Écrire Les enfants de parents migrants et les personnes demandeuses d’asile sont toujours privés de soins de santé

Le gouvernement grec a rendu une nouvelle décision le 31 janvier accordant un « numéro temporaire d’assurance et de soins de santé » aux personnes demandeuses d’asile, leur donnant ainsi accès au système de santé publique gratuit et au marché du travail pendant qu’elles attendent qu’une décision soit rendue sur leur demande. Si sa mise en œuvre ne s’est pas encore manifestée dans les faits, cette décision bienvenue ne s’attaque pas à la situation des enfants de migrant·e·s en situation irrégulière et des personnes demandeuses d’asile qui ne sont pas parvenues au terme de la procédure d’enregistrement de leur demande.

La Grèce est l’un des principaux pays d’accueil des personnes demandeuses d’asile, réfugiées et migrantes qui viennent en Europe. Depuis 2015, avec l’augmentation des flux migratoires et les effets persistants de la crise économique, les systèmes grecs d’asile et de protection sociale sont constamment sous pression. Les efforts consentis par la Grèce méritent d’être salués et il faut reconnaître que les politiques de l’UE n’ont pas apporté un soutien efficace. Cependant, les personnes demandeuses d’asile, réfugiées et migrantes qui se trouvent actuellement dans ce pays vivent souvent dans des conditions extrêmement difficiles et, sur le long terme, n’ont pas ou quasiment pas accès au système social ou à des possibilités d’insertion. Avec l’augmentation des arrivées par la mer à la mi-2019, la population des îles de la mer Égée a atteint un nombre record, avec 42 041 personnes présentes au 6 janvier 2020, contre seulement 17 034 le 6 juillet 2019. Malgré les efforts qu’a déployés le nouveau gouvernement pour limiter les arrivées et transférer les personnes vers le continent, les camps sont toujours marqués par la surpopulation et par des conditions de vie épouvantables.

En ce qui concerne l’accès aux soins de santé, la Loi grecque n° 4368 de 2016 (article 33) prévoit un libre accès aux services médicaux et pharmaceutiques pour les membres de « groupes sociaux vulnérables », dont font partie les personnes réfugiées et demandeuses d’asile et les mineurs, indépendamment de leur situation au regard de la loi, y compris les enfants non accompagnés et les enfants en situation irrégulière. En vertu de cette même loi, les personnes relevant de l’article 33 doivent avoir un numéro de sécurité sociale (« AMKA ») pour accéder à la gratuité des soins au sein du système de santé public. Depuis 2016, les personnes demandeuses d’asile et les autres membres de « groupes vulnérables » qui ne remplissent pas les conditions requises pour obtenir un AMKA ou qui n’ont pas ce numéro ont droit à une carte de soins de santé pour étrangers (« K.Y.P.A ») leur donnant accès à des soins de santé gratuits au sein du système public. Toutefois, le processus d’attribution de la K.Y.P.A. est jusqu’ici resté inopérationnel. Par une décision de juillet 2019, le ministère du travail a retiré la circulaire qui réglementait les conditions d’attribution de l’AMKA aux ressortissants non grecs. Depuis lors, aucune procédure n’a été mise en place pour accorder l’AMKA aux personnes demandeuses d’asile et aux enfants de personnes migrantes en situation irrégulière. En octobre, il a été annoncé qu’une nouvelle circulaire réglementerait leur situation, mais à ce jour, cette circulaire n’a toujours pas été publiée.

L’ONG MSF a également signalé une détérioration de la situation dans ses centres de soins à Lesbos, Samos et Athènes, indiquant qu’entre juillet et novembre 2019, son centre de jour à Athènes avait connu une « forte augmentation du nombre de patients cherchant à se faire soigner sans AMKA : de 18 % des patients en janvier à 43 % en novembre ». L’ONG grecque Positive Voice, qui s’occupe de patients vivant avec le VIH, a appelé les autorités grecques à permettre aux personnes non grecques d’accéder à des médicaments antirétroviraux, soulignant qu’« au cours des dix premiers mois de 2019, 43 % des nouveaux diagnostics de VIH en Grèce concernaient des réfugiés et des migrants (204 personnes) » et que « les services chargés des infections ne peuvent pas mettre de traitements antirétroviraux à la disposition des étrangers qui n’ont pas d’AMKA, ce qui met en danger leur santé et leur vie ».

Une nouvelle loi relative à l’asile adoptée en novembre 2019 a tenté de remédier à ce problème, en prévoyant que les personnes demandeuses d’asile auraient accès aux soins de santé publics grâce à un « numéro temporaire d’assurance et de soins de santé pour les ressortissants de pays tiers » (PAAYPA). Indépendamment de cette nouvelle loi, le système de PAAYPA a manqué jusqu’à présent de mise en œuvre pratique, exposant ainsi de nombreuses personnes à l’incertitude et à des risques en matière de santé.

À Athènes, en novembre 2019, un Pakistanais souffrant d’un cancer n’a pas pu passer de scanner ni entamer une chimiothérapie parce qu’il n’avait pas réussi à obtenir d’AMKA. Il a finalement pu commencer les traitements grâce à une décision de l’administration de l’hôpital auquel il avait accédé, qui lui a permis d’être soigné gratuitement à titre exceptionnel.

Avec la décision du 31 janvier, le système de PAAYPA va commencer à être mis en œuvre. Cependant, ce système montre déjà ses failles, car il ne règle pas la situation des enfants de personnes migrantes en situation irrégulière et il exclut les personnes demandeuses d’asile non parvenues au terme de la procédure d’enregistrement de leur demande. En attendant sa mise en œuvre, l’efficacité et la faisabilité du système restent à voir.

LIEN VERS L’AU PRÉCÉDENTE : https://www.amnesty.org/fr/documents/eur25/1683/2020/fr/

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