Écrire Un accord Etats-Unis-Mexique sur l’asile mettrait un grand nombre de personnes en danger

Dans le cadre de négociations à huis clos engagées récemment, les États-Unis et le Mexique envisagent de reconnaître au Mexique le statut de « pays tiers sûr ». Cela empêcherait tous les demandeurs d’asile qui transitent par le Mexique de solliciter une protection auprès des États-Unis, et les obligerait à rester au Mexique, pays dangereux et sous-équipé. Cet accord risque d’être conclu au cours des semaines à venir, mettant des milliers de personnes en danger.

Ces derniers mois, des représentants de l’administration Trump ont réaffirmé publiquement qu’ils souhaitaient déclarer le Mexique « pays tiers sûr ». Un tel accord mettrait en péril des milliers de personnes qui transitent par le Mexique, car elles seraient contraintes de demander l’asile dans ce pays, les États-Unis refusant de les accueillir. Le gouvernement mexicain enfreint fréquemment le droit international des réfugiés et bafoue régulièrement le principe de non-refoulement, qui interdit de renvoyer des personnes vers des situations dans lesquelles leur vie serait en danger.

Le magazine mexicain Proceso a divulgué l’ordre du jour d’une réunion intitulée « Accord entre les États-Unis et le Mexique sur les pays tiers sûrs - Réunions techniques et juridiques » qui s’est tenue les 17 et 18 mai à Washington. Le 10 juillet, le Washington Post a indiqué que les négociations s’accéléraient. Ultérieurement, un diplomate mexicain a également indiqué au magazine Proceso que l’accord pourrait être conclu dès le mois d’août et prévoir l’attribution de fonds américains, probablement destinés à financer l’exercice d’un contrôle migratoire par le Mexique. Aucune information plus précise sur ce financement n’a encore été publiée.

Le nombre de personnes cherchant refuge au Mexique a augmenté ces dernières années. Le système d’asile de ce pays peine à faire face aux demandes. En 2017, il a reçu 14 596 demandes d’asile, contre 8 788 en 2016. La plupart des requêtes émanent de ressortissants de certains des pays les plus violents au monde, comme le Salvador et le Honduras. Dans un récent sondage réalisé par Amnesty International, sur 500 réponses de migrants clandestins d’Amérique centrale transitant par le Mexique, 75 % des personnes arrêtées par les autorités mexicaines chargées des migrations n’avaient pas été informées de leur droit de demander l’asile.

Le droit des États-Unis (Code des États-Unis, S 1158 2 (A)) donne au ministre de la Justice le pouvoir de déterminer les pays considérés comme des « pays tiers sûrs ». Une telle décision va souvent de pair avec la conclusion d’un accord bilatéral avec le pays en question. Amnesty International a reçu de diverses sources des informations selon lesquelles le Département de la sécurité intérieure (DHS) souhaitait modifier la législation afin de donner au secrétaire à la Sécurité intérieure tout pouvoir pour désigner des « pays tiers sûrs ».

Le gouvernement américain a tenté à maintes reprises de déléguer au gouvernement mexicain sa responsabilité internationale en ce qui concerne la protection des réfugiés et des demandeurs d’asile. Le 25 avril, la secrétaire à la Sécurité intérieure, Kirstjen M. Nielsen, a appelé publiquement les demandeurs d’asile d’Amérique centrale à solliciter l’asile au Mexique, les menaçant de poursuites pénales s’ils s’approchaient de la frontière des États-Unis. Le 1er mai, le vice-président américain, Mike Pence, a demandé l’aide du Congrès américain pour garantir que les demandeurs d’asile passant par d’autres pays sûrs restent dans le premier pays où ils se rendent. L’accord pourrait être conclu dans les semaines à venir, ce qui mettrait des milliers de personnes en danger et signifierait que toutes les frontières terrestres des États-Unis seraient fermées aux personnes en quête d’asile.

Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), entre 400 000 et 500 000 personnes entrent chaque année au Mexique par la frontière méridionale de ce pays, et au moins la moitié de ces personnes pourraient avoir besoin d’une protection internationale en tant que réfugiés. Beaucoup d’entre elles viennent du Salvador, du Honduras et du Guatemala, pays qui comptent parmi les plus dangereux au monde. En 2017, le Mexique a reçu 14 596 demandes d’asile, dont 4 272 émanant de ressortissants du Honduras, 4 042 de ressortissants du Venezuela et 3 708 de ressortissants du Salvador.

Amnesty International a récemment publié un rapport intitulé Overlooked, Under-Protected : Mexico’s Deadly Refoulement of Central American Asylum Seekers , où elle montre que le gouvernement mexicain s’abstient régulièrement de respecter ses obligations conventionnelles en droit international, en vertu desquelles il est tenu de protéger les personnes qui ont besoin d’une protection internationale. En outre, les enlèvements, les meurtres, les disparitions et les agressions sont monnaie courante pour les migrants en situation irrégulière qui transitent par le Mexique. Si les États-Unis devaient déléguer au Mexique toutes les demandes d’asile qu’ils reçoivent, cela augmenterait le nombre de demandeurs d’asile exposés à ces dangers, surtout s’ils sont renvoyés dans les zones situées le long de la frontière mexicaine, parmi les plus violentes du pays.

Pour plus d’informations, consultez la page : https://www.amnesty.org/en/documents/amr41/7602/2018/en/

Le HCR s’inquiète depuis longtemps de l’application des accords relatifs aux « pays tiers sûrs » et de la nécessité de veiller à ce que ces accords ne violent pas directement ou indirectement le principe de non-refoulement (expulsion vers des pays où les demandeurs d’asile risqueraient d’être victimes de persécution). Amnesty International s’oppose à ces politiques car elles remettent en cause la notion de partage des responsabilités en cas de crise des réfugiés, ainsi que l’obligation de prendre des décisions au cas par cas pour les demandes d’asile au lieu de considérer celles de tous les ressortissants de certains territoires comme irrecevables.

Par le passé, le Mexique et les États-Unis ont déjà conclu des accords bilatéraux qui ont abouti à l’attribution de fonds américains au gouvernement mexicain. En 2007, le président George W. Bush et le président mexicain Felipe Calderon ont signé l’Initiative de Mérida, programme d’aide à la sécurité qui reste en vigueur à ce jour et a permis au Mexique d’obtenir un financement de 2,5 milliards de dollars. Les négociations en cours sur un accord de « pays tiers sûr » pourraient être prises en compte pour la réévaluation de l’enveloppe destinée à financer l’Initiative de Mérida.

Action terminée

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit