Écrire Des réfugiés syriens toujours bloqués à la frontière

Le gouvernement jordanien refuse toujours de laisser 13 000 réfugiés syriens quitter la zone frontalière et progresser sur le territoire, notamment des femmes enceintes, des enfants et des personnes âgées. Ces réfugiés sont toujours bloqués dans une zone désertique, à la frontière.

Des personnes fuyant le conflit armé en Syrie sont toujours bloquées à la frontière, du côté jordanien, et sont chaque jour de plus en plus nombreuses depuis novembre. Des organisations humanitaires estiment qu’au moins 13 000 réfugiés sont maintenant bloqués dans cette zone désertique.

Les autorités jordaniennes ont permis un meilleur accès à la zone frontalière aux organisations internationales coordonnant la distribution de cartes de rationnement pour la nourriture, l’eau, les vêtements et d’autres produits de première nécessité. Cependant, les réfugiés doivent attendre jusqu’à trois mois avant d’être autorisés à quitter la zone frontalière, tandis que d’autres se voient refuser purement et simplement l’entrée sur le territoire. Pendant ce temps, ils sont exposés à des conditions météorologiques extrêmement difficiles à la frontière.

En hiver (de novembre à février), les températures peuvent descendre en dessous de zéro dans le désert. Les réfugiés bloqués à la frontière vivent dans des abris de fortune qui ne les protègent que très peu des conditions météorologiques extrêmes. Plus de 80 % d’entre eux sont des personnes fragiles, notamment des femmes enceintes, des enfants (dont certains non accompagnés), des personnes âgées et des personnes gravement malades. Des personnes ayant des maladies chroniques luttent pour obtenir les médicaments dont elles ont besoin. Certaines femmes enceintes sont dans leur troisième trimestre de grossesse et pourraient être forcées d’accoucher à la frontière.

Le conflit armé en Syrie s’est intensifié en 2015. Or, le Liban et la Turquie ont fermé leurs frontières à la majorité des réfugiés venus de ce pays, ce qui a probablement contribué à l’augmentation du nombre de personnes tentant de fuir différentes régions syriennes et d’entrer en Jordanie par le nord-est.

Tous les demandeurs d’asile syriens doivent être considérés de prime abord comme ayant besoin d’une protection internationale car le conflit dans leur pays donne lieu à des violations des droits humains généralisées, ainsi qu’à des crimes de guerre et à des crimes contre l’humanité. Les hommes seuls risquent d’être arrêtés ou enrôlés de force s’ils sont renvoyés en Syrie. Fermer les frontières à ceux qui doivent être protégés ou les forcer indirectement à retourner en Syrie en leur imposant des conditions de vie intolérables va à l’encontre de l’obligation faite à la Jordanie de ne pas renvoyer quiconque dans un pays où il est avéré que cette personne risquerait de subir des persécutions ou d’être victime d’autres graves atteintes aux droits humains. Il s’agit du principe de non-refoulement.

La Jordanie accueille plus de 632 000 réfugiés venus de Syrie ; c’est l’un des cinq principaux pays hôtes de la région, qui abritent à eux tous plus de quatre millions de réfugiés syriens. Cependant, la communauté internationale n’a couvert que 52 % des besoins de financement au profit de l’aide humanitaire des Nations unies en Jordanie pour l’année 2015. En outre, seuls 160 664 des réfugiés syriens les plus fragiles ont été réinstallés sur l’ensemble de la région, ce qui correspond à moins de 2 % du nombre total de réfugiés syriens.

La Jordanie a progressivement restreint l’accès des Syriens à son territoire depuis 2012 et a cessé d’ouvrir ses frontières à ceux qui fuient le conflit. Le poste-frontière officiel entre Ramtha, en Jordanie, et Deraa, en Syrie, a été fermé en 2012 et, depuis lors, l’entrée est refusée à plusieurs catégories de personnes, notamment les Palestiniens fuyant la Syrie, les hommes seuls qui ne peuvent prouver qu’ils ont des attaches familiales en Jordanie et les personnes dépourvues de papiers d’identité. À la mi-2013, les postes-frontières de l’est et de l’ouest ont aussi été fermés aux Syriens, à quelques exceptions près. Selon leurs propres critères, les autorités jordaniennes laissent parfois entrer des blessés de guerre ou des personnes particulièrement exposées, dont certains sont soignés puis renvoyés en Syrie au mépris des obligations qui incombent à la Jordanie au regard du droit international coutumier. En mai 2014, l’État jordanien a commencé à empêcher les Syriens arrivant à l’aéroport international d’entrer sur le territoire, à moins qu’ils ne possèdent un titre de résidence ou que leur cas ne corresponde à l’une des rares exceptions. En juillet 2014, la Jordanie a commencé à restreindre fortement l’accès par le nord-est et de nombreuses personnes se sont ainsi retrouvées bloquées aux postes-frontières de Hadalat et de Rukban.

La Jordanie n’a invoqué aucune raison officielle à la fermeture de ses frontières. En mars 2015, lors de la troisième Conférence internationale des donateurs pour la Syrie, qui vise à lever des fonds au profit de l’intervention régionale des Nations unies face à la crise syrienne, le Premier ministre jordanien a déclaré que la capacité du pays à aider les Syriens était dépassée. Amnesty International a conscience du fait que la Jordanie et les autres pays de la région subissent une pression énorme et que la communauté internationale doit prendre une part de responsabilité plus importante, et ce de toute urgence. Néanmoins, la Jordanie est tenue de protéger les réfugiés syriens fuyant le conflit et les persécutions et de les autoriser à entrer sur son territoire.

La Jordanie n’a pas ratifié la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés ni le Protocole de 1967. Cependant, en vertu du droit international coutumier et d’autres instruments, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention contre la torture, la Jordanie est tenue de ne pas renvoyer des personnes vers des pays où elles risquent véritablement d’être victimes de persécutions ou d’autres graves atteintes aux droits humains. Il s’agit du principe de non-refoulement, qui interdit de refouler des demandeurs d’asile à la frontière et d’expulser des réfugiés.

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