Depuis 1961, année de la création d’Amnesty International, l’un des moteurs fondamentaux de l’action du mouvement de défense des droits humains est la possibilité concrète offerte d’agir en faveur d’individus. C’est sans doute là l’image qu’ont de l’ONG la plupart de ses militants comme la plupart des citoyens, l’image de ces appels mondiaux lancés à travers le monde et qui suscitent ensuite la rédaction et l’envoi de lettres aux autorités concernées. On estime que, en un peu plus de quatre décennies, quelque 40 000 prisonniers d’opinion ont bénéficié directement de l’action opiniâtre des militants de l’organisation et que leurs cas individuels ont connu une issue heureuse.
Au fil du temps, l’action du mouvement s’est élargie, tant sur le plan du contenu (torture, peine de mort, violences contre les femmes, droits économiques et sociaux,...) que du nombre de militants. Amnesty compte plus de 2 200 000 de membres et sympathisants dans le monde, dont 47 000 en Wallonie et à Bruxelles.
Bien entendu, tous les membres d’Amnesty ne sont pas des militants « à temps plein » impliqués dans la vie des groupes locaux du mouvement, lesquels adoptent leurs prisonniers d’opinion. La création dans les années 70 de la technique des Actions urgentes (AU) a néanmoins permis à un plus grand nombre de membres d’agir concrètement et rapidement en faveur d’individus.
Les Actions urgentes, c’est une méthode qui repose sur un réseau de personnes prêtes à envoyer des messages aux autorités gouvernementales et judiciaires dans différents pays en faveur de personnes qui courent un danger imminent. Le réseau AU est mobilisé chaque fois qu’il faut sauver un prisonnier de la torture, de la mort, de mauvaises conditions de détention, procès inéquitable, d’une condamnation à mort ou d’une exécution extrajudiciaire. Les AU sont également mobilisées lorsqu’il s’agit d’empêcher un individu d’être renvoyé de force dans un pays où il pourrait être arrêté et devenir un prisonnier d’opinion, être torturé, disparaître ou être exécuté. Dernière précision, les AU ne concernent pas seulement les prisonniers d’opinion ou les militants organisés, mais aussi les « simples » personnes soumises tout simplement à l’arbitraire des États.
À la fin des années 80, l’apparition du téléfax avait déjà considérablement accéléré les échanges d’informations à travers le monde. Que dire alors de l’explosion des moyens et de l’extension du domaine du possible, depuis le milieu des années 90, avec le développement des outils liés à Internet ? Nous n’en sommes doute qu’au début et, on verra dans les pages qui suivent quelles sont désormais les possibilités que les technologies les plus interactives et les plus conviviales offrent non seulement aux membres d’Amnesty International mais également aux « simples » citoyens.
C’est pourquoi AIBF vient de lancer un nouveau centre d’actions, Isavelives.be. À cette occasion, Amnesty a décidé de consacrer sa campagne de fin d’année à un rappel et à une réactualisation d’une de ses missions fondamentales et fondatrices, c’est-à-dire la défense des Individus en danger ou, selon la terminologie anglo-saxonne, les IAR ou Individuals At Risk.
À l’instar des cas individuels visés par les Actions urgentes, les « Individus en danger » viennent de tous les horizons et de toutes les régions du monde. Mais, à la différence des AU, il s’agit de personnes clairement emprisonnées ou menacées pour leur opinion. Ces personnes courent un danger d’emprisonnement, de procès inéquitable, de torture, d’enlèvement, de mort et d’autres violations des droits humains internationaux et du droit humanitaire.
C’est pourquoi, au-delà des 3 appels mondiaux proposés chaque mois aux membres d’Amnesty dans les colonnes de Libertés ! pour qu’ils écrivent aux autorités des pays visés, ce dossier de lancement de campagne de fin d’année propose également plusieurs Opérations Courage, c’est-à-dire des modèles de cartes à envoyer non pas aux autorités mais aux Individus en danger eux-mêmes.
Dans ce numéro, nous vous soumettons donc les cas du Syrien Kamal al-Labwani, de la Mexicaine Magdalena García Durán, du Népalais Sanjiv Kumar Karna et de la Congolaise (RDC) Coquette Nsinga. La suite ? Elle vous appartient.
RETOUR AUX FONDAMENTAUX
En 2007, Amnesty International a négocié un virage définitif en se donnant pour mission de défendre les droits humains dans toutes leurs dimensions individuelles, collectives, économiques, sociales et culturelles. Parallèlement, le mouvement a décidé de consacrer sa campagne 2007-2008 à un de ses « fondamentaux », les individus en danger.