Écrire Un palestinien souffrant en détention administrative

Le Palestinien Muhammed al Qiq observe une grève de la faim depuis le 6 février pour protester contre son maintien en détention administrative. Son avocat a demandé son transfert dans un hôpital afin qu’il y reçoive des soins, mais les autorités israéliennes n’ont pas encore répondu à sa requête. Il est actuellement détenu à l’isolement et est de plus en plus faible.

Muhammed al Qiq, journaliste palestinien habitant à Dura (gouvernorat de Hébron), a été arrêté par les forces de sécurité israéliennes le 15 janvier, au poste de contrôle de Beit El, à proximité de Ramallah. Il rentrait chez lui après avoir participé à une manifestation organisée à Bethléem contre la politique d’Israël, qui refuse de remettre à leur famille les dépouilles des Palestiniens accusés d’avoir mené des attaques. Après avoir été arrêté, il a été interrogé pendant 22 jours environ car on le soupçonnait de provocation.

Le 6 février, un ordre de détention administrative pour une durée de six mois a été émis à son encontre par un juge militaire. Il a alors annoncé devant le tribunal qu’il entamerait une grève de la faim pour protester contre la décision des autorités israéliennes de le maintenir à nouveau en détention sans inculpation ni jugement. Le lendemain, le juge militaire a ramené à trois mois la durée de sa détention administrative. Il se trouve toujours à la prison de Kishon, dans le nord d’Israël.

L’avocat de Muhammed al Qiq devait lui rendre visite le 15 février, mais des agents des Services pénitentiaires israéliens l’ont informé que son client ne pouvait pas le rencontrer, car il ne pouvait pas marcher ni se lever de son lit. En réponse à un recours présenté devant la Haute Cour de justice d’Israël, les Services pénitentiaires israéliens ont autorisé Muhammed al Qiq à voir son avocat le 19 février, alors qu’il ne l’avait pas vu depuis 10 jours. Son avocat a indiqué à Amnesty International que Muhammed al Qiq lui avait paru faible et qu’il se sentait très fatigué au point d’éprouver des difficultés à parler. On voyait déjà qu’il avait perdu du poids. Muhammed al Qiq a confié à son avocat qu’il était détenu à l’isolement, dans une pièce de 2 m2 au plafond bas, qui le faisait penser à une « tombe glaciale ». Il s’est également plaint de maux de dos et de difficultés à supporter le froid, notamment parce qu’on ne lui avait donné qu’une seule couverture fine. Son avocat a fait part aux Services pénitentiaires israéliens de son inquiétude quant à l’état de santé de Muhammed al Qiq, demandant son hospitalisation pour qu’il reçoive des soins, mais ils ont refusé.

Les ordres de détention administrative permettent de placer des personnes en détention sans inculpation ni jugement, pendant des périodes pouvant aller jusqu’à six mois. Ils sont émis par l’armée israélienne, principalement contre des Palestiniens, et peuvent être renouvelés indéfiniment. Un ordre de détention administrative avait déjà été émis contre Muhammed al Qiq en novembre 2015 ; il avait alors été détenu pendant sept mois, dont 94 jours en grève de la faim à titre de protestation.

Incarcéré à la prison de Nafha, dans le désert du Néguev/Naqab, Muhammed al Qiq a été relâché en mars 2016 après avoir observé une grève de la faim pendant plus de 90 jours pour protester contre sa détention administrative depuis novembre 2015. Il avait perdu 53 kg, était faible, et souffrait de maux de dos, de vertiges et de problèmes digestifs du fait de sa grève de la faim. Il a mis un terme à celle-ci le 25 février 2016, après que les autorités israéliennes eurent accepté de ne pas renouveler son ordre de détention administrative. Il avait besoin de soins médicaux de toute urgence à sa libération, et a été hospitalisé pendant quelques semaines avant de pouvoir revenir auprès de sa famille.

Son épouse, Fayha Shalash, s’est dite préoccupée par la santé de Muhammed, affirmant qu’il était toujours « faible et fragile » et qu’il ne s’était pas encore complètement remis des effets graves sur son organisme de sa dernière grève de la faim. « J’ai peur qu’il ne soit pas en mesure de surmonter une autre grève de la faim », a-t-elle déclaré. Elle pense que les autorités israéliennes cherchent à réduire au silence son époux en raison de ses activités militantes et à le punir de sa précédente grève de la faim. « Depuis sa libération, a-t-elle dit, Muhammed parle de sa détention à des organisations locales et internationales de défense des droits humains et il défend les droits des Palestiniens en exhortant Israël à remettre à leur famille les corps des Palestiniens qui ont été tués. »

Comme la plupart des autres Palestiniens des territoires palestiniens occupés détenus par Israël, Muhammed al Qiq est détenu sur le territoire israélien, en violation de la Quatrième Convention de Genève. Sa famille à Hébron doit être en possession d’une autorisation délivrée par l’armée israélienne pour pouvoir lui rendre visite.

Muhammed al Qiq a été arrêté et détenu à plusieurs reprises dans le passé. Depuis le mois d’octobre 2015, les violences en Israël et dans les territoires palestiniens occupés se sont considérablement intensifiées. Tout comme durant d’autres périodes de regain de tension dans les territoires palestiniens occupés, les autorités israéliennes ont riposté en se livrant à des arrestations massives et en prononçant de plus en plus d’ordres de détention administrative, y compris à l’encontre de mineurs alors qu’elles ne l’avaient plus fait depuis plusieurs années. Selon l’organisation israélienne de défense des droits humains B’Tselem, 644 personnes étaient en détention administrative à la fin du mois d’août 2016, contre 341 un an auparavant.

La détention administrative – introduite soi-disant à titre exceptionnel pour les personnes qui représentent un danger extrême et imminent du point de vue de la sécurité – est utilisée par les autorités israéliennes en parallèle du système judiciaire pour arrêter, inculper et poursuivre des personnes soupçonnées d’infractions pénales, voire des personnes qui n’auraient jamais dû être arrêtées. Les ordres de détention administrative peuvent être renouvelés indéfiniment et Amnesty International considère les Palestiniens détenus dans ce cadre comme des prisonniers d’opinion, incarcérés uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits aux libertés d’expression et d’association.

Le recours à des éléments de preuve classés secrets bafoue le droit des accusés à un procès équitable. Comme ils ne peuvent pas préparer une défense adéquate et ne savent pas quand ils seront remis en liberté, Amnesty International estime que le recours par Israël à la détention administrative peut être assimilé à un traitement cruel, inhumain et dégradant.

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