Écrire Un chef bédouin rejette sa libération conditionnelle

La libération anticipée de Sayyah Abu Mdeighim al Turi, dirigeant bédouin de premier plan, était prévue pour le 15 mai 2019. Cependant, ce jour-là, la police israélienne a demandé à l’administration pénitentiaire israélienne d’assortir sa libération de deux conditions. Premièrement, Sayyah Abu Mdeighim al Turi devait s’engager à ne pas vivre dans son village, Al Araqib, situé dans le Naqab/Néguev, dans le sud d’Israël. Deuxièmement, il devait s’engager à respecter un régime d’assignation nocturne au domicile de sa famille dans la ville de Rahat jusqu’en octobre 2019, date de la fin de la peine d’emprisonnement a laquelle il a initialement été condamné. La première condition a été abandonnée à la suite de l’intervention de son avocat. Sayyah Abu Mdeighim al Turi a a refusé la deuxième et n’a donc pas été libéré.

Sayyah Abu Mdeighim al Turi, 69 ans, est né à al Araqib, un village du Naqab/Néguev, dans le sud d’Israël. Il est le chef de ce village, que les autorités israéliennes considèrent comme illégal. Il joue également un rôle de premier plan dans la lutte pour le droit des habitants d’al Araqib à un logement convenable et, plus généralement, pour la défense des droits des Bédouins à la terre dans le Néguev/Naqab.

Le 24 décembre 2017, le tribunal de première instance de Beersheba l’a déclaré coupable de 19 chefs de violation de propriété privée, de 19 chefs d’entrée illégale sur des terres publiques et d’un chef d’infraction à la loi. Le tribunal l’a condamné à 10 mois d’emprisonnement assortis de cinq mois de mise à l’épreuve et d’une amende de 36 000 nouveaux shekels (9 700 dollars des États-Unis) Le 21 novembre 2018, la Cour suprême israélienne a rejeté le recours formé par Sayyah Abu Mdeighim al Turi. Le 25 décembre 2018, Sayyah Abu Mdeighim al Turi a commencé à purger une peine de 10 mois d’emprisonnement en raison du rôle qu’il a joué dans la lutte non violente pour la défense des droits des Bédouins en Israël.

Le village d’al Araqib est situé au nord de Beersheba, dans le désert du Néguev/Naqab (sud d’Israël), au milieu d’un vaste projet de boisement qui s’étend sur plus de 200 hectares, géré par le Fonds national juif (FNJ), une organisation israélienne semi-publique. Selon le Forum pour la coexistence dans le Néguev, une ONG israélienne qui se consacre exclusivement aux problèmes auxquels sont confrontés les habitants du Néguev, le village d’al Araqib a été fondé pendant la période ottomane, sur des terres acquises à l’époque par les personnes qui y vivaient. Au début des années 1950, les habitants d’al Araqib ont été déplacés de force après que le village eut été déclaré zone militaire. Dans les années 1970, les habitants ont déposé auprès des autorités israéliennes de nombreuses demandes de reconnaissance de propriété foncière, mais celles-ci ont toutes été rejetées. Au début des années 2000, les habitants sont retournés vivre sur leurs terres à al Araqib, mais sans l’autorisation des autorités israéliennes, ce qui fait que le village n’a pas été officiellement reconnu. Le 27 juillet 2010, les forces israéliennes ont rasé le village, et depuis lors, al Araqib a été détruit au moins 144 fois. Au moins 400 personnes vivaient dans le village avant sa démolition, selon le Forum pour la coexistence dans le Néguev. Depuis, la population a diminué et les villageois vivent maintenant dans une zone voisine, où ils ont été contraints de s’établir en raison des démolitions répétées.

Faute de services de santé et d’éducation dans le village, les habitants doivent se rendre dans la ville de Rahat, à six kilomètres de là, pour accéder à ces services. De plus, le village n’est pas relié aux réseaux israéliens d’approvisionnement en eau et en électricité, ce qui oblige les habitants à utiliser des groupes électrogènes privés et des panneaux solaires, et à acheter de l’eau apportée par camion à un prix nettement supérieur à la normale.

Depuis neuf ans, les habitants d’al Araqib manifestent pacifiquement chaque semaine pour réclamer la reconnaissance officielle de leur droit de propriété sur leurs terres et pour commémorer la démolition de leur village. Sayyah Abu Mdeighim al Turi était à la tête de ce mouvement, ce qui a valu à des membres de sa famille d’être arrêtés et interrogés à plusieurs reprises pour des infractions présumées de violation de propriété privée et d’utilisation illégale de terrains publics. Deux des fils de Sayyah Abu Mdeighim al Turi, Saif et Aziz, sont actuellement jugés pour des infractions similaires.

La condamnation et l’emprisonement de Sayyah Abu Mdeighim al Turi s’inscrivent dans le contexte d’une lutte qui oppose depuis des années l’État d’Israël et les Bédouins du Néguev. Al Araqib fait partie des quelque 40 villages palestiniens qui sont situés en Israël, souvent dans le désert du Néguev, et qui ne sont pas reconnus par les autorités israéliennes alors que leurs habitants détiennent la nationalité israélienne et qu’ils ont des droits sur leurs terres depuis longtemps.

Les actes commis par les autorités israéliennes à Al Araqib violent systématiquement le droit des villageois à un logement convenable, droit humain consacré par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui est juridiquement contraignant pour Israël. Amnesty International a condamné à maintes reprises les démolitions destinées à expulser de force les habitants d’al Araqib des terres sur lesquelles ils vivent depuis des générations.

LIEN VERS L’AU PRÉCÉDENTE : https://www.amnesty.org/fr/documents/mde15/9702/2019/fr/

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