Écrire Un universitaire émirien condamné à 10 ans de réclusion

Le 29 mars, la Cour d’appel fédérale des Émirats arabes unis a condamné Nasser bin Ghaith, éminent économiste et universitaire émirien, à une peine de 10 années de réclusion. Il a été déclaré coupable de divers chefs d’accusation, notamment d’« insulte envers les Émirats arabes unis ». Cet homme est un prisonnier d’opinion.

Le 29 mars, la Cour d’appel fédérale siégeant à Abou Dhabi, capitale des Émirats arabes unis, a condamné le défenseur des droits humains Nasser bin Ghaith à 10 ans de réclusion. Cet homme avait été jugé et condamné pour divers chefs d’accusation, notamment pour avoir « publié de fausses informations » sur les dirigeants des Émirats arabes unis et leurs politiques, en raison de commentaires qu’il avait postés sur Twitter et dans lesquels il disait ne pas avoir bénéficié d’un procès équitable dans une affaire concernant également quatre autres Émiriens et connue sous le nom d’affaire des « Cinq des Émirats ». Nasser bin Ghaith a aussi été déclaré coupable de « communication et coopération avec des membres de l’organisation interdite al Islah », pour avoir rencontré des personnes soupçonnées d’avoir des liens avec cette organisation.

Nasser bin Ghaith n’a pas pu préparer convenablement sa défense, les autorités émiriennes ayant limité son accès à son avocat. Celui-ci n’a pas pu être présent pour le prononcé du jugement, la Cour étant allée jusqu’à modifier l’ordre des affaires à examiner et à faire de celle de Nasser bin Ghaith la première de la journée.

Nasser bin Ghaith a le droit de former un recours contre sa condamnation auprès de la Cour suprême fédérale. Il est actuellement incarcéré dans la prison de haute sécurité d’al Razeen, à Abou Dhabi.

Le 28 mars, 10 organisations de défense des droits humains, dont Amnesty International, ont appelé à la libération de Nasser bin Ghaith. Voir le document d’Amnesty International (en anglais) intitulé United Arab Emirates (UAE) : Stop paying lip service to human rights and release Dr Nasser Bin Ghaith (Index AI : MDE 25/5968/2017), 28 mars 2017, disponible à l’adresse suivante : https://www.amnesty.org/en/documents/mde25/5968/2017/en/.

À la suite du prononcé du jugement, Amnesty International a condamné la décision rendue. Voir le document d’Amnesty International intitulé Émirats arabes unis. La condamnation d’un éminent universitaire à 10 ans de prison pour des tweets porte un coup scandaleux à la liberté d’expression, 29 mars 2017, disponible à l’adresse suivante : https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2017/03/uae-prominent-academic-jailed-for-10-years-over-tweets-in-outrageous-blow-to-freedom-of-expression/

En 2011, Nasser bin Ghaith et quatre autres Émiriens (connus sous le nom des « Cinq des Émirats ») ont fait l’objet d’un procès inique pour avoir fait sur Internet des déclarations appelant à l’adoption de réformes économiques, politiques et sociales aux Émirats arabes unis. Ils ont été déclarés coupables d’avoir « insulté publiquement » le président, le vice-président et le prince héritier d’Abou Dhabi. Nasser bin Ghaith a été condamné à une peine de deux ans d’emprisonnement. Face au tollé international qui s’est ensuivi, le président des Émirats arabes unis les a graciés et ils ont été libérés.

Le 18 août 2015, Nasser bin Ghaith a été victime d’une disparition forcée, après avoir été arrêté sur son lieu de travail par la Sûreté de l’État. Le 4 avril 2016, il a été vu pour la première fois depuis sa disparition, lorsqu’il a été présenté à la Chambre de la sûreté de l’État de la Cour suprême fédérale pour son premier procès. À cette audience, comme à la deuxième qui a eu lieu le 2 mai 2016, il a expliqué à la Cour qu’il avait été détenu dans un lieu tenu secret et soumis à des passages à tabac et à une privation de sommeil délibérée pendant près de huit mois. Le juge n’a pas tenu compte de ses déclarations et a refusé de diligenter une enquête indépendante sur ses allégations d’actes de torture et d’autres mauvais traitements.

Outre les infractions énumérées plus haut, Nasser bin Ghaith a aussi été inculpé d’avoir « commis un acte hostile envers un État étranger » parce qu’il avait critiqué les autorités égyptiennes dans des commentaires publiés sur Twitter, « critiqué de manière offensante la construction d’un temple hindou à Abou Dhabi et dressé des citoyens émiriens contre leurs dirigeants et leur gouvernement », en référence à un message Twitter qui visait à prôner la tolérance et que, selon lui, la Cour a mal interprété.

Amnesty International a recueilli des informations faisant état de mauvais traitements et de torture dans la prison de haute sécurité d’al Razeen, située au milieu du désert d’Abou Dhabi et placée sous le contrôle de fait de la Sûreté de l’État. Le 11 novembre 2015, Mohammed al Roken, incarcéré dans la prison d’al Razeen, a été réveillé dans sa cellule par de la musique à plein volume. En août 2013, 18 prisonniers ont entamé une grève de la faim pour dénoncer le traitement que leur réservaient les autorités pénitentiaires, dénonçant notamment les passages à tabac infligés par des gardiens, les restrictions apportées aux visites familiales et les privations de lumière. Entre le 21 et le 28 août, trois d’entre eux se sont évanouis après que les autorités pénitentiaires eurent délibérément désactivé la climatisation alors que la température était très élevée. Au moins 10 prisonniers d’opinion ont été soumis à des mauvais traitements dans la prison d’al Razeen en juin 2014.

Selon le témoignage de détenus et de leurs proches, les prisonniers politiques de la prison d’al Razeen sont spécifiquement victimes de discrimination. Les prisonniers se sont plaints aux autorités de leurs conditions de détention, de même que leurs familles, mais sans résultat. Le 25 mars 2014, les familles de prisonniers incarcérés dans la prison d’al Razeen ont adressé au procureur général d’Abou Dhabi une lettre commune, dans laquelle ils lui demandaient d’enquêter sur les allégations faisant état de violence à l’égard des prisonniers. Elles n’ont cependant reçu aucune réponse. De même, le ministre de l’Intérieur n’a pas répondu à une lettre, datée d’août 2013, appelant son attention sur les allégations de mauvais traitements infligés aux prisonniers.

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