Écrire Un homme arrête alors qu’il était mineur risque d’être exécuté sous peu

Himan Uraminejad, un jeune iranien sous le coup d’une condamnation à mort prononcée alors qu’il était mineur, a été informé qu’il serait exécuté peu après le 1er avril, une fois passés les 13 jours de célébration du Nouvel An iranien.

Himan Uraminejad a été condamné à mort en août 2012 après avoir été déclaré coupable d’avoir poignardé à mort un autre garçon lors d’une bagarre. Âgé de 17 ans au moment des faits, il en a aujourd’hui 21. Il se trouve dans le quartier des condamnés à mort de la prison de Sanandaj, dans la province du Kurdistan occidental, où il a été informé qu’il serait exécuté après les célébrations du Nouvel An iranien, qui se terminent le 1er avril.

Rejugé en juin 2015, il a été de nouveau condamné à mort. Le deuxième procès, qui s’est déroulé devant la neuvième chambre du tribunal pénal de la province du Kurdistan, avait été ordonné par la Cour suprême en septembre 2014 sur la base des nouvelles dispositions du Code pénal islamique de 2013 concernant la condamnation des mineurs. Celles-ci autorisent les tribunaux à remplacer la peine de mort par un autre châtiment s’ils estiment qu’un mineur délinquant n’avait pas conscience de la nature de son crime ou de ses conséquences, ou s’il existe des doutes quant à « son développement et sa maturité psychologiques » au moment des faits. Le tribunal a fait usage de ce pouvoir discrétionnaire afin de condamner de nouveau Himan Uraminejad à mort.

Dans sa décision, il n’a pas tenu compte de l’interdiction absolue faite par le droit international d’avoir recours à la peine capitale dans le cas d’une personne qui était âgée de moins de 18 ans au moment des faits qui lui sont reprochés ni des principes fondamentaux de la justice des mineurs, en vertu desquels toute personne de moins de 18 ans doit être considérée comme mineur. Au lieu de cela, il s’est concentré sur la « santé mentale » de Himan Uraminejad, en s’appuyant sur un avis médical de juin 2015 selon lequel aucun élément n’attestait la présence, au moment du crime, d’un quelconque trouble qui abolirait la responsabilité pénale de l’accusé. Il s’est également fondé sur des déclarations de Himan Uraminejad confirmant qu’il ne présentait pas de pathologie mentale ni d’antécédent d’hospitalisation en psychiatrie. La Cour suprême a abondé en ce sens en novembre 2015.

La procédure judiciaire ayant abouti à la condamnation de Himan Uraminejad était manifestement inique. En effet, ce jeune homme a admis avoir poignardé la victime alors qu’il était interrogé sans la présence d’un avocat. Il a, semble-t-il, été torturé dans un centre de détention de la police (agahi) ; plusieurs passages à tabac lui ont d’ailleurs laissé des cicatrices et des ecchymoses sur tout le corps, y compris au visage. Par ailleurs, il a été jugé par un tribunal pour adultes et n’a donc pas bénéficié de la protection prévue par la justice des mineurs. À la connaissance d’Amnesty International, aucune enquête n’a été menée sur les allégations de torture et autres mauvais traitements que Himan Uraminejad a formulées.

En tant qu’État partie à la Convention relative aux droits de l’enfant, l’Iran a l’obligation légale de traiter comme un mineur toute personne âgée de moins de 18 ans. Il s’agit d’une notion différente de celle de l’âge minimum de responsabilité pénale, qui correspond à l’âge en dessous duquel les enfants sont présumés ne pas avoir la capacité d’enfreindre la loi. Celui-ci varie selon les pays mais d’après le Comité des droits de l’enfant des Nations unies, il ne doit pas être inférieur à 12 ans. Les délinquants ayant plus que l’âge minimum de responsabilité pénale mais moins de 18 ans peuvent être considérés comme pénalement responsables et poursuivis, jugés et punis. Cependant, ils ne doivent jamais être condamnés à la peine capitale ni à la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération.

