Les droits et la vie de femmes et de jeunes filles espagnoles sont en danger
Ce texte est arrivé à un stade critique ; le Conseil des ministres, qui l’avait adopté le 20 décembre 2013, est sur le point de le présenter au Parlement afin qu’il y soit débattu. S’il est promulgué, il mènera à une augmentation du nombre de femmes et de jeunes filles recourant à des procédures illégales, risquées et clandestines, mettant ainsi leur santé et leur vie en danger. Le projet de loi crée une série d’obstacles humiliants et peu réalistes que femmes et jeunes filles doivent surmonter avant de pouvoir interrompre leur grossesse légalement et en toute sécurité. Par exemple, les femmes et les jeunes filles dont la grossesse résulte d’un viol seront forcées à signaler celui-ci à la police avant de pouvoir subir une interruption de grossesse légalement et en toute sécurité. Cela sera particulièrement problématique pour les femmes et jeunes filles migrantes sans papiers, qui risqueront dans certains cas d’être expulsées du pays si elles portent leur viol à la connaissance des autorités. Le projet de loi propose par ailleurs des restrictions à l’accès aux informations sur la santé, qui limiteront la capacité des femmes et des jeunes filles à faire des choix éclairés sur leur propre santé. Le texte prévoit par ailleurs des sanctions contre les professionnels de santé, s’il est déterminé qu’ils ont procédé à une interruption de grossesse sortant des nouvelles limites fixées par le projet de loi ; ils risquent de voir leur autorisation de pratiquer la médecine révoquée et encourent
des peines de prison. Cela instaure un climat de peur parmi les soignants et les dissuade de répondre aux besoins des femmes et jeunes filles concernées. S’il est adopté, ce texte affectera de manière disproportionnée les femmes jeunes et pauvres car elles n’ont pas les moyens de se rendre à l’étranger afin d’interrompre leur grossesse légalement et en toute sécurité.
Ce texte est discriminatoire et rétrograde, et il est contraire aux obligations internationales de l’Espagne en matière de droits humains. En 2012, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies (CDESC) a demandé au gouvernement espagnol de veiller à ce que la loi actuelle soit pleinement appliquée, et à ce que l’ensemble des femmes puissent bénéficier en toute égalité d’un accès légal et sûr aux services d’interruption volontaire de grossesse. Le CDESC a par ailleurs engagé l’État à faire en sorte que le droit à l’objection de conscience des membres du personnel de santé opposés à l’avortement ne constitue pas un obstacle pour les femmes voulant mettre fin à leur grossesse ; et à se soucier tout particulièrement de la situation des adolescentes et des immigrées. Ce texte fait le contraire.
En savoir plus : la position d’Amnesty International sur l’avortement
Amnesty ne se prononce pas pour un droit à l’avortement dans tous les cas. L’organisation demande aux États de :
– abroger les lois en vertu desquelles les femmes sont, ou peuvent être, inculpées et emprisonnées pour avoir cherché à se faire avorter ou avoir subi un avortement ;
– abroger les lois qui stigmatisent ou condamnent les membres du corps médical ayant donné des informations sur l’avortement ou procédé à des avortements dans le cadre des limites raisonnables fixées ;
– se doter d’une réglementation sensée sur l’accès à l’avortement ;
– fournir l’accès à des services médicaux appropriés à toutes les femmes présentant des complications à la suite d’un avortement, qu’il soit légal ou non ;
– faire en sorte que les femmes qui se retrouvent enceintes après avoir subi des violences sexuelles, notamment l’inceste, puissent recourir à des services d’interruption de grossesse légaux et sans risques ;
– faire en sorte que les femmes aient accès à des services pratiquant l’avortement légalement et sans risques lorsqu’une grossesse présente un risque pour leur vie ou un risque grave pour leur santé.
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