Le Service de contrôle de l’immigration et des douanes (ICE) détient près de 100 familles dans trois établissements en Pennsylvanie et au Texas. Après la confirmation de cas de COVID-19 dans des centres de détention destinés aux familles, un juge fédéral a ordonné à l’ICE de libérer tous les enfants avant le 7 août 2020. Ce magistrat n’a cependant pas compétence en ce qui concerne les parents. L’ICE, en revanche, est habilité à libérer les familles ensemble et le faisait autrefois, mais choisit maintenant de séparer des familles ou de les maintenir en détention pour une durée indéterminée. Les familles détenues sont extrêmement exposées au COVID-19 en raison des conditions d’hygiène inadaptées et des soins de santé insuffisants.
Ana* (22 ans) et sa fille Victoria* (4 ans) ont fui le Honduras après avoir reçu plusieurs menaces de mort et après que le conjoint d’Ana et père de Victoria a été tué en raison de ses convictions politiques. Elles ont demandé l’asile aux États-Unis il y a plus de neuf mois et sont maintenues en détention depuis. L’ICE a été informé à plusieurs reprises que Victoria est asthmatique et qu’elle est particulièrement menacée par le COVID-19, mais il refuse malgré tout de les libérer. Ana a des kystes ovariens qui provoquent des douleurs quotidiennes depuis des mois et ne bénéficie pas d’une prise en charge médicale adaptée. Victoria souffre maintenant de crises d’angoisse, fait des cauchemars et mouille son lit, alors que ce n’était pas le cas avant.
Karla* (43 ans) et Katherine* (15 ans) ont quitté le Honduras après avoir été prises pour cible en raison de leur religion, de leurs convictions politiques et de leur refus de se soumettre aux gangs. Elles ont été détenues pendant plus de dix mois. Pensant que Karla avait la tuberculose quand elle est arrivée à Dilley, les médecins l’avaient initialement placée en isolement médical. Ils n’ont jamais confirmé ce diagnostic et elle a toussé pendant presque toute sa détention. Katherine souffre de tachycardie et a fait plusieurs crises cardiaques. Après une de ces attaques, alors que Katherine avait du mal à respirer, un membre du personnel médical a dit à Karla de ne pas ramener sa fille à l’infirmerie à moins qu’elle ne « devienne bleue ». À la suite d’une campagne internationale en faveur de leur libération, les autorités ont fini par les relâcher ensemble le 26 juillet 2020.
En mai 2020, l’ICE a imposé à des parents avec des enfants ayant parfois à peine un an un « choix binaire » impossible : être séparés de leurs enfants, qui seraient libérés et confiés à des familles d’accueil pendant que les parents resteraient en détention illimitée et risqueraient d’être expulsés, ou bien rester en détention illimitée ensemble. Amnesty International États-Unis a publié une synthèse intitulée Family Separation 2.0 : “You aren’t going to separate me from my only child”, contenant des témoignages de parents.
Aux termes du droit international, les États-Unis sont tenus de veiller à ce que les droits humains des migrants et des demandeurs d’asile soient respectés, protégés et concrétisés. Les autorités américaines sont aussi tenues de veiller à ce que les mineurs ne soient détenus que dans des circonstances exceptionnelles, et ce pendant la durée la plus courte possible. Les normes internationales, y compris les instruments auxquels les États-Unis sont partie, sont fortement défavorables à la détention des migrant·e·s et des personnes demandeuses d’asile. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) proclame clairement le droit de ne pas être détenu arbitrairement. La détention des demandeurs d’asile ne doit être qu’une mesure prise en dernier recours, lorsque les autres solutions non privatives de liberté se sont révélées ou ont été jugées insuffisantes dans le cas de la personne en cause.
Les familles doivent toutes être libérées ensemble immédiatement. Des personnes sont prêtes à les accueillir. Il n’y a aucune raison de ne pas libérer les enfants avec leurs parents. La solution alternative, c’est-à-dire séparer les familles en ne libérant que les enfants, est inacceptable. Dans les cas de séparations des familles imposées par le passé, les graves souffrances psychologiques que des représentant·e·s de l’État ont volontairement infligées aux familles à des fins de coercition ont fait de ces mesures des actes de torture au titre du droit américain et international.