Écrire Un militant de l’opposition placé dans une prison de sécurité maximale

Après avoir interrompu une grève de la faim qui a duré 39 jours, d’après les informations disponibles, le militant cubain d’opposition Jorge Cervantes, qui a semble-t-il été arrêté en mai pour outrage, a été transféré dans une prison de sécurité maximale. Cet homme est un prisonnier d’opinion et il doit donc être libéré immédiatement et sans condition.

Jorge Cervantes García, qui est membre du parti politique d’opposition Unión Patriótica de Cuba (UNPACU), a été arrêté le 23 mai à Las Tunas, dans le centre-est de Cuba. Plusieurs semaines plus tôt, l’UNPACU avait publié sur sa chaîne YouTube une vidéo intitulée « L’horreur en prison » dans laquelle Jorge Cervantes interviewait un homme qui disait avoir été maltraité dans une prison cubaine, et une série de courtes vidéos dénonçant la corruption chez les fonctionnaires à Cuba. Selon Gretchen Alfonso Torres, son épouse, le 22 mai elle et Jorge Cervantes ont déposé une plainte auprès du procureur militaire (fiscalía militar), signalant que des membres des services de sécurité avaient fouillé leur domicile et pris des biens leur appartenant. Le lendemain, les autorités cubaines ont arrêté Jorge Cervantes.

Les proches de Jorge Cervantes n’ont reçu aucun document officiel exposant les charges retenues contre lui, mais ils ont été informés oralement du fait qu’il est accusé d’outrage (desacato) et de résistance (resistencia). Ces deux infractions prévues par le Code pénal sont souvent utilisées pour poursuivre en justice des défenseurs des droits humains et des militants politiques dans le but d’étouffer la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association à Cuba. Selon ses proches, Jorge Cervantes a tout d’abord été détenu dans un poste de police puis emmené à la prison de Potosi, au nord de Las Tunas. Ils disent que comme il a refusé de porter l’uniforme de la prison, il a été placé à l’isolement pendant au moins 20 jours sans ses vêtements, jusqu’à son transfert à l’hôpital, où il a été maintenu en détention.

Amnesty International a reçu des informations signalant que le 1er juillet, Jorge Cervantes a mis fin à une grève de la faim qu’il a menée pendant 39 jours. Le 3 juillet, des médecins informé son épouse du fait qu’il avait été transféré à la prison de Combinado del Este, une prison de sécurité maximale située à la périphérie de La Havane, à plus de 600 kilomètres de sa famille, qui vit à Las Tunas. Les autorités ont dit à sa famille qu’il y avait été transféré en raison d’une insuffisance rénale, et qu’il allait être mieux soigné à la prison de Combinado del Este. Les médecins ont oralement tenu sa famille informée de son état de santé, mais ses proches disent qu’ils n’ont jamais reçu de documents médicaux officiels.

Les dispositions du Code pénal cubain relatives, entre autres, à l’outrage envers un fonctionnaire (desacato), à la résistance à des représentants de l’État dans l’exercice de leurs fonctions (resistencia) et aux troubles à l’ordre public (desórdenes públicos) sont souvent utilisées pour réprimer les libertés d’expression, de réunion pacifique et d’association à Cuba.

L’article 144 du Code pénal cubain définit l’outrage (desacato) : il érige en infraction le manque de respect, sous toutes ses formes, à l’égard des fonctionnaires et prévoit des peines d’emprisonnement plus longues lorsque les victimes sont des membres du gouvernement ou de hauts représentants de l’État.

L’article 144 dispose : « 1. Toute personne qui menace, calomnie, diffame, insulte, injurie ou qui outrage ou offense de quelque façon que ce soit, en parole ou par écrit, la dignité ou l’honneur d’une autorité, d’un représentant de l’État, ou de ses agents ou auxiliaires, dans l’exercice de leurs fonctions ou à l’occasion ou en conséquence de ces dernières, encourt une peine de privation de liberté de trois mois à un an ou une amende [...] ou les deux. 2.

Si le fait défini dans le paragraphe précédent vise le président du Conseil d’État, le président de l’Assemblée nationale du pouvoir populaire, les membres du Conseil d’État ou du Conseil des ministres ou les députés de l’Assemblée nationale du pouvoir populaire, la peine est une privation de liberté d’un à trois ans. »

Amnesty International estime que les représentants de l’État devraient davantage tolérer les critiques que les personnes privées. Le recours à des lois sur la diffamation ayant pour but ou pour effet d’empêcher les critiques légitimes à l’égard de représentants du gouvernement ou de l’État viole le droit à la liberté d’expression. Amnesty International s’oppose aux lois qui interdisent les insultes ou le manque de respect à l’égard des chefs de l’État ou des personnalités publiques, de l’armée ou d’autres institutions ou de drapeaux ou d’autres symboles (telles que les lois sur la lèse-majesté et l’outrage). Amnesty International s’oppose également à toute loi qui rend passible de sanctions pénales la diffamation de personnalités publiques ou de particuliers, car elle estime que la diffamation doit être traitée uniquement au civil. Les représentants de l’État ne devraient recevoir aucune aide ou assistance de l’État quand ils engagent des poursuites au civil pour diffamation.

Le placement à l’isolement consiste à mettre un prisonnier ou un détenu à l’écart des autres personnes incarcérées. En fonction de la durée et des autres conditions dans lesquelles s’effectue la détention à l’isolement, et des stimulations sensorielles réduites qui peuvent résulter de la détention à l’isolement, cette pratique peut constituer un traitement cruel, inhumain ou dégradant. L’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus [ONU], dites Règles Mandela, interdit la détention à l’isolement pendant une période de plus de 15 jours consécutifs.

La Commission cubaine des droits humains et de la réconciliation nationale, une ONG de défense des droits humains basée à Cuba qui n’est pas reconnue par les autorités, a recensé en moyenne 827 placements en détention pour motifs politiques par mois en 2016, et 380 en juin 2017.

Tout comme presque tous les observateurs internationaux indépendants des droits humains, Amnesty International n’est pas autorisée à entrer à Cuba.

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