Écrire Des militants arrêtés pour avoir commémoré le 4 juin 1989

Neuf militants ont été arrêtés pour avoir commémoré le 27e anniversaire de la répression de Tiananmen. Ils risquent d’être victimes de torture ou d’autres mauvais traitements.

Neuf militants de Pékin, du Sichuan et de Chongqing ont été arrêtés après avoir commémoré le 27e anniversaire de la répression de Tiananmen. Six d’entre eux – Zhang Baocheng, Zhao Changqing, Xu Caihong, Ma Xinli, Liang Taiping et Li Wei – ont été placés en détention pour des charges pénales le 31 mai et le 1er juin ; ils sont soupçonnés d’avoir « cherché à provoquer des conflits et troublé l’ordre public » parce qu’ils se sont réunis au domicile de Zhao Changqing, à Pékin. Par ailleurs, ils ont pris des photos sur lesquelles on pouvait lire un slogan en faveur de la libération de Guo Feixiong et de Yu Shiwen, militants originaires respectivement du Guangdong et du Henan. Ils se trouvent actuellement au centre de détention du district de Fengtai, à Pékin. Li Meiqing, une autre militante, a été emmenée le 2 juin au poste de police de Qingta, à Pékin, où elle a été interrogée avant d’être relâchée. Elle fait actuellement l’objet d’une surveillance à domicile.

Deux militants du Sichuan ont aussi été arrêtés dans le cadre de la commémoration. Fu Hailu a été arrêté fin mai pour « incitation à la subversion du pouvoir de l’État » parce qu’il avait vendu du baijiu, un alcool très consommé, dont l’étiquette indiquait « Souvenez-vous, Huit-Alcool-Six-Quatre » et représentait la célèbre image d’un homme faisant face à des chars. Il est accusé d’avoir voulu faire référence à la date du 4 juin 1989 en jouant sur la similitude qui existe en mandarin entre le mot « alcool » et le chiffre neuf (prononcé jiu dans les deux cas). Ma Qing, une poétesse ayant apparemment fait la promotion de cet alcool sur WeChat, un réseau social chinois, a aussi été interpellée fin mai. Ces deux personnes se trouvent actuellement au centre de détention de la ville de Chengdu.

Une militante de Chongqing du nom de Luo Yaling, connue au niveau local pour son soutien à d’autres militants, a été placée en détention fin mai pour avoir « cherché à provoquer des conflits et troublé l’ordre public ». Son incarcération est peut-être liée à la commémoration du 4 juin ou à sa solidarité envers d’autres défenseurs des droits humains. Le 3 juin, la police de Chongqing a effectué une descente à son domicile et a saisi son téléphone portable et sa tablette. Luo Yaling se trouve actuellement au centre de détention du district de Jiangbei, à Chongqing.

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En avril 1989, des manifestations organisées à l’instigation de plusieurs étudiants qui se réunissaient initialement pour honorer la mémoire du haut responsable du Parti communiste Hu Yaobang se sont propagées rapidement dans l’ensemble du pays. Les étudiants réclamaient qu’il soit mis fin à la corruption des fonctionnaires et appelaient à des réformes politiques et économiques. Leurs demandes ont emporté l’adhésion d’un large public. Des manifestations pacifiques ont eu lieu à Pékin et dans toute la Chine. Les autorités n’ont pas réussi à persuader les manifestants de rentrer chez eux. Compte tenu de l’escalade des tensions à Pékin, la loi martiale a été instaurée le 20 mai.

Dans la nuit du 3 juin, des militaires lourdement armés et des centaines de véhicules blindés sont arrivés dans la ville pour mettre fin aux manifestations en faveur de la démocratie. De nombreux civils sans arme, notamment des enfants et des personnes âgées, ont été abattus par des soldats. Le 4 juin, l’armée avait pris totalement le contrôle de Pékin.

Fin juin 1989, les autorités chinoises ont publié un rapport officiel dans lequel elles affirmaient que 3 000 civils avaient été blessés et plus de 200, dont 36 étudiants, avaient trouvé la mort dans les émeutes. Elles y indiquaient aussi que plusieurs dizaines de militaires étaient décédés. Bien qu’on ignore toujours si ces chiffres sont exacts, ils sont probablement en deçà de la réalité.

Immédiatement après la répression militaire, les autorités ont commencé à traquer les personnes qui avaient participé aux manifestations. De nombreux civils ont été arrêtés, torturés ou emprisonnés à l’issue de procès iniques. Beaucoup ont été inculpés de crimes « contre-révolutionnaires ». Signalons que les infractions « contre-révolutionnaires » ont été supprimées du Code pénal en 1997. Pourtant, les affaires des personnes déjà incarcérées pour de telles infractions, notamment celles ayant participé aux manifestations de 1989 en faveur de la démocratie, n’ont pas été révisées.

Parmi les personnes détenues pour avoir commémoré le 27e anniversaire de la répression de Tiananmen figurent Zhang Baocheng, Zhao Changqing et Li Wei, qui appartenaient au réseau informel Mouvement des nouveaux citoyens, dirigé par l’éminent juriste Xu Zhiyong. Ce réseau préconisait d’endosser une « nouvelle responsabilité citoyenne », à savoir de rejeter la corruption et de faire le bien de la société, de participer à la vie civique en organisant des réunions sur la situation politique, en aidant les plus faibles et en s’unissant pour partager et coordonner leur travail.

En avril 2014, Li Wei et Zhang Baocheng ont été condamnés à deux ans d’emprisonnement et Zhao Changqing à deux ans et demi pour avoir « organisé un rassemblement dans le but de troubler l’ordre public ». Li Wei, Zhang Baocheng et Zhao Changqing ont été libérés à l’issue de leur peine, en avril, mars et octobre 2015 respectivement.
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