Le nouveau règlement administratif n° 001-2021 « pour le registre unifié des obligés devant le Bureau national contre le crime organisé et le financement du terrorisme du ministère de l’Intérieur, de la Justice et de la Paix » a été publié au Journal officiel n° 42.098 du 30 mars 2021. Il oblige toutes les personnes physiques ou juridiques de nature non financière à s’enregistrer avant le 1er mai 2021, en accordant une attention particulière à la participation des organisations non gouvernementales (ONG) pour la surveillance et le suivi de leurs activités.
Ce règlement imposerait des contrôles stricts nécessitant de remettre les documents constitutifs des organismes, leurs notes de réunions, la liste de leurs membres et de leur personnel, la liste de leurs donateurs, l’enregistrement de leurs mouvements financiers et la liste de tous leurs bénéficiaires et des autres organisations avec qui ils travaillent. Il part du principe que des faits relevant du terrorisme risquent d’être commis ou que les ONG sont susceptibles d’en commettre car elles ne sont pas soumises à la surveillance d’un organe public spécifique ni régies par une loi spéciale.
Cette initiative s’inscrit dans les pratiques de criminalisation systématique des organisations de la société civile, qui se sont intensifiées au cours de l’année passée. Elle représente sans doute la plus grave attaque relevée par Amnesty International jusqu’à présent, notamment parce qu’elle vise explicitement à réduire l’espace accordé à la société civile en limitant fortement sa capacité à continuer de défendre les droits et à fournir l’aide et la protection nécessaires à la population.
Amnesty International et 662 autres organisations ont appelé à l’abrogation du règlement, sachant que, au cours des dernières années, tous les recours constitutionnels en vue d’obtenir son annulation par les juridictions du pays ont été vains en raison du manque d’indépendance de la justice et de la mainmise du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire.
Le gouvernement de Nicolás Maduro ne cesse de harceler, de poursuivre et de censurer les militant·e·s et les organisations de la société civile œuvrant pour protéger les droits des Vénézuéliens dans le contexte d’une crise humanitaire complexe et d’une profonde crise des droits humains qui a poussé un nombre record de personnes à fuir le pays en quête de sécurité et d’un avenir digne. Au 31 décembre 2020, elles étaient plus de 6 millions à avoir quitté le Venezuela.
L’an dernier, un rapport de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela mandatée par l’ONU a fait état de centaines de cas d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées, de détentions arbitraires, d’actes de torture et d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants commis dans le pays depuis 2014, en concluant que ces graves violations des droits humains pourraient constituer des crimes contre l’humanité.