Écrire Un militant kurde incarcéré dans un état de santé critique

La santé de Suleiman Abdulmajid Oussou s’est considérablement détériorée depuis le 21 juin. Ce militant de l’opposition kurde syrienne a été arrêté arbitrairement le 23 mai par l’Asayish, la police de l’administration autonome dirigée par le Parti de l’union démocratique (PYD), dans le nord-est de la Syrie. Il est actuellement détenu sans inculpation, dans des conditions déplorables, dans la prison d’Allaya, à El Qamishli (nord-est de la Syrie).

Suleiman Abdulmajid Oussou, 58 ans, père de six enfants, a subi une intervention cardiaque (pose d’endoprothèse, ou stent) avant d’être arrêté. Le 12 juin, sa famille lui a rendu visite pour la première fois dans la prison d’Allaya et lui a apporté des médicaments indispensables au traitement de l’hypertension artérielle. Selon un de ses proches, Suleiman Oussou a ensuite été privé de visites familiales jusqu’au 22 juin. Ce jour-là, sa famille est à nouveau allée le voir et a constaté que sa santé s’était considérablement détériorée, au point qu’il tenait à peine debout. Un de ses proches a fait le témoignage suivant à Amnesty International : « Les autorités pénitentiaires nous ont informés que sa santé s’était dégradée la veille et qu’il avait dû être emmené à l’hôpital Rahma, à El Qamishli, puis qu’il avait ramené à la prison le soir même ».

Suleiman Oussou est détenu dans des conditions déplorables, dans une cellule qu’il partage avec plus de 10 codétenus. D’après son parent, il a du mal à supporter les températures élevées à l’intérieur de la cellule, en raison de l’absence de système de ventilation adapté et de l’insuffisance des rations alimentaires fournies. Ces conditions de détention aggravent son état de santé déjà critique, d’autant qu’il est privé de médicaments et de soins de santé appropriés.

Suleiman Oussou a été arrêté par l’Asayish le 23 mai à son domicile, dans la ville d’El Qamishli. Il est membre du bureau des affaires étrangères du Conseil national kurde (CNK) de Syrie et du bureau politique du Parti Yeketi (Parti de l’union), un mouvement kurde. Selon un de ses proches, sa famille est restée sans nouvelles de lui pendant 20 jours après son arrestation, avant d’apprendre par un appel téléphonique de l’Asayish qu’il était détenu dans la prison d’Allaya, à El Qamishli. Suleiman Oussou a confirmé à ses proches qu’il n’avait pas été inculpé et n’avait pas été autorisé à consulter un avocat.

Le membre de sa famille a ajouté : « Chaque minute compte. La santé de Suleiman Oussou est menacée et continue à se dégrader en détention. Il a besoin de soins médicaux de toute urgence. »

Suleiman Oussou avait déjà été placé en détention à trois reprises par les autorités syriennes en raison de son militantisme politique, en 1992, 2008 et 2009. Le 17 novembre 2016, il a été arrêté par l’Asayish et détenu pendant une semaine, aux côtés d’autres membres du Parti Yeketi, pour avoir rouvert les bureaux du parti à Amuda (El Qamishli), que l’Asayish avait fermés le 16 novembre 2016.

La détention arbitraire de Suleiman Oussou semble s’inscrire dans le cadre d’une campagne calculée d’arrestations de militants politiques et d’autres personnes par l’Asayish dans la zone (communément appelée Rojava) contrôlée par l’administration autonome dirigée par le Parti de l’union démocratique. Depuis le 14 mars, l’Asayish a arbitrairement arrêté et détenu de nombreux membres et sympathisants de partis d’opposition kurdes à El Qamishli et dans plus de neuf villes un peu partout dans le Rojava.

Le 9 mai, l’Asayish a appréhendé 13 membres dirigeants du Conseil national kurde : Fasla Youssef, Narin Matini, Mahmud Malla, Mohsen Taher, Abdelsamad Khalaf Biro, Fathi Gaddo, Ahmed Ajeh, Mahmoud Haj Ali, Farhad Tami, Mohamed Amin Hossam, Noreldin Fattah, Taher Hassaf et Qassem Sherif. Ces arrestations sont liées à la poursuite des activités du Conseil national kurde après la fermeture de ses bureaux par l’Asayish le 2 mai pour gestion d’une organisation « non agréée ». Mohsen Taher et Amin Hossam sont toujours détenus arbitrairement dans la prison d’Allaya.

Le 10 mai, à Afrin, l’Asayish a arrêté Mohamed Sido Ben Hassan, un sympathisant du Conseil national kurde âgé de 80 ans. Maintenu en détention pendant 14 jours, il a ensuite été jugé en public à Bilan, le village où il vivait. Il est mort d’un arrêt cardiaque pendant le procès.

Le 20 mai, Bashar Amin, 70 ans, membre du Conseil national kurde et du bureau politique du Parti démocratique du Kurdistan de Syrie (PDK-S), a également été arrêté par l’Asayish à son domicile, après avoir tenu dans les bureaux du Conseil national kurde une conférence de presse au cours de laquelle il a critiqué les pratiques répressives de l’Asayish à l’égard des militants politiques. Bashar Amin est toujours incarcéré arbitrairement dans la prison d’Allaya.

Le 23 mai, les forces de l’Asayish ont arrêté quatre autres membres du Conseil national kurde : Suleiman Oussou, Fouad Ibrahim, Nafeh Abdullah et Barzan Hussein, un journaliste d’Ark TV. Ils sont maintenus en détention arbitraire dans la prison d’Allaya.

En 2014, le Parti de l’union démocratique, avec un certain nombre de formations politiques plus modestes, a créé une administration autonome dans trois cantons à forte population kurde dans le nord de la Syrie : Afrin, Jazira (gouvernorat de Hasakeh) et Ain al Arab (Kobani). L’administration dirigée par le Parti de l’union démocratique a ses propres forces de police, tribunaux, prisons, ministères et lois. Le Parti de l’union démocratique a également formé une armée, les Unités de protection du peuple (YPG), essentiellement chargée de protéger le territoire détenu par les Kurdes et de gérer les tribunaux militaires.

En août 2015, Amnesty International s’est rendue dans deux prisons centrales sous le contrôle de l’Asayish, à El Qamishli et Malikiya. Les chercheurs d’Amnesty International ont recueilli des informations attestant la détention arbitraire de personnes critiques à l’égard des autorités et d’autres personnes soupçonnées d’être des sympathisants ou des membres du groupe armé autoproclamé État islamique. Certaines personnes étaient maintenues en détention arbitrairement, sans avoir été jugées ni même inculpées, depuis jusqu’à un an. Celles qui avaient été jugées avaient passé de longues périodes en détention provisoire et fait l’objet de procédures manifestement iniques.

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