Écrire Une avocate détenue est dans un état de santé critique

Le 30 novembre 2020, la famille de Hoda Abdelmoniem, une avocate spécialiste des droits humains âgée de 63 ans, a appris qu’elle avait été hospitalisée en raison d’une insuffisance rénale présumée et de douleurs intenses.

Ses proches l’ont vue pour la dernière fois lors d’une audience devant le tribunal le 27 octobre 2020, mais il ne leur est toujours pas permis de lui rendre visite en prison ni de consulter son dossier médical, ce qui fait qu’ils sont d’autant plus inquiets pour sa santé et son bien-être.

Cela fait plus de deux ans que Hoda Abdelmoniem est détenue sans avoir été jugée, soit davantage que la durée maximale de détention provisoire autorisée par le droit égyptien.

Le 1er novembre 2018, à 1 h 30 du matin, des membres de l’Agence de sécurité nationale ont fait irruption chez Hoda Abdelmoniem, au Caire, ont mis son domicile à sac, puis ont emmené cette femme, les yeux bandés, chez sa mère. Pendant que les agents fouillaient le domicile de sa mère, Hoda Abdelmoniem est restée, les yeux toujours bandés, dans un véhicule de police. Les agents ont confirmé à la fille de Hoda Abdelmoniem, qui était présente lors de l’arrestation, qu’ils appartenaient à l’Agence de sécurité nationale, mais ils n’ont pas présenté de mandat d’arrêt, ni mentionné le motif de l’arrestation ou indiqué où ils emmenaient Hoda Abdelmoniem.

Celle-ci n’a été autorisée à emporter ni médicaments, ni effets personnels. Après avoir subi une disparition forcée de près de trois semaines, elle a été déférée, le 21 novembre 2018, au service du procureur général de la sûreté de l’État, une branche spéciale du parquet chargée d’enquêter sur les menaces pour la sécurité nationale. Le lendemain, le 22 novembre, ses proches ont pu la voir dans les locaux de ce service. Ils ont indiqué qu’elle portait les mêmes vêtements que le jour de son arrestation, semblait terrorisée et refusait de parler de sa détention. On l’a ensuite ramenée vers un lieu de détention inconnu. Sa famille a pu la revoir brièvement les 24 et 28 novembre dans les locaux du service du procureur général de la sûreté de l’État. Hoda Abdelmoniem a de nouveau été soumise à une disparition forcée entre le 2 décembre 2018 et le 14 janvier 2019, les autorités refusant de révéler à ses proches et à ses avocats le lieu où elle se trouvait .

Le 15 janvier 2019, Hoda Abdelmoniem a de nouveau comparu devant les procureurs du service du procureur général de la sûreté de l’État, qui ont prolongé sa détention de 15 jours. Elle a dit à sa fille qu’elle ne savait pas où elle était détenue. À l’époque, sa fille avait indiqué que Hoda Abdelmoniem avait perdu énormément de poids, apparemment à cause de la nourriture, insuffisante et de mauvaise qualité.

Après avoir été interrogée par le service du procureur général de la sûreté de l’État, Hoda Abdelmoniem a été emmenée, les yeux bandés, vers un lieu inconnu par des membres de l’Agence de sécurité nationale. Après deux autres semaines de disparition forcée, elle a été transférée dans la prison pour femmes d’al Qanater le 31 janvier 2019.

Le jour où Hoda Abdelmoniem a été appréhendée, le 1er novembre 2018, les autorités égyptiennes ont lancé une série de descentes de police, arrêtant au moins 31 défenseur.e.s des droits humains et avocat.e.s spécialistes de ces droits (10 femmes et 21 hommes). La Coordination égyptienne pour les droits et les libertés (ECRF), qui recueille des informations sur les disparitions forcées et le recours à la peine de mort, et apporte une aide juridique aux victimes de violations des droits humains, a été particulièrement visée par ces mesures de répression.

Dans une déclaration publiée le 1er novembre 2018 et annonçant la suspension de ses activités en faveur des droits humains, l’ECRF a indiqué que la situation en Égypte était incompatible avec la défense des droits humains et a réclamé l’intervention du Conseil des droits de l’homme des Nations unies.

Les forces de sécurité ont interdit à la famille de Hoda Abdelmoniem de lui apporter de la nourriture et des vêtements (alors que cela est autorisé pour d’autres détenues de la prison d’al Qanater), acceptant uniquement des médicaments et de l’argent pour le compte de cantine de de Hoda Abdelmoniem. Lorsque ses proches se sont enquis des raisons de cette interdiction, un responsable a évoqué des « instructions » de l’Agence de sécurité nationale, un service de police spécialisé.

Hoda Abdelmoniem a travaillé comme consultante bénévole pour l’ECRF et a recueilli des informations sur des violations des droits humains, y compris des cas de disparitions forcées. Elle a été membre du Conseil national des droits humains et du Barreau égyptien. Hoda Abdelmoniem fait l’objet d’une interdiction de se rendre à l’étranger depuis fin 2013, sans avoir été inculpée. Le 27 novembre 2020, le Conseil des barreaux européens (CCBE) a décerné son Prix des droits humains 2020 à Hoda Abdelmoniem et à six autres avocat.es détenus en Égypte.

Dans le cadre des affaires examinées par le service du procureur général de la sûreté de l’État, les procureurs et les juges prolongent régulièrement la détention provisoire de milliers de personnes détenues dans l’attente des résultats d’enquêtes sur des accusations infondées liées au « terrorisme », parfois en l’absence des intéressé.es et sans permettre aux avocat.es de contester la légalité de leur détention. Nombre de ces personnes, dont Hoda Abdelmoniem, sont maintenues en détention provisoire pendant des périodes d’une durée supérieure à la limite maximale absolue de deux ans.

En vertu de l’article 143 du Code égyptien de procédure pénale, la période maximale de détention provisoire ne doit pas excéder six mois pour les personnes soupçonnées d’infractions passibles de peines pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement, 18 mois pour des infractions passibles de peines pouvant aller jusqu’à 15 ans de réclusion, et deux ans pour des infractions passibles de la peine de mort ou de la réclusion à perpétuité.

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