Écrire Le harcèlement des défenseurs des droits humains doit cesser

Le 17 juillet, le tribunal pénal du Caire doit examiner une décision de justice ordonnant le gel des avoirs de cinq défenseurs des droits humains de premier plan, de membres de leur famille, d’une ONG et de son personnel.

Ces personnes et d’autres militants influents sont poursuivis dans le cadre de l’affaire n° 173 de l’année 2011, dite « affaire des financements étrangers ». S’ils sont déclarés coupables, ils encourent une peine pouvant aller jusqu’à la réclusion à perpétuité.

Le 17 juillet, le tribunal pénal du Caire examinera une décision de justice ordonnant le gel des avoirs des personnes suivantes : Hossam Bahgat, fondateur et membre du conseil d’administration de l’Initiative égyptienne pour les droits de la personne, Gamal Eid, fondateur du Réseau arabe pour l’information sur les droits humains, sa femme et sa fille, Bahey el Din Hassan, directeur de l’Institut du Caire pour l’étude des droits de l’homme (CIHRS), certains membres de sa famille et du personnel du CIHRS, Mostafa al Hassan, directeur du Centre Hisham Moubarak pour le droit, et Abdel Hafez Tayel, directeur du Centre égyptien pour le droit à l’éducation. Une demande de gel des avoirs du CIHRS a également été déposée.

La militante des droits des femmes Mozn Hassan, fondatrice et directrice exécutive du groupe Nazra pour les études féministes, fait l’objet d’une interdiction de sortie du territoire depuis le 27 juin. Le bureau des passeports de l’aéroport du Caire ne lui a pas précisé le motif de cette interdiction, mais seulement indiqué que le ministère public l’avait ordonnée.

Mozn Hassan figure parmi les prévenus de l’affaire n° 173. Une interdiction de sortie du territoire a également été prononcée le 20 juin contre Hoda Abd El Wahab, directrice exécutive du Centre arabe pour l’indépendance du pouvoir judiciaire et des professions juridiques, sur ordre d’un juge dans l’affaire n° 173. L’enquête étudie les sources de financement et d’enregistrement d’ONG égyptiennes.

L’article 78 du Code pénal égyptien sanctionne d’une peine de 25 ans d’emprisonnement et d’une amende de 500 000 Livres égyptiennes (environ 49 000 euros) le fait de recevoir de l’argent ou du matériel destinés à des actes qui porteraient atteinte aux « intérêts nationaux » de l’Égypte, menaceraient l’« intégrité territoriale » du pays ou troubleraient l’« ordre public ». Les dispositions de la législation égyptienne qui restreignent l’accès au financement étranger ont été critiquées à plusieurs reprises par différents organes de l’ONU car elles portent atteinte à la liberté d’association. Le droit à la liberté d’association est garanti par l’article 75 de la Constitution égyptienne de 2014 et par l’article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP). Le droit de circuler librement est garanti par l’article 62 de la Constitution égyptienne et l’article 12 du PIDCP.

Les interdictions de sortie du territoire sont utilisées de manière arbitraire par les autorités égyptiennes pour intimider et faire taire leurs détracteurs.

Mohamed Zaree, directeur pour l’Égypte de l’Institut du Caire pour l’étude des droits de l’homme (CIHRS), a appris le 26 mai à l’aéroport du Caire qu’il faisait l’objet d’une interdiction de sortie du territoire. Il n’a obtenu aucune information quant à l’autorité qui a ordonné cette mesure et l’affaire à laquelle elle est liée, mais il a déclaré à Amnesty International que l’« affaire des financements étrangers » était la seule explication possible.

Le 15 juin, le tribunal pénal du nord du Caire a statué en faveur du gel des avoirs de l’Institut Al Andalus pour les études consacrées à la tolérance et à la lutte contre la violence et de son directeur, Ahmed Samih. Ce dernier n’a pris connaissance de la demande de gel de ses avoirs que le 12 juin, en lisant un journal d’État où il était indiqué qu’elle émanait des juges enquêtant sur l’enregistrement et le financement de plusieurs ONG dans le cadre de l’affaire n° 173.

Les autorités ont par ailleurs tenté à plusieurs reprises d’obtenir la fermeture du Centre El Nadeem pour le traitement et la réadaptation des victimes de violence, en l’accusant de travailler sans autorisation bien qu’il soit agréé en tant qu’établissement médical depuis 1993.

Nombre des organisations ciblées sont autorisées sous une forme ou une autre, notamment en tant qu’organisations à but non lucratif, cabinets d’avocats ou établissements médicaux. Cependant, certaines ont préféré délocaliser leur personnel hors d’Égypte ou réduire leurs activités, plutôt que de se faire enregistrer au titre de la contraignante Loi relative aux associations, héritée du régime d’Hosni Moubarak. Cette loi confère au gouvernement le pouvoir de fermer une association quasiment au gré de sa volonté, de geler ses avoirs, de saisir ses biens et de refuser des candidats à son conseil d’administration.

Toutefois, même des organisations enregistrées n’ont pas échappé à une enquête : c’est le cas de l’Académie égyptienne pour la démocratie (EDA), une organisation faisant la promotion de la démocratie et des droits humains dans le pays, enregistrée en janvier 2015, et de Nazra pour les études féministes, qui l’est depuis 2007. Des interdictions de sortie du territoire ont été imposées à quatre personnes ayant travaillé ou travaillant encore pour l’EDA : la militante politique Esraa Abdel Fattah, ainsi que Hossameldin Ali, Ahmed Ghonim et Bassim Samir.

Le 19 avril, le bureau du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki Moon, a publié une déclaration à propos de la répression subie par les organisations de défense des droits humains en Égypte, appelant les autorités à veiller à ce que les prévenus bénéficient de « procédures régulières et des normes d’équité des procès ». En mars, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme s’est dit « gravement préoccupé » au sujet de la situation à laquelle sont confrontées les associations égyptiennes de défense des droits humains.

Le gouvernement militaire égyptien a commencé à enquêter sur des organisations de défense des droits humains en 2011. En décembre 2011, des procureurs accompagnés d’agents des forces de sécurité ont effectué des descentes dans les locaux de cinq ONG internationales et de deux organisations égyptiennes de défense des droits humains.

En 2012, 43 membres du personnel d’ONG internationales ont été jugés pour avoir travaillé sans avoir été enregistrés et pour avoir reçu des financements étrangers sans autorisation du gouvernement. En juin 2013, le tribunal a condamné tous les prévenus à des peines allant d’un à cinq ans d’emprisonnement. Il a prononcé la plupart des condamnations en l’absence des prévenus et a condamné les quelques personnes présentes à des peines avec sursis.

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