En Iran, l’âge de la responsabilité pénale est fixé à neuf années lunaires pour les filles, contre 15 pour les garçons. Passé cet âge, un mineur déclaré coupable d’une infraction relevant des hodoud (crimes contre la volonté de Dieu, passibles de peines incompressibles imposées par la charia) ou du principe de qisas (réparation pour un acte criminel) est généralement condamné comme un adulte. Cependant, depuis l’adoption du nouveau Code pénal islamique en 2013, les juges ont la possibilité de ne pas condamner à mort un mineur délinquant s’ils estiment qu’il n’avait pas conscience de la nature de son crime ou de ses conséquences, ou s’il existe des doutes quant à « son développement et sa maturité psychologiques » au moment des faits.

Néanmoins, les critères d’évaluation de cet état mental sont peu clairs et arbitraires. Les juges doivent obtenir l’avis de l’Organisation iranienne de médecine légale, institution étatique, ou se reposer sur leur propre évaluation quand bien même ils ne disposeraient pas des connaissances ni de l’expertise nécessaires dans le domaine de la psychologie des mineurs. Amnesty International a recueilli des informations sur plusieurs affaires concernant des mineurs délinquants où les juges ont fait l’amalgame entre la responsabilité atténuée des mineurs due à leur manque de maturité et celle des personnes souffrant de handicap intellectuel ou de troubles mentaux, concluant alors que l’accusé ne souffrait pas de « folie » et qu’il était « en bonne santé mentale et émotionnelle », et que par conséquent, il méritait la mort.

En janvier dernier, le Comité des droits de l’enfant des Nations unies a examiné le bilan de l’Iran en termes d’application de la Convention relative aux droits de l’enfant. Dans ses observations finales, il s’est déclaré « extrêmement préoccupé » par le fait que la décision de ne pas condamner à mort un mineur délinquant soit laissée « à l’entière discrétion des juges, qui ont la possibilité, mais non l’obligation, de demander une expertise médico-légale, ainsi que par les nouvelles condamnations à mort prononcées à l’issue de tels procès ». Outre Himan Uraminejad, Amnesty International a connaissance d’au moins sept mineurs délinquants – Salar Shadizadi, Hamid Ahmadi, Sajad Sanjari, Siavash Mahmoudi, Amir Amrollahi et Fatemeh Salbehi – qui ont été rejugés, considérés comme présentant un niveau suffisant « de développement et de maturité psychologiques » au moment des faits et de nouveau condamnés à la peine capitale. Fatemeh Salbehi, âgée de 17 ans à l’époque de l’infraction, a été mise à mort en octobre 2015.

À la connaissance d’Amnesty International, au moins deux mineurs délinquants, Milad Azimi et Alireza Pour Olfat, ont été condamnés à mort pour la première fois depuis l’adoption du Code pénal islamique de 2013. Entre 2005 et 2015, l’organisation a enregistré au moins 73 exécutions de mineurs délinquants en Iran. Selon les Nations unies, au moins 160 personnes qui étaient mineures au moment des faits qu’on leur reproche se trouvent actuellement dans le quartier des condamnés à mort.

Amnesty International a pu obtenir les noms de 49 d’entre elles, dont certaines ont été condamnées il y a plus de 10 ans. L’organisation demande aux autorités iraniennes de prendre des mesures législatives en vue d’abolir totalement le recours à la peine capitale pour les crimes commis par des mineurs, sans laisser aucun pouvoir d’appréciation aux tribunaux ni permettre aucune exception, conformément aux obligations de l’Iran aux termes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention relative aux droits de l’enfant. (voir Growing up on death row : The death penalty and juvenile offenders in Iran – synthèse et conclusions disponibles en français à l’adresse https://www.amnesty.org/fr/documents/mde13/3112/2016/fr/).

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