Écrire Ibrahim Karimi condamné à une peine d’emprisonnement

Ibrahim Karimi a été condamné à deux ans et un mois d’emprisonnement pour plusieurs chefs, notamment « outrage public au roi », accusation qu’il nie. Cet homme est un prisonnier d’opinion. Il risque d’être expulsé immédiatement à l’issue de sa peine car il a été déchu de sa nationalité de façon arbitraire.

Ibrahim Karimi a été condamné le 31 mars à deux ans d’emprisonnement et une amende de 2 000 dinars bahreïnites (environ 4 700 euros) par la cinquième juridiction pénale inférieure de Manama, la capitale. Il était inculpé d’« incitation publique à la haine et au mépris contre le régime », « outrage public au roi » et « insulte publique envers l’Arabie saoudite et son roi » sur un compte Twitter (FreejKarimi) dont il assure ne pas être le propriétaire. Ibrahim Karimi a déclaré qu’il avait été contraint à « avouer » les prétendus messages qu’il aurait publiés avant de se rétracter à son procès et de nier toutes les charges liées à ce compte Twitter. Amnesty International estime qu’Ibrahim Karimi n’a été condamné que pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression et ne pense pas qu’il ait utilisé ni prôné la violence. Cet homme est un prisonnier d’opinion.

Ibrahim Karimi a aussi été condamné à un mois de prison et une amende de 100 dinars bahreïnites (environ 230 euros) pour « possession d’un appareil administrant des décharges électriques sans autorisation du ministère de l’Intérieur ». Il a été transféré à la prison de Jaw, dans le sud-est de Bahreïn, pour purger sa peine. Son avocat a interjeté appel des deux décisions et le procès en appel s’ouvrira le 4 mai.

Dans le cadre d’une autre affaire, la Cour d’appel siégeant à Manama a confirmé l’arrêté d’expulsion concernant Ibrahim Karimi le 8 mars. Le ministère de l’Intérieur lui avait retiré sa nationalité de façon arbitraire le 7 novembre 2012 au titre de l’article 10 (c) de la Loi relative à la citoyenneté parce qu’il avait « porté atteinte à la sûreté de l’État », faisant de lui un apatride puisqu’il n’a pas d’autre nationalité. Il risque d’être expulsé de Bahreïn immédiatement à l’issue de sa peine.

Des policiers en civil ont arrêté Ibrahim Karimi à son domicile dans le village d’al Dair, le 26 septembre 2015. Selon sa famille, les policiers n’ont présenté aucun mandat d’arrêt, ont fouillé son domicile et sa voiture et ont saisi des téléphones portables appartenant à cet homme et à des membres de sa famille, ainsi qu’un appareil de la taille d’un stylo qui administre des décharges électriques. Ils l’ont ensuite conduit à la Direction des enquêtes criminelles (CID), où il a été interrogé, en l’absence d’un avocat, sur les commentaires publiés sur un compte Twitter (FreejKarimi), critiquant les autorités saoudiennes pour leur gestion « incompétente » de la bousculade qui a causé en septembre 2015 la mort de centaines de personnes lors du Hajj, le pèlerinage religieux des musulmans à La Mecque. Il a nié être le propriétaire de ce compte. Lors de son interrogatoire à la CID, il a déclaré avoir été placé à l’isolement, privé de sommeil et obligé à rester debout. Il a dit à son avocat qu’il avait signé des « aveux » après que les personnes l’ayant interrogé l’avaient insulté et menacé d’arrêter son fils s’il n’avouait pas les faits qui lui étaient reprochés. Il leur a indiqué qu’il possédait un appareil administrant des décharges électriques et a plaidé coupable pour ce chef. Sa famille a expliqué à Amnesty International qu’il avait acheté cet appareil à Doubaï en 2001 afin que sa femme l’utilise en cas d’agression. Or, il est illégal d’en posséder à Bahreïn depuis 2008.

Après son interrogatoire, Ibrahim Karimi a été transféré à la prison de Dry Dock, dans le nord-est de Manama. Il a dit à sa famille que les gardiens avaient menacé d’en faire un exemple pour les autres détenus et de le faire « disparaître ». Son procès s’est ouvert le 31 janvier et à l’avant-dernière audience, le 17 mars, le tribunal n’a pas permis à la défense de citer des témoins.

Ibrahim Karimi a été débouté de son recours contre son ordre d’expulsion le 8 mars. Le ministère de l’Intérieur l’a déchu arbitrairement de sa nationalité le 7 novembre 2012, ainsi que 30 autres personnes, pour « atteinte à la sûreté de l’État » en vertu de l’article 10 (c) de la Loi relative à la citoyenneté. Parmi eux figuraient des militants vivant à l’étranger, un avocat, plusieurs personnes participant à la vie politique à Bahreïn, plusieurs religieux chiites et des personnes n’ayant aucune affiliation politique ou religieuse. Les 31 personnes n’ont pas été officiellement informées de cette décision et l’ont apprise à travers les médias lorsque cela a été annoncé. La plupart de ceux qui vivent à Bahreïn, y compris Ibrahim Karimi, n’ont pas d’autre nationalité et se retrouvent apatrides de fait.

Le gouvernement a forcé l’une de ces personnes, Shaikh Hussain al Najati, à quitter le pays le 23 avril 2014. Le 28 octobre 2014, un tribunal de première instance a ordonné l’expulsion des personnes toujours sur le territoire et ne possédant que la nationalité bahreïnite. Leurs avocats se sont pourvus en appel le lendemain et l’ordre d’expulsion a été suspendu jusqu’à ce que le tribunal statue sur cette affaire. Depuis 2012, le ministère de l’Intérieur et les tribunaux ont arbitrairement retiré leur nationalité à des centaines de personnes.

L’article 10 de la Loi relative à la citoyenneté et ses amendements disposent que la nationalité peut être révoquée si une personne s’engage dans l’armée d’un pays étranger (paragraphe A), si elle aide un pays ennemi ou se met à son service (paragraphe B), ou si elle nuit à la sécurité nationale (paragraphe C). Cette dernière notion n’est pas explicitée. Ce paragraphe, utilisé pour révoquer la nationalité des 31 individus concernés, est formulé en des termes trop vagues et peut donc servir à sanctionner l’exercice légitime et pacifique des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion.

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