Écrire Une manifestante pacifique a entamé une grève de la faim en détention

La dirigeante communautaire Milagro Sala a été arrêtée le 16 janvier pour avoir manifesté pacifiquement sur la place Belgrano à San Salvador de Jujuy, une ville du nord-ouest de l’Argentine.

Depuis le 13 décembre, l’organisation Tupac Amaru et d’autres associations (faisant partie du Réseau des organisations sociales) mènent des actions de protestation devant les bureaux des autorités de la province de Jujuy, afin de réclamer que le gouverneur les reçoive. Le 14 décembre, le gouverneur Gerardo Morales a accusé la responsable communautaire Milagro Sala, qui avait participé à l’action de protestation, d’« incitation à commettre des infractions et à semer le trouble ». Milagro Sala a été arrêtée le 16 janvier.

Elle a été inculpée au titre des articles 209 et 230 de la section 2 du Code pénal. L’article 209 prévoit une peine de deux à six ans de prison contre quiconque « incite publiquement à perpétrer une infraction contre une personne ou une institution ». Les autorités affirment qu’elle est à l’origine de l’occupation « illégale » d’un espace public et de la restriction de la circulation qui en découle. L’article 230 prévoit une peine de quatre ans d’emprisonnement contre ceux qui, aux termes de la section 2, « s’élèvent publiquement pour entraver l’application des lois nationales, des lois provinciales ou des résolutions émises par des représentants de l’État ». Les autorités soutiennent que l’action de protestation en question est illégale car elle entrave le libre mouvement des personnes et des véhicules.

Amnesty International a pu examiner le mandat d’arrêt, et estime que Milagro Sala est sanctionnée pour avoir exercé de manière pourtant pacifique son droit à la liberté d’expression et son droit de manifester. Elle est en outre accusée de n’avoir pas respecté un plan de régularisation des associations introduit récemment ; Milagro Sala n’exerce cependant aucune responsabilité officielle dans une association ni au sein de l’organisation Tupac Amaru, et ne peut donc être tenue responsable d’une quelconque violation imputée à ces organisations.

Le 17 janvier, les avocats de Tupac Amaru ont déposé une requête en habeas corpus afin que Milagro Sala puisse quitter la détention provisoire, mais leur demande a été rejetée. Depuis son arrestation, elle observe une grève de la faim et de la soif. Mariano Miranda, le procureur de la province, a publiquement confirmé que « tant que l’infraction se poursuivra, c’est-à-dire les manifestations et l’occupation de la place, elle sera maintenue en détention. » Le gouverneur Morales a annoncé aux médias qu’il considère que cette action de protestation se veut « déstabilisante ». Le 17 janvier, un juge a ordonné que les personnes qui manifestaient sur la place Belgrano soient dispersées, déclarant que les autorités devaient « utiliser tous les moyens nécessaires » pour mettre fin à l’action de protestation.

Quand Gerardo Morales a pris ses fonctions de gouverneur de la province de Jujuy, en octobre 2015, il a annoncé l’introduction d’un nouveau plan de réenregistrement des associations, affirmant qu’il cherchait à favoriser la transparence du mouvement sur le plan financier. Après cette annonce, le Réseau des organisations sociales a sollicité une entrevue avec le nouveau gouverneur à deux reprises, les 24 et 30 novembre, afin de nouer un dialogue sur la mise en œuvre de ce plan de régularisation.

Face au silence des autorités, le Réseau s’est mobilisé le 14 décembre sur la place Belgrano à San Salvador, devant la résidence du gouverneur, afin de manifester publiquement dans le but de réclamer l’ouverture d’une discussion entre le pouvoir exécutif de la province et les organisations. Ce jour a marqué le début d’actions de protestation et de l’occupation de la place, qui ont débouché sur les poursuites visant Milagro Sala.

Le droit international relatif aux droits humains dispose que les actions de protestation et la mobilisation sociale relèvent de l’exercice des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion. Dans certaines circonstances, elles constituent la seule manière pour des groupes vulnérables ou exclus de se faire entendre et d’exprimer leur opinion. Le recours au droit pénal pour étouffer les revendications de la société est contraire aux responsabilités de l’État en vertu du droit international.

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