Écrire Arrestation de quatre syndicalistes.

Quatre autres syndicalistes et militaires à la retraite, proches de groupes d’opposition, ont été arrêtés à Conakry entre le 4 et le 6 octobre, soit quelques jours avant l’élection présidentielle contestée du 11 octobre. Ils ont été inculpés d’outrage au chef de l’État et de diffamation. Ces quatre hommes, ainsi que Jean Dougo Guilavogui, sont détenus aux côtés de criminels et ne bénéficient pas de soins médicaux suffisants.

Le 4 octobre, des gendarmes ont arrêté Jean Bangoura sans mandat à son domicile, à Conakry. Sekou Kourouma, Souleymane Diallo et Sekou Kouyate, quant à eux, ont été interpellés lors d’une manifestation pacifique qui s’est déroulée à Conakry le 6 octobre. Ces quatre hommes sont membres du Syndicat national des militaires retraités et veuves de Guinée. Selon l’un de leurs avocats, ils ont été arrêtés pour avoir participé à l’organisation d’une manifestation pacifique tenue le 6 octobre en vue de réclamer la libération du secrétaire général de leur syndicat, Jean Dougo Guilavogui. Ils ont été envoyés au centre de détention PM3 avant d’être inculpés d’outrage au chef de l’État et de diffamation, le 8 octobre. Transférés ensuite à la Maison centrale de Conakry, ils se trouvent dans des cellules différentes, qu’ils partagent avec des criminels. Jean Dougo Guilavogui est aussi détenu à cet endroit et fait l’objet des mêmes accusations.

Les surveillants de la prison ont ordonné aux autres détenus de ne pas adresser la parole à ces cinq hommes, qui ne peuvent parler qu’à leurs avocats à l’occasion des visites. Jean Dougo Guilavogui souffre d’une pathologie cardiaque chronique. Bien qu’il l’ait indiqué à la direction de la prison, il ne reçoit pas les soins ni les médicaments dont il a besoin. Les autres détenus ne bénéficient pas non plus de soins médicaux. Amnesty International considère Jean Dougo Guilavogui et les autres membres de son syndicat comme des prisonniers d’opinion.

Au moins 35 militants de l’opposition arrêtés à la suite d’affrontements violents avec des sympathisants du parti au pouvoir sont toujours détenus à Boké. Pourtant, certains ne cessent d’affirmer qu’ils n’ont pas pris part aux violences et qu’ils sont détenus arbitrairement.

Jean Dougo Guilavogui, dirigeant syndical et militaire à la retraite, a été arrêté le 19 septembre à Conakry et détenu sans être déféré à la justice jusqu’à son inculpation, le 25. Sa détention prolongée est contraire au droit international et au droit guinéen. Pendant la garde à vue, les policiers l’ont interrogé ouvertement sur ses activités syndicales et sur le soutien qu’il avait apporté publiquement à un parti d’opposition.

Au moins 35 membres de l’opposition ont aussi été arrêtés le 20 septembre, à la suite d’affrontements entre des militants de l’opposition appartenant à l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), un parti d’opposition, et des sympathisants du parti au pouvoir, le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), à Koundara, dans le nord du pays. Selon les témoignages recueillis par Amnesty International, plusieurs des personnes arrêtées n’ont pas pris part aux violences et ont même appelé les autres militants au calme. Les membres de l’opposition ont été inculpés d’incendie volontaire, de destruction de bâtiments publics et de blessures intentionnelles. Ils se trouvent à la prison centrale de Boké, à quelque 250 kilomètres de la ville où ils ont été interpellés ; ils sont par conséquent loin de leurs familles. En outre, ils sont privés d’avocat. Certains d’entre eux, atteints de pathologies, n’ont pas accès au traitement médical dont ils ont besoin.

Entre le 8 et le 10 octobre, des affrontements ont éclaté entre des membres de groupes politiques, armés de pierres et de machettes, ainsi qu’avec les forces de sécurité. Ces événements ont fait au moins six mort à Conakry et plus de 50 blessés, outre d’importants dommages matériels. Au moins une personne est morte dans des échauffourées similaires à Nzérékoré, dans la région de Guinée forestière, entre le 2 et le 3 octobre. L’élection présidentielle s’est tenue le 11 octobre dans un climat de tension. Le 12, tous les candidats, à l’exception du président en exercice Alpha Condé, ont déclaré que le scrutin était entaché de graves irrégularités et qu’ils n’acceptaient pas les résultats. Le 13, des affrontements ont éclaté entre des manifestants et des policiers dans les quartiers de Bambeto et Hamdallaye. Des policiers, blessés par des jets de pierres, ont été emmenés dans des dispensaires. Plusieurs jeunes hommes ont aussi été blessés, dont deux par balle.

Depuis mars, au moins six personnes sont mortes et des centaines ont été blessées, notamment des policiers et des gendarmes, lors des affrontements entre manifestants et forces de sécurité qui ont eu lieu pendant la période électorale. Au cours des 10 dernières années, plus de 350 personnes sont décédées et des milliers ont été blessées pendant des manifestations en Guinée.

Le 2 juin, l’Assemblée nationale a adopté un texte de loi sur le maintien de l’ordre public, qui définit quand et comment il est possible d’avoir recours à la force pendant des manifestations. Tout en se félicitant que des mesures aient été prises afin d’établir les missions et les responsabilités des forces de sécurité guinéennes, Amnesty International souligne que la nouvelle loi – qui doit encore être approuvée par le président – présente des lacunes importantes qui pourraient restreindre le droit de réunion pacifique. En effet, celle-ci n’autorise pas les rassemblements publics spontanés, tandis que les forces de sécurité sont toujours habilitées à disperser des groupes de manifestants pacifiques si elles soupçonnent ne serait-ce qu’une personne d’avoir une arme. Ces dispositions pourraient aussi servir à interdire ou à réprimer les manifestations pacifiques. Par ailleurs, l’Assemblée nationale a adopté un autre texte à la même séance.
Celui-ci prévoit des peines allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et de lourdes amendes pour outrage, diffamation, offense ou publication de « fausses informations » visant le président ou d’autres représentants de l’État. Ces dispositions constituent une restriction totalement injustifiée de la liberté d’expression, qui pourrait servir à incriminer la dissidence ; le président ne doit pas approuver le texte.

Dans un rapport publié en septembre dernier, Amnesty International a appelé les responsables politiques et les forces de sécurité à respecter pleinement le droit à la liberté de réunion pacifique et à veiller à ce qu’une force excessive ne soit pas utilisée contre les manifestants et les autres citoyens durant la période électorale et par la suite (voir le document intitulé Guinée. Empêcher le recours excessif à la force et respecter le droit à la liberté de réunion pacifique avant et après les élections de 2015 – Appel à l’action, à l’adresse https://www.amnesty.org/fr/documents/afr29/2160/2015/fr/).

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