Écrire Les autorités ne doivent pas renvoyer un demandeur d’asile gay au Ghana

Sadat I., qui a fui le Ghana, où il était la cible d’attaques homophobes de la part d’un groupe criminel, est détenu par le service de l’immigration des États-Unis depuis qu’il a demandé l’asile dans ce pays, en janvier 2016. Les autorités américaines cherchent à le renvoyer contre son gré au Ghana, où il risquerait d’être soumis à des violations de ses droits fondamentaux par la police et par les groupes qu’il a fuis. Sadat doit bénéficier immédiatement d’une libération conditionnelle, dans l’attente de l’issue de sa demande d’asile, et ne doit en aucun cas être renvoyé au Ghana.

Sadat I., 31 ans, homosexuel originaire du Ghana, est détenu par le Service de contrôle de l’immigration et des douanes (ICE) depuis qu’il a demandé l’asile à la frontière entre les États-Unis et le Mexique le 17 janvier 2016 ; il se trouve actuellement à Pearsall, au Texas. Sadat a fui le Ghana en novembre 2015, après avoir été frappé par des membres de la micile Safety Empire, qui ont incendié sa maison et battu son oncle trois jours plus tard, alors que Sadat se cachait.

Les miliciens ont appris que Sadat était homosexuel après avoir roué de coups et interrogé son compagnon, et ont mis en ligne une vidéo de ce passage à tabac sur la page Facebook du dirigeant de Safety Empire. Le groupe a de nouveau posté la vidéo en avril 2017, qui a été vue plus de 53 000 fois, révélant au public l’homosexualité de Sadat. Le dirigeant du groupe est toujours en liberté au Ghana, où il continue à menacer la communauté gay.

L’homosexualité reste une infraction pénale au Ghana, et la police s’abstient systématiquement de poursuivre et de sanctionner les auteurs d’attaques contre des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres (LGBT). Des éléments prouvent que Sadat, en cas de renvoi au Ghana, risquerait d’y être persécuté, emprisonné, voire tué. Pourtant, les autorités américaines ont refusé de lui accorder une libération conditionnelle et cherchent à l’expulser, affirmant qu’il n’a pas réussi à prouver qu’il serait encore en danger au Ghana. La famille de Sadat lui a envoyé une vidéo pour qu’il puisse prouver la persistance du risque de persécution, mais le Service de contrôle de l’immigration et des douanes a retiré la vidéo de son colis sans l’en informer.

Lorsqu’il a rejeté le recours formé par Sadat en novembre 2017, le juge de l’immigration a déclaré que même si les agents du service de l’immigration avaient occulté cette preuve, Sadat n’avait pas contacté sa famille pour qu’elle confirme l’avoir envoyée. Sadat a observé deux grèves de la grève en février 2018 pour dénoncer les conditions déplorables dans lesquelles se déroulait sa détention prolongée. Selon ses avocats, le service de l’immigration a exercé des représailles contre Sadat en raison de ses grèves de la faim.

La détention ne doit être utilisée qu’en dernier recours par les autorités chargées de l’immigration, après une appréciation au cas par cas. La libération conditionnelle doit être accordée pour des raisons humanitaires lorsque la personne ne constitue pas une menace pour la sécurité publique et ne présente aucun risque de fuite. Aucun demandeur d’asile ne doit être renvoyé contre son gré dans un pays où il court un risque réel de subir des actes de torture ou d’autres mauvais traitements, y compris d’être emprisonné sur la base d’un motif illicite de discrimination, comme l’orientation sexuelle. Sadat remplissant tous ces critères, les autorités américaines doivent le libérer immédiatement et ne doivent pas le renvoyer au Ghana.

Au regard du droit international, les États-Unis sont tenus de veiller à ce que les droits humains des migrants et des demandeurs d’asile soient respectés, protégés et concrétisés. Le droit et les normes internationaux, y compris les instruments auxquels ce pays est partie, sont fortement défavorables à la détention pour des motifs liés à l’immigration.

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) proclame clairement le droit de ne pas être détenu arbitrairement. La détention ne doit être utilisée qu’en dernier recours ; elle doit être justifiée pour chaque personne concernée et contrôlée par les autorités judiciaires. Elle n’est adaptée que lorsque les autorités peuvent faire la preuve dans chaque cas qu’une telle mesure est nécessaire et proportionnée à l’objectif visé, que les motifs invoqués sont prévus par la loi et que d’autres mesures (obligation de se présenter régulièrement aux autorités ou libération sous caution, par exemple) ne seraient pas efficaces.

Dans son rapport de juillet 2017 sur sa visite aux États-Unis, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a estimé que la détention obligatoire des immigrants, en particulier des demandeurs d’asile, était contraire aux normes internationales relatives aux droits humains et aux droits des réfugiés. Il a fait observer que le système actuel de détention des immigrants et des demandeurs d’asile était, dans bien des cas, punitif, déraisonnablement long, inutile et coûteux alors qu’il existait d’autres solutions au sein de la collectivité, [et] non fondé sur une évaluation individualisée de la nécessité et de la proportionnalité de la détention, réalisée dans des conditions dégradantes et dissuasive à l’égard de demandes d’asile légitimes.

En vertu du PIDCP, de la Convention contre la torture et du droit international coutumier, les États-Unis sont tenus de ne pas renvoyer des personnes vers des pays où elles risquent d’être victimes de torture ou d’autres graves atteintes à leurs droits fondamentaux : c’est le principe de non-refoulement. Ces garanties sont impératives pour protéger les réfugiés qui fuient les violences et les persécutions.

Dans un rapport daté du 28 février 2018, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants a estimé qu’une détention prolongée fondée uniquement sur la situation au regard de la législation sur l’immigration était assimilable à une « détention arbitraire » et constituait souvent rapidement, sinon immédiatement, une forme de mauvais traitements, en particulier pour les demandeurs d’asile LGBTI, entre autres groupes vulnérables.

Aux termes de la législation américaine, toute personne appréhendée à la frontière « doit être placée en détention » dans l’attente d’une procédure d’expulsion. Le droit des États-Unis dispose que ces personnes peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle accordée au cas par cas pour des « raisons d’urgence humanitaire » ou des « raisons d’utilité publique notables », lorsque les intéressés ne constituent aucunement une menace pour la sécurité et ne risquent pas de s’enfuir.

Le Service de contrôle de l’immigration et des douanes (ICE) laisse à la discrétion des directeurs et directrices de ses bureaux locaux la décision d’accorder aux personnes dont les craintes semblent fondées une telle libération conditionnelle au cas par cas – qui s’applique aux personnes dont le maintien en détention n’est pas d’utilité publique –, ainsi que celle de prolonger la détention de personnes en situation d’urgence médicale. Ces pouvoirs discrétionnaires leur permettent de décider qui détenir ou libérer sous caution, surveillance ou autres conditions.

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