Mise à jour 6 juillet 2016 :
Au lancement de notre pétition, le cabinet du Premier ministre a demandé à nous rencontrer, ce que nous avons fait le 23 mai. Au mois de juin, nous avons rencontré les autres acteurs, Alphonse Vanderhaeghe, vice-président de la CSC Services publics et d’autre part, Michel Jacobs, secrétaire fédéral à la CGSP. Nous avons présenté notre pétition et le contexte qui nous a amené à intervenir dans le débat : les grèves dans les prisons se prolongeaient, laissant les détenus vivre dans des conditions où leurs droits fondamentaux étaient bafoués. Par ailleurs, nous avons fait part de nos préoccupations concernant les conditions de détention en général (donc en dehors des périodes de grève également).
Amnesty International insiste sur le respect des droits fondamentaux pour toutes les personnes, en ce compris pour les détenus en Belgique. Si notre organisation défend le droit de grève et l’action syndicale, nous ne pouvons pas, par contre, accepter que des personnes — déjà très vulnérables puisque privées de liberté — soient obligées de vivre dans des conditions indignes, enfermées 24 h sur 24 h, avec un accès hebdomadaire aux douches.
La section belge d’Amnesty fait entendre ses revendications sur le monde carcéral depuis de très nombreuses années, peu importe la composition des gouvernements. Nous avons insisté à chaque fois sur les conséquences de la surpopulation, insécurisante pour le personnel et indigne pour les détenus. Sans parler du travail de réinsertion, impossible à réaliser. Nous insistons toujours aussi sur les droits des personnes internées pour qui la privation de liberté doit être accompagnée de soins appropriés.
Amnesty International, à l’instar du Comité de prévention contre la torture (instance du Conseil de l’Europe), demande que des dispositions soient prises pour que les grèves permettent malgré tout aux détenus de vivre dans le respect de leurs droits fondamentaux.
Le gouvernement nous a fait part du programme qui est en cours pour améliorer les conditions de vie des détenus et celle des gardiens. Pour le gouvernement, les économies budgétaires peuvent aller de pair avec des réformes qui permettent aux gardiens de travailler mieux, mais avec moins de moyens. Pour nos ministres, trouver un protocole d’accord pour assurer les droits fondamentaux des détenus pendant les grèves reste un objectif, mais qui est très difficile à réaliser, ce qui explique pourquoi police et armée se sont succédées pour assurer la gestion quotidienne des prisons.
Du côté syndical, CSC et FGTB affirment que l’amélioration du sort des détenus va de pair avec l’amélioration du sort des gardiens. Ils ne sont néanmoins pas d’accord pour entamer une négociation sur un protocole d’accord sur les droits fondamentaux des détenus si ceux-ci mettent en péril le droit de grève du personnel pénitentiaire.
À la CSC, nous avons trouvé une écoute plus attentive pour examiner les possibilités d’une formation, donnée par Amnesty à l’attention des agents pénitentiaires sur les obligations internationales de la Belgique en matière de conditions de détention. Les deux syndicats ont mis en avant le fait que les mesures du gouvernement vont rendre les conditions de détention encore plus difficiles notamment à cause de la réduction du temps pour les visites des familles et par le fait que les réductions budgétaires ont des conséquences lourdes sur la vétusté des locaux et sur les conditions de vie dans les prisons. Ils ont dit que cette grève était comprise tant par les détenus que par les familles de ceux-ci.
Les deux syndicats ont aussi insisté sur toutes les négociations et les sonnettes d’alarme tirées avant le déclenchement de la grève, rappelant au passage que cette dernière grève ne visait en aucune manière les conditions salariales. Celle-ci est le résultat et de coupes budgétaires importantes et d’un sentiment d’absence d’écoute par le gouvernement.
La FGTB nous a clairement répété qu’elle ne sera jamais d’accord pour que le droit de grève soit limité au profit de droits à accorder aux détenus.
Conclusion :
Le gouvernement doit remplir diverses obligations dans le cadre de ses engagements nationaux et internationaux. Des moyens budgétaires et humains doivent être débloqués pour assurer des conditions de travail décentes, mais aussi des conditions de détention respectueuses de la dignité humaine envers des personnes qui ont été condamnées à la privation de liberté.
Nous devrons continuer à faire du plaidoyer auprès de tous les acteurs pour aboutir à des améliorations significatives. Clairement, ce sera long et difficile.
La grève actuellement en cours dans les prisons de Bruxelles et de Wallonie met en lumière les graves failles structurelles du système carcéral belge, lesquelles mènent notamment à une situation où les conditions de détention s’apparentent à des traitements inhumains et dégradants.
Dans son Rapport annuel, publié en février dernier, Amnesty International avait une fois de plus alerté sur les mauvaises conditions carcérales en Belgique. En avril dernier, ce sont le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains et dégradants (CPT) et le Médiateur fédéral qui ont mis en évidence la situation dramatique des détenus. En outre, un profond sentiment d’insatisfaction lié notamment à la surpopulation carcérale, au sous-effectif chronique et à des conditions de travail difficiles en termes de sécurité, a mené une nouvelle fois les agents pénitentiaires à se mettre en grève.
La situation des détenus, déjà difficile, est aggravée lors des grèves, ce qui est crûment mis en lumière depuis le 25 avril derner. Le CPT a plusieurs fois attiré l’attention sur l’impact dramatique que les grèves ont sur les droits des prisonniers et sur leur sécurité en Belgique. Ainsi, le Comité a révélé que, durant les grèves, les prisonniers sont privés de leurs droits fondamentaux, à savoir un accès à l’alimentation, à l’hygiène et aux soins de santé. Leurs activités sont par ailleurs compromises, de la même façon que les contacts avec leurs avocats et l’accès aux visiteurs, lequel est restreint. Les prisonniers doivent par ailleurs rester dans leurs cellules 24 heures sur 24. Des mauvais traitements infligés à des détenus par des policiers présents lors d’une grève ont également été relevés par le CPT. Ce dernier a donc, à plusieurs reprises, appelé les autorités belges à instaurer un service garanti en milieu pénitentiaire.
Outre une solution qui permettra de régler la situation dans l’immédiat et des réformes structurelles en mesure d’améliorer significativement le système carcéral belge, Amnesty International demande que la Belgique se conforme à ses obligations internationales en assurant un service garanti aux détenus durant les grèves du personnel pénitentiaire, et ce, de façon à éviter tout impact négatif sur les droits humains des prisonniers.
Signez notre pétition appelant toutes les parties concernées à se mettre de toute urgence autour de la table pour faire évoluer positivement la situation, dans l’immédiat et à moyen et long termes.