Écrire Levée partielle d’un couvre-feu mais des personnes restent en danger

Le 19 janvier, le couvre-feu mis en place 24 heures sur 24 depuis le 14 décembre 2015 à Silopi, dans la province de ??rnak (sud-est de la Turquie), a été réduit. Il s’applique désormais uniquement de 18 heures à 5 heures du matin. Des couvre-feux sont encore en vigueur jour et nuit pour une durée indéterminée à Cizre (également dans la province de ??rnak) et dans le district de Sur à Diyarbak ?r.

Le 18 janvier, le gouverneur de la province de ??rnak a annoncé que le couvre-feu concernant Silopi était levé entre 5 heures et 18 heures. Sur des images de la ville filmées depuis cette levée partielle et diffusées dans les médias, on peut voir des habitations et d’autres bâtiments endommagés au point d’être inutilisables. Un avocat installé sur place a déclaré à Amnesty International qu’à cause des importants dégâts subis par les infrastructures, l’approvisionnement en eau et en électricité n’est pas complètement rétabli.

L’eau apportée par des camions-citernes dans certains quartiers ne suffit pas à couvrir les besoins des habitants. Les principaux postes électriques ayant été très abîmés, les coupures de courant sont fréquentes.

Selon l’avocat, les denrées alimentaires continuent aussi de manquer. La plupart des commerces de la rue principale de Silopi ont été gravement endommagés et la circulation est très ralentie sur les axes routiers desservant la ville car les couvre-feux et les opérations sécuritaires se poursuivent dans la localité voisine de Cizre.

La ville de Cizre (province de ??rnak) est soumise à un couvre-feu depuis le 14 décembre car les forces de sécurité ont lancé des opérations militaires contre le Mouvement de la jeunesse patriotique révolutionnaire (YDG-H), un groupe armé affilié au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Des avocats et des militants locaux ont expliqué à Amnesty International que plus de 40 personnes, parmi lesquelles des femmes, des enfants et des personnes âgées, avaient été tuées à Cizre depuis l’instauration du couvre-feu, dont beaucoup par des tireurs d’élite des forces de sécurité. Dans le district de Sur, à Diyarbak ?r, six quartiers sont soumis à un couvre-feu depuis le 11 décembre. Des avocats ont signalé que 13 habitants au moins avaient été tués. Environ la moitié de la population du district se serait réfugiée dans des quartiers voisins où le couvre-feu n’est pas en vigueur. Les manifestations et les veillées organisées chaque jour hors des zones sous couvre-feu sont régulièrement dispersées par la police au moyen de gaz lacrymogène et de canons à eau, et des protestataires sont arrêtés.

Dans toutes les zones sous couvre-feu, de nombreux habitants doivent faire face à de graves pénuries d’eau et d’électricité et ne peuvent quitter leur domicile pour se procurer des aliments de base. Ceux qui ont besoin de soins médicaux ne peuvent se rendre dans d’autres quartiers pour en bénéficier. Il arrive parfois que les ambulances ne parviennent pas à entrer dans les zones sous couvre-feu en raison de l’insécurité ou parce que les services de sécurité leur en refusent l’accès.

Depuis l’échec du processus de paix entre le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et le gouvernement en juillet, des affrontements armés entre le Mouvement de la jeunesse patriotique révolutionnaire (YDG-H), affilié au PKK, et les forces de sécurité ont lieu dans des zones urbaines du sud-est de la Turquie.

Selon le ministre de l’Intérieur, plus de 3 000 « terroristes » ont été tués lors de la dernière flambée de violence. À la mi-décembre, les combats se sont intensifiés à la suite du déploiement massif de policiers et de militaires dans la région.

Dans les villes où les forces de sécurité mènent des opérations contre l’YDG-H, les municipalités et les autorités de district ont imposé un couvre-feu qui contraint les habitants à rester chez eux jour et nuit. Elles estiment que ces mesures sont nécessaires pour permettre « la capture des membres de l’organisation terroriste séparatiste [le PKK] et assurer la sécurité des personnes et des biens ».

La Turquie est tenue de faire respecter le droit de circuler librement. Bien que ce droit puisse connaître certaines limites, toute restriction doit être nécessaire et proportionnée, prévue par la loi et imposée à une fin légitime. Le maintien de l’ordre public peut constituer une raison légitime. Cependant, le couvre-feu en vigueur jour et nuit pour une durée indéterminée qui dure depuis plus de quatre semaines dans plusieurs localités est une restriction disproportionnée et entraîne des violations d’autres droits humains. Toutes les mesures de sécurité doivent être nécessaires et proportionnées pour être légales. Des coupures d’eau ont été signalées dans toutes les zones sous couvre-feu. La privation d’eau et d’électricité constitue une mesure disproportionnée. En outre, le fait d’empêcher les habitants de se réfugier ailleurs ne peut se justifier au nom de la sécurité.

Aux termes des normes internationales protégeant le droit à la vie, les agents chargés de l’application des lois ne doivent avoir recours à la force meurtrière, et plus particulièrement aux armes à feu, qu’en cas de légitime défense ou pour défendre des tiers contre une menace imminente de mort ou de blessure grave. Il ne doit y avoir de recours intentionnel à l’usage meurtrier d’armes à feu que si cela est absolument inévitable pour protéger des vies humaines (article 9 des Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois).

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