Écrire Un universitaire détenu arbitrairement

Le 29 décembre 2020, Maati Monjib, universitaire marocain et défenseur des droits humains, a été arrêté alors qu’il déjeunait dans un restaurant à Rabat, la capitale du Maroc.

Il est détenu arbitrairement depuis lors. Il faisait l’objet d’une nouvelle enquête depuis le 7 octobre 2020, des accusations de blanchiment de capitaux ayant été portées contre lui et des membres de sa famille.

Cette enquête, qui fait suite à des années de harcèlement et de surveillance illégale, est la dernière tentative d’intimidation en date contre Maati Monjib et constitue une forme de représailles pour ses positions critiques à l’égard des autorités et ses activités de promotion du droit à la liberté d’expression au Maroc.

Maati Monjib est un prisonnier d’opinion. Il doit être libéré immédiatement et sans condition.

Maati Monjib, universitaire et fondateur du Centre Ibn Rochd d’études et de communication, est également le président de l’ONG Liberté maintenant (qu’il a créée avec le journaliste Ali Anouzla) et membre de l’Association marocaine pour le journalisme d’investigation (AMJI). Il commente régulièrement la politique marocaine dans des médias internationaux, des groupes de réflexion et des forums universitaires, où il a souvent fait part de ses opinions et de ses analyses quant aux violations des droits humains imputables aux autorités marocaines. Le 26 octobre 2020, Maati Monjib a voyagé pendant quatre heures depuis son lieu de résidence pour se rendre à l’une des convocations qu’il avait reçues. Il a dû prendre les transports en commun, ce qui l’a exposé au COVID19. Il a contracté la maladie et a dû se mettre en quarantaine après le voyage. Il a ensuite été convoqué les 25 novembre et 4 décembre 2020.

En 2015, Maati Monjib s’est vu interdire de se rendre en Espagne, où il devait faire une intervention lors d’une conférence sur les médias arabes en transition. Maati Monjib a observé une grève de la faim pendant 24 jours pour protester contre cette interdiction de quitter le territoire. Sa santé s’est fortement dégradée à cette occasion et il a été hospitalisé après avoir perdu connaissance. Les autorités ont levé l’interdiction de quitter le territoire le 29 octobre 2015.

Maati Monjib et six autres militants ont fait l’objet d’une enquête en 2015 pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’État » par « propagande » de nature à ébranler « la fidélité que les citoyens doivent à l’État et aux institutions du peuple marocain » au titre de l’article 206 du Code pénal, ainsi que pour « escroquerie » au titre de l’article 540, et pour « direction d’une association se livrant à une activité autre que celle prévue par ses statuts » en vertu du décret royal n° 1-58-376 réglementant le droit d’association. Dans l’affaire de 2015 contre Maati Monjib et ses six coaccusés, les questions de la police ont essentiellement porté sur la perception de fonds étrangers provenant de l’ONG Free Press Unlimited (FPU) et destinés à financer des sessions de formation à StoryMaker, une application sécurisée développée par Free Press Unlimited, le Guardian Project et Small World News, qui permet aux journalistes citoyens de publier du contenu de manière anonyme s’ils le désirent. Le procès est en cours dans cette affaire depuis 2015. Selon Maati Monjib, les audiences du procès ne durent généralement que quatre ou cinq minutes avant que le juge ne lève la séance et n’annonce une prochaine date d’audience. Le procès a ainsi été reporté à 21 reprises depuis 2015. Maati Monjib encourt jusqu’à cinq ans d’emprisonnement s’il est déclaré coupable dans cette affaire.

Dans une lettre adressée à Amnesty International, le gouvernement a indiqué que l’enquête de 2020 était liée aux rapports annuels de 2015 et 2016 de Free Press Unlimited, ce qui laisse à penser que cette nouvelle enquête est liée à l’affaire de 2015 sur la perception de fonds étrangers émanant de cette ONG et visant à financer des ateliers de formation destinés aux journalistes citoyens.

Les charges sont liées à des activités légitimes protégées par le droit d’association. En vertu du droit international relatif aux droits humains, le droit à la liberté d’association comprend la possibilité pour les ONG de collecter des fonds et de solliciter, recevoir et utiliser des ressources provenant de sources nationales, étrangères et internationales. Les restrictions concernant les financements étrangers qui entravent la capacité des associations à mener les activités prévues par leurs statuts vont indûment à l’encontre de l’article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel le Maroc est partie.

En octobre 2019, Amnesty International a révélé que Maati Monjib et Abdessadak El Bouchattaoui, un avocat spécialiste des droits humains, étaient soumis à une surveillance numérique illégale depuis au moins 2017 via le logiciel espion Pegasus, produit par l’entreprise israélienne NSO Group.

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