Écrire Un jeune homme arrêté à l’âge de 15 ans à nouveau condamné à mort

Salar Shadizadi a été condamné à la peine capitale une nouvelle fois en novembre, à l’issue d’un nouveau procès en Iran. Il est détenu dans le quartier des condamnés à mort depuis 2007, pour un crime commis quand il avait 15 ans. Il avait obtenu un nouveau procès à la suite de la suspension de son exécution grâce aux pressions de l’opinion publique, en décembre 2015.

Salar Shadizadi, 25 ans, a été condamné à mort une seconde fois en novembre pour avoir poignardé mortellement un ami quand il était âgé de 15 ans. Il avait obtenu un nouveau procès au début de l’année 2016, les autorités ayant suspendu son exécution en raison d’un mouvement mondial de protestation en décembre 2015. Son cas avait ensuite été renvoyé devant un tribunal pénal pour mineurs de la province du Gilan, en application des nouvelles dispositions relatives aux peines pour mineurs figurant dans le Code pénal islamique iranien de 2013. En vertu de ces dispositions, les juges peuvent remplacer la peine de mort par un autre châtiment s’ils estiment qu’un mineur délinquant n’avait pas conscience de la nature de son crime ou de ses conséquences, ou s’il existe des doutes quant à sa « maturité psychologique » au moment des faits.

Toutefois, le tribunal pénal a de nouveau condamné Salar Shadizadi à la peine capitale, après avoir conclu qu’il était « psychologiquement mûr » au moment du crime. Selon des informations communiquées à Amnesty International, le tribunal, pour justifier cette conclusion, a invoqué le fait que Salar Shadizadi avait enterré le cadavre dans le jardin de sa famille pour dissimuler les faits. Le jeune homme a maintenant formé un recours contre sa condamnation à mort auprès de la Cour suprême.

Salar Shadizadi a été arrêté en février 2007, à l’âge de 15 ans, et a été condamné à mort en décembre 2007, après que la 11e chambre du tribunal pénal de la province du Gilan l’a reconnu coupable de meurtre. La Cour suprême a confirmé sa condamnation en mars 2008. Depuis lors, à au moins trois reprises, Salar Shadizadi a connu la souffrance morale qu’occasionne un transfert à l’isolement en vue d’une exécution, suivi, quelques jours voire quelques heures avant la date fixée, d’un report de l’exécution. La dernière fois que cela s’est produit, en décembre 2015, le procureur général de la province du Gilan a confirmé moins de deux jours avant la date prévue pour l’exécution du jeune homme que celle-ci était reportée. Au cours des jours qui ont précédé cette décision, Amnesty International avait lancé une campagne mondiale de mobilisation pour appeler à la suspension de l’exécution de Salar Shadizadi.

Salar Shadizadi a été arrêté en février 2007 après la découverte, dans un jardin qui appartenait à sa famille, du cadavre d’un de ses amis. Dans une lettre rédigée en prison en novembre 2015, il a révélé dans quelles circonstances il avait provoqué « accidentellement » la mort « tragique » de son ami d’enfance, en poignardant dans l’obscurité un objet en mouvement qui l’avait effrayé. Il a dit que l’objet était recouvert de tissu vert, et qu’il ne s’était rendu compte qu’il s’agissait de son ami qu’après l’avoir poignardé.

Tout avait commencé par un « jeu idiot » : son ami l’avait mis au défi de sortir de nuit dans le jardin familial, en sachant que Salar Shadizadi avait peur du noir et que sa grand-mère le mettait en garde depuis l’enfance contre les « mauvais esprits » (jen) qui hantaient les lieux. Dans cette lettre, Salar Shadizadi a aussi écrit que l’atmosphère du poste de police où il avait été détenu, sans aucun contact avec sa famille ou un avocat, était si intimidante et coercitive qu’il n’avait pas osé raconter ce qui s’était réellement passé. Il avait eu l’intention de rétablir la vérité pendant son procès mais y avait renoncé car son avocat l’avait convaincu de se taire.
En juillet 2013, les autorités avaient programmé l’exécution de Salar Shadizadi puis l’avaient suspendue au dernier moment. En effet, il avait écrit depuis sa prison une lettre dans laquelle il sollicitait une commutation de sa condamnation en une peine de prison en vertu de l’article 91 du Code pénal islamique révisé, adopté en mai 2013.

