Écrire Un universitaire emprisonné en danger de mort

Le 4 mars, l’universitaire et défenseur des droits humains marocain Maati Monjib a entamé une grève de la faim, bien qu’il souffre d’une pathologie cardiaque et de diabète, afin de protester contre sa détention et sa condamnation en son absence à un an d’emprisonnement dans deux dossiers différents.

Les poursuites engagées contre lui découlent uniquement de l’exercice de sa liberté d’expression et d’association. Elles font suite à des années de surveillance numérique illégale et de harcèlement judiciaire.

Le 27 janvier, Maati Monjib a été injustement condamné à un an de prison et 10 000 dirhams d’amende dans une affaire datant de plusieurs années, sans avoir assisté à la moindre audience ni reçu de convocation et sans qu’une notification soit envoyée à ses avocats afin de garantir un procès équitable en bonne et due forme.

Dans une déclaration que Maati Monjib a transmise à ses avocats le 4 mars, il a souligné que trois principaux facteurs avaient contribué à sa décision de se mettre en grève de la faim. Il a ainsi écrit : « J’entame une grève de la faim à compter du jeudi 4 mars 2021 à 16h00 pour lancer un appel au secours à l’opinion publique à la suite des persécutions et de l’injustice qui me sont infligées par le régime politique marocain. J’observe cette grève de la faim afin de protester contre : 1) mon arrestation arbitraire le 29 décembre 2020, 24 heures avant que l’audience du procès remontant à 2015 pour “atteinte à la sûreté de l’État” se déroule dans le plus grand secret. Je n’ai pas été convoqué à cette audience. Mes avocats n’ont pas été informés. Ce procès a été reporté jusqu’à mon arrestation et a abouti à ma condamnation en mon absence. »

Dans cette déclaration, Maati Monjib évoque également la diffamation dont il a été la cible dans les « médias officiels et ceux dépendant des services de sécurité », qui porte atteinte à sa dignité et à la présomption d’innocence. Il y proclame : « Je déclare à l’opinion publique nationale et internationale que je suis totalement innocent des accusations fallacieuses qui visent à saper ma crédibilité en tant que journaliste et écrivain d’opinion. La raison de toute cette persécution est à chercher dans mes écrits critiques à l’égard du régime et de sa police politique et dans mes activités de défense des droits humains comme mon soutien aux détenus du mouvement Hirak du Rif et aux journalistes détenus injustement sous couvert de crimes de droit commun. »

En 2015, Maati Monjib a observé une grève de la faim pendant 24 jours quand il s’est vu interdire de se rendre en Espagne, où il devait faire une intervention lors d’une conférence sur les médias arabes en transition. Sa santé s’est fortement dégradée à cette occasion et il a été hospitalisé après avoir perdu connaissance. Les autorités ont levé l’interdiction de quitter le territoire le 29 octobre 2015.

Maati Monjib et six autres militants ont fait l’objet d’une enquête en 2015 pour « atteinte à la sûreté intérieure de l’État » par « propagande » de nature à ébranler « la fidélité que les citoyens doivent à l’État et aux institutions du peuple marocain » au titre de l’article 206 du Code pénal. Dans cette affaire, les questions de la police ont essentiellement porté sur la perception de fonds étrangers provenant de l’ONG Free Press Unlimited et destinés à financer des sessions de formation à StoryMaker, une application sécurisée développée par Free Press Unlimited (FPU), le Guardian Project et Small World News, qui permet aux journalistes citoyens de publier du contenu de manière anonyme s’ils le désirent.

Selon Maati Monjib, les audiences du procès ne duraient généralement que quatre ou cinq minutes avant que le juge ne lève la séance et n’annonce une prochaine date d’audience. Le procès a ainsi été reporté à 21 reprises depuis 2015. Dans une lettre adressée à Amnesty International, le gouvernement a indiqué que l’enquête de 2020 était liée aux rapports annuels de 2015 et 2016 de Free Press Unlimited, ce qui laisse à penser que cette nouvelle enquête est liée à l’ancienne affaire de 2015 sur la perception de fonds étrangers émanant de cette ONG et visant à financer des ateliers de formation destinés aux journalistes citoyens. Les poursuites portent sur des activités légitimes protégées par le droit d’association.

En vertu du droit international relatif aux droits humains, le droit à la liberté d’association comprend la possibilité pour les ONG de collecter des fonds et de solliciter, recevoir et utiliser des ressources provenant de sources nationales, étrangères et internationales. Les restrictions concernant les financements étrangers qui entravent la capacité des associations à mener les activités prévues par leurs statuts vont indûment à l’encontre de l’article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel le Maroc est partie .

Maati Monjib est un universitaire et défenseur des droits humains de renom. Il commente régulièrement la politique marocaine dans des médias internationaux, des groupes de réflexion et des forums universitaires, où il a souvent fait part de ses opinions et de ses analyses quant aux violations des droits humains imputables aux autorités marocaines.

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