc Truyển a été libéré de prison en mai 2010 mais a de nouveau été placé en détention pour une courte période le 9 février 2014, lorsque des policiers ont fait irruption chez Bui Thi Kim Phuong, sa fiancée à l’époque, dans la province de Đồng Tháp, plusieurs jours avant leur mariage. Il a été accusé d’avoir volé de l’argent et des biens, mais a été libéré au bout de vingt-quatre heures. Les accusations et l’enquête ont par la suite été abandonnées en raison d’un manque de preuves. Cependant, des policiers en uniforme et en civil ont continué de menacer et de harceler le couple et leur famille pendant le reste du mois, notamment en les suivant et en jetant des déchets sur leur maison. Ils leur auraient également coupé l’eau.

Le Viêt-Nam est actuellement le théâtre d’une campagne prolongée de répression contre les droits humains, en raison de laquelle au moins quinze militants et personnes critiquant le gouvernement ont été arrêtés arbitrairement depuis janvier 2017. Des prisonniers d’opinion sont systématiquement détenus pendant de longues périodes de détentions provisoires au secret. La détention au secret peut faciliter la pratique de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Lorsqu’elle est prolongée, elle s’apparente en elle-même à une forme de torture ou de traitement cruel, inhumain et dégradant.

De plus, le droit de communiquer avec un avocat et de préparer sa défense dans les meilleurs délais, qui fait partie intégrante du droit à un procès équitable, est bafoué. La prohibition de la torture et des autres formes de mauvais traitements, de même que le droit à un procès équitable, sont consacrés par des traités que le Viêt-Nam, étant partie à ces instruments, est légalement tenu de respecter, notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [ONU].

Au Viêt-Nam, les conditions de détention sont très dures ; la nourriture et les soins médicaux sont insuffisants et ne respectent pas les obligations minimales prévues par l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus (règles Mandela) et par d’autres normes internationales. Les prisonniers d’opinion sont détenus à l’isolement à titre punitif, parfois pendant de longues périodes. Pour plus d’informations, voir le rapport d’Amnesty International intitulé Des prisons à l’intérieur des prisons : la torture et les mauvais traitements des prisonniers d’opinion au Viêt-Nam (https://www.amnesty.org/fr/documents/asa41/4187/2016/fr/) publié en juillet 2016.

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