Au titre de cet article, les juges peuvent remplacer la peine de mort par un autre châtiment s’ils estiment qu’un mineur délinquant n’avait pas conscience de la nature de son crime ou de ses conséquences, ou s’il existe des doutes quant à sa « maturité psychologique » au moment des faits. À l’époque, les tribunaux iraniens ne savaient pas comment l’article 91 du Code pénal islamique révisé de 2013 devait s’appliquer au cas des mineurs délinquants condamnés à mort avant l’adoption de ce texte. En conséquence, le dossier de Salar Shadizadi avait fait plusieurs allers-retours entre le tribunal pénal de la province du Gilan et la Cour suprême.

Dans un premier temps, le tribunal pénal de la province du Gilan avait adressé Salar Shadizadi à l’Organisation iranienne de médecine légale, un institut médico-légal public, afin qu’elle détermine s’il avait atteint le stade de la « maturité psychologique » à l’époque du crime. Celle-ci avait estimé « qu’aucun élément ne permettait de conclure à une altération du discernement au moment du crime, mais qu’il était impossible d’évaluer le développement mental du jeune homme sept ans après les faits ». Face à ces conclusions, et ne sachant quelle ligne de conduite adopter, le tribunal pénal de la province du Gilan avait saisi la Cour suprême afin qu’elle tranche la question de la commutation.

En novembre 2014, la 13e chambre de la Cour suprême avait statué que toute requête en commutation devait être formée devant la juridiction ayant prononcé la condamnation à mort. Cependant, un mois plus tard, en décembre 2014, le Conseil général de la Cour suprême iranienne avait rendu un « arrêt pilote » (ra’ye vahdat-e ravieh) dans une autre affaire, concluant que toute personne dans l’attente d’une exécution pour des infractions commises alors qu’elle avait moins de 18 ans pouvait solliciter un nouveau procès en vertu du Code pénal islamique révisé de 2013.

À la suite de cet arrêt, la demande que Salar Shadizadi avait déposée afin de bénéficier des dispositions de l’article 91 avait de nouveau été soumise à la Cour suprême. Cette fois-ci, cependant, la Cour suprême avait rejeté sa requête en se fondant sur l’avis rendu en 2013 par l’Organisation iranienne de médecine légale, qui avait conclu à l’absence d’altération du discernement au moment du crime.

Dans son arrêt de 2015, la Cour avait déclaré : « Les personnes ayant atteint l’âge de la puberté [15 années lunaires pour les garçons, neuf pour les filles] sont présumées totalement mûres d’un point de vue psychologique [...] Le contraire doit être prouvé, ce qui n’est pas le cas ici. » L’exécution de Salar Shadizadi avait ensuite été prévue pour le 1er août 2015. Elle avait cependant été reportée à la suite du tollé international suscité par l’affaire, et il avait été transféré dans l’unité générale de la prison Lakan de Rasht, après avoir passé 41 jours à l’isolement. Les autorités avaient ensuite fixé l’exécution au 28 novembre 2015.

Toutefois, moins de deux jours avant la date prévue, elles l’avaient différée à nouveau, en raison des pressions exercées par l’opinion publique. Salar Shadizadi avait alors désigné un conseil, qui avait soumis une nouvelle requête afin d’obtenir que son client soit rejugé. La Cour suprême avait donné une suite favorable à cette requête au début de l’année 2016 et avait renvoyé l’affaire devant un tribunal pénal, différemment constitué, de la province du Gilan, en vue d’un nouveau procès.

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