Écrire Un syndicaliste enseignant doit être libéré

L’enseignant et syndicaliste iranien Esmail Abdi, secrétaire général du Syndicat des enseignants iraniens (ITTA), a été arrêté le 9 novembre et conduit à la prison d’Evin, à Téhéran, pour commencer à purger sa peine de six ans d’emprisonnement. Cet homme est un prisonnier d’opinion, pris pour cible uniquement en raison de ses activités syndicales pacifiques.

Six membres des services de renseignement et de sécurité ont arrêté le syndicaliste Esmail (Ismail) Abdi, professeur de mathématiques dans un lycée et secrétaire général du Syndicat des enseignants iraniens (ITTA), le 9 novembre 2016 à son domicile et l’ont emmené à la prison d’Evin pour qu’il commence à purger sa peine de six ans d’emprisonnement. Il semblerait que les fonctionnaires chargés de l’arrestation aient refusé de présenter des documents d’identification ou un mandat d’arrêt. Esmail Abdi a été condamné en février 2016 à six ans de prison par la 15e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran, qui l’a déclaré coupable de charges inventées liées à la sécurité nationale, notamment de « propagande contre le régime » et de « rassemblement et collusion en vue de porter atteinte à la sécurité nationale ». Ces accusations découlent de ses activités syndicales, notamment du fait qu’il se soit associé avec l’Internationale de l’éducation, plus grande fédération mondiale de syndicats, et qu’il ait organisé des manifestations pacifiques menées par des enseignants et des membres de l’ITTA devant le Parlement iranien en mai 2015 pour protester contre la faiblesse des salaires et du budget de l’éducation, et contre l’emprisonnement d’enseignants syndicalistes. Sa condamnation a été confirmée en appel en octobre 2016.

Esmail Abdi a été arrêté par des pasdaran (gardiens de la révolution) le 27 juin 2015 après avoir tenté d’obtenir un visa pour assister au 7e Congrès mondial de l’Internationale de l’éducation, organisé à Ottawa, au Canada, en juillet 2015. Il a été détenu à l’isolement dans la section 2A de la prison d’Evin, qui est gérée par les gardiens de la révolution, pendant 40 jours avant d’être transféré dans les sections 7 et 8, où il a été incarcéré pendant 10 mois dans des conditions déplorables avec des prisonniers condamnés pour des faits de droit commun. Il a été libéré sous caution le 14 mai 2016, 14 jours après avoir entamé une grève de la faim afin de protester contre son emprisonnement et celui d’autres syndicalistes et enseignants pour des motifs fallacieux liés à la sécurité nationale, ainsi que contre la répression des réunions et grèves pacifiques des syndicalistes, l’interdiction des manifestations indépendantes prévues à l’occasion de la Journée internationale des travailleurs et de la Journée mondiale des enseignants, et la persistance de salaires inférieurs au seuil de pauvreté. Dans une lettre ouverte rédigée en prison en avril 2016, Esmail Abdi a écrit : « [A]u vu des éléments utilisés pour rendre ce verdict contre [moi], on dirait que toutes les initiatives visant à améliorer la vie et les moyens d’existence des enseignants et des travailleurs en Iran peuvent être considérées comme des actes portant atteinte à la sécurité nationale. »

Le procès d’Esmail Abdi n’était pas conforme aux normes internationales d’équité : celui-ci a notamment été privé d’accès à un avocat de son choix durant toute la phase d’enquête, et ensuite son avocat n’a pas été autorisé à obtenir et examiner le dossier avant le procès. Esmail Abdi a été arrêté le 27 juin 2015 après une visite au bureau du procureur à la prison d’Evin, où il s’était rendu pour obtenir des informations sur l’interdiction de voyager prononcée contre lui. Il s’était vu refuser le droit de se rendre en Arménie pour faire une demande de visa afin de pouvoir assister au 7e Congrès mondial de l’Internationale de l’éducation, organisé au Canada en juillet 2015. Le 22 juillet 2015, des milliers d’enseignants ont essayé de se réunir devant le Parlement iranien pour demander sa libération et protester contre le harcèlement et les pratiques abusives que subissent les enseignants syndicalistes. Cependant, les forces de sécurité postées autour du Parlement depuis le petit matin ont interrompu le rassemblement et arrêté de nombreux enseignants qui manifestaient. Selon une déclaration du ministre iranien de l’Éducation diffusée le 27 juillet 2015, les enseignants arrêtés ont par la suite été libérés.

Avant son arrestation, les services de renseignement avaient convoqué Esmail Abdi plusieurs fois pour l’interroger et avaient exercé des pressions sur lui pour qu’il démissionne de son poste de secrétaire général de l’ITTA. Pendant les interrogatoires, les agents présents l’avaient également mis en garde contre son association avec des syndicats basés à l’étranger, comme l’Internationale de l’éducation, et avaient déclaré que sa participation à des rassemblements internationaux représentait une « ligne rouge ». Le 3 mai 2015, les services de renseignement ont de nouveau convoqué Esmail Abdi et l’ont alors menacé d’exécuter une peine de 10 ans de prison avec sursis à laquelle il avait été condamné en 2011 en raison de ses activités syndicales pacifiques s’il ne publiait pas une déclaration officielle sur Facebook annonçant qu’il démissionnait de ses fonctions au sein de l’ITTA et qu’il ne participerait pas à une manifestation nationale prévue quatre jours plus tard. Amnesty International croit savoir qu’Esmail Abdi a publié la déclaration sous la pression, mais que l’ITTA n’a pas accepté sa démission. La manifestation a eu lieu comme prévu et a rassemblé des milliers d’enseignants devant le Parlement à Téhéran et devant les bureaux du ministère de l’Éducation dans d’autres villes.

L’article 22-1 du PIDCP dispose : « Toute personne a le droit de s’associer librement avec d’autres, y compris le droit de constituer des syndicats et d’y adhérer pour la protection de ses intérêts. » Et l’article 8 du PIDESC garantit tant « le droit qu’a toute personne de former avec d’autres des syndicats et de s’affilier au syndicat de son choix » que « le droit qu’ont les syndicats d’exercer librement leur activité, sans limitations autres que celles qui sont prévues par la loi et qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, dans l’intérêt de la sécurité nationale ou de l’ordre public, ou pour protéger les droits et les libertés d’autrui ».

Amnesty International est profondément préoccupée par la situation désastreuse des défenseurs des droits humains, notamment des syndicalistes, en Iran. Les autorités iraniennes ont intensifié la répression visant les défenseurs des droits humains, qui font l’objet d’une surveillance, de manœuvres d’intimidation, d’arrestations et de détentions arbitraires, et se voient infliger des peines d’emprisonnement de plus en plus lourdes. Aux termes de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme, les États doivent instaurer les conditions sociales, économiques, politiques et autres, ainsi que les garanties juridiques, législatives et administratives nécessaires pour que toutes les personnes relevant de leur juridiction puissent jouir en pratique de leurs droits et libertés, y compris le droit de défendre les droits humains. Ils ont en outre l’obligation de ne pas entraver ni bafouer le droit de défendre les droits humains, et doivent protéger ce droit de toute entrave ou violation par des tiers, qu’il s’agisse ou non d’agents de l’État. Enfin, ils sont tenus de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection de chacun contre toute violence, menace, action de représailles ou autre action arbitraire découlant de ses efforts légitimes de défense des droits humains.

Le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture a défini la détention prolongée à l’isolement comme toute période d’isolement supérieure à 15 jours. Cette pratique s’apparente à la torture et aux autres traitements cruels, inhumains et dégradants.

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