Écrire Un militant écologiste emprisonné

Ariel Ruiz Urquiola, militant écologiste, a été condamné à Cuba à une peine d’un an d’emprisonnement pour outrage. Cet homme est un prisonnier d’opinion et il doit donc être libéré immédiatement et sans condition.

Ariel Ruiz Urquiola a un doctorat de biologie et il a travaillé par le passé en tant que chercheur pour l’Université de La Havane. En 2015, il a acheté une maison dans le secteur de la Sierra del Infierno, dans le parc national de Viñales, inscrit au Patrimoine mondial de l’UNESCO et situé dans la province de Pinar del Río, dans l’ouest de Cuba. Après avoir obtenu le droit de cultiver les terres appartenant à l’État autour de sa maison, il a lancé en 2016 avec sa famille et des amis un projet de protection des espèces endémiques et de développement de projets d’agriculture durable.

Dans la matinée du 3 mai 2018, deux gardes forestiers (service national chargé de la protection « du patrimoine forestier, de la faune sylvestre et de la chasse ») se sont rendus sur le terrain d’Ariel. Selon des témoins qui ont parlé avec Amnesty International, ils lui ont demandé s’il avait obtenu les autorisations nécessaires pour la construction d’une clôture autour de ce terrain, pour abattre des arbres et pour posséder une tronçonneuse. Ariel les a invités à venir chez lui pour vérifier les autorisations. En chemin, Ariel a demandé aux gardes de lui montrer leur document d’identification, mais comme l’un d’eux a refusé de le faire, il a parlé d’eux en utilisant le terme « police rurale ». Les deux agents ont compris « garde rurale », un terme qui a une connotation négative à Cuba car il désigne des agents du régime de Batista. Les gardes forestiers sont partis et dans la soirée trois policiers sont arrivés avec un mandat, ont arrêté Ariel et l’ont emmené dans le poste de police de Viñales, proche de chez lui.

D’après les documents judiciaires qu’Amnesty International a été en mesure d’examiner, Ariel a été inculpé d’outrage – ou manque de respect à l’égard des gardes forestiers – et condamné le 8 mai à un an d’emprisonnement (la peine maximale prévue par l’article 144-1 du Code pénal) par le tribunal municipal de Viñales. Cette décision a été confirmée en appel par le tribunal populaire provincial de Pinar del Río le 22 mai. Selon les proches d’Ariel, son avocat n’a eu accès au dossier et n’a pu s’entretenir avec lui que le jour même du procès. Il a dans un premier temps été incarcéré dans la prison provinciale de Pinar del Río, et le 11 juin, la famille a été informée de son transfert dans le centre correctionnel de Cayo Largo. Sa sœur, Omara Urquiola, a indiqué à Amnesty International que des responsables de la prison ont menacé de suspendre les visites de la famille et les communications entre Ariel et sa famille si elle ne cesse pas de parler à la presse internationale. Ariel Ruiz Urquiola critique depuis longtemps les autorités cubaines au sujet de questions liées à l’environnement.

Ariel Ruiz Urquiola milite depuis longtemps pour la défense de l’environnement, mais selon sa famille, il n’est pas un opposant politique au gouvernement. En 2008, lors de sa participation à un séminaire international au Mexique en tant que chercheur de l’Université de La Havane, il a publiquement critiqué la pêche illégale présumée de tortues marines à Cuba. En 2009, les autorités de l’université ont suspendu ses travaux sur les tortures marines. Entre 2010 et 2013, il a poursuivi ses travaux à l’Université de La Havane mais ses recherches ont cette fois porté sur la faune de la région de la Sierra de los Órganos, dans la province de Pinar del Río. À la suite d’un désaccord avec la direction de l’université, il a été rétrogradé et a subi en parallèle une baisse de salaire, et en 2016, il a été congédié en raison, d’après certaines informations, d’absences répétées. À la suite de son renvoi, Ariel a publiquement critiqué cette décision, déclarant qu’il s’agissait d’« un abus de pouvoir ». Son renvoi a été confirmé par le tribunal populaire municipal de La Vieille Havane en 2016.
La législation cubaine prévoit que l’État est le propriétaire de la plupart des terres à Cuba. Cependant, les personnes peuvent obtenir un droit d’usufruit pour des terres du domaine public qui ne sont pas utilisées, dans certaines conditions précisées par la loi. En 2016, Ariel Ruiz Urquiola a obtenu ce droit pour des terres situées dans la zone entourant la maison qu’il a achetée en 2015.
La famille d’Ariel Ruiz Urquiola pense que les autorités l’ont délibérément emprisonné à titre de représailles en raison de ses activités de militant écologiste, et qu’il s’agit d’une stratégie visant à le priver des terres du domaine public sur lesquelles il mène son projet relatif à l’environnement. La loi prévoit que l’usufruitier de terres appartenant à l’État perd son droit d’usufruit s’il n’est pas présent sur ces terres, ce qui implique que si Ariel passe une année en prison, il perdra le droit de cultiver ces terres.
Amnesty International s’oppose aux lois qui interdisent les insultes ou le manque de respect à l’égard des chefs de l’État ou des personnalités publiques, de l’armée ou d’autres institutions publiques ou de drapeaux ou d’autres symboles (telles que les lois sur la lèse-majesté et l’outrage). Amnesty International s’oppose également à toute loi qui rend passible de sanctions pénales la diffamation de personnalités publiques ou de particuliers, car elle estime que la diffamation doit être traitée uniquement au civil.
La répression pénale du « desacato » (outrage) (article 144-1 du Code pénal cubain) représente une restriction indue du droit à la liberté d’expression, car les représentants de l’État devraient davantage tolérer les critiques que les personnes privées. Le recours à des lois sur la diffamation ayant pour but ou pour effet d’empêcher les critiques légitimes à l’égard de représentants du gouvernement ou de l’État viole le droit à la liberté d’expression.

Action terminée

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit