Iran. Les femmes réduites à être des machines à procréer
Le projet de loi 446, adopté par le parlement à une écrasante majorité en août 2014, a fait l’objet d’amendements et doit être approuvé par le Conseil des gardiens avant d’être promulgué. Il interdit la stérilisation volontaire, la deuxième méthode de contraception moderne en Iran, dans le but d’accroître le taux de fertilité et de prévenir le déclin de la population. Cette mesure se traduirait par une augmentation de grossesses non désirée, contraignant un nombre accru de femmes à se tourner vers un avortement clandestin. Cette proposition vise également à bloquer l’accès à l’information sur les différentes méthodes contraceptives et à démanteler les programmes globaux de planning familial, financés par l’État. En 2012, l’État a déjà supprimé le financement du Programme de planification de la famille et de la population qui permettait à des millions de femmes d’avoir accès des services de santé sexuelle et reproductive, notamment à des moyens de contraceptions modernes abordables. Le financement de ce programme incluait également la distribution de préservatifs dans les centres de santé urbains et les dispensaires ruraux. La restriction de l’accès à ce contraceptif se traduirait par une recrudescence des maladies sexuellement transmissibles.
Si ce projet de loi est adopté, les femmes seront contraintes de mener à terme leur grossesse, même non désirée, ou de mettre en péril leur vie et leur santé en ayant recours à des avortements illégaux et hasardeux. La première cause de mortalité maternelle dans le monde est la pratique d’avortement dans des conditions peu certaines. En supprimant les programmes de planning familial, les femmes seraient exposées à de graves risques en terme de santé. En leur bloquant un accès à l’information, les femmes se retrouvent privées de leur liberté de prendre des décisions éclairées quant au fait d’avoir des enfants. Dans tous les cas, leurs droits sexuels et reproductifs seraient pleinement bafoués.
Le projet de loi 315 sur la Population et l’exaltation de la famille doit être débattu au Parlement en avril. Il limite l’accès au travail pour les femmes sans enfants ou sans mari. Ce texte ordonne à tous les organismes privés et publics, lorsqu’ils recrutent à certains postes, d’accorder la priorité, dans l’ordre, aux hommes ayant des enfants, aux hommes mariés sans enfants et aux femmes mariées ayant des enfants. La proposition rend également plus difficile le divorce et décourage l’intervention de la police et de la justice dans les conflits au sein de la famille, ce qui accroît le risque de violence conjugale. Elle incitera les juges à se prononcer contre le divorce, en leur accordant des primes en fonction du pourcentage d’affaires qui se soldent par la réconciliation des époux.
L’adoption de ce texte restreindrait le droit des femmes. Ces dernières n’auraient pas le droit de travailler ni de faire carrière si elles n’ont pas rempli leur rôle premier, celui de procréer. Or, les femmes représentent la majorité des étudiants diplômés de l’université et environ 17 % de la population active du pays.
De toute évidence, ces deux projets de loi représentent un retour de dix ans en arrière avec comme conséquence pour les jeunes filles et femmes, un avenir construit sur base d’inégalités, de discrimination, de problèmes de santé et de libertés limités. Les femmes sont privées de leurs droits sexuels et reproductifs et elles sont considérées comme des machines à procréer. Dans ces conditions, l’émancipation de la femme s’avère totalement impossible. Ajoutons à cela le fait que les femmes en Iran n’ont déjà pas les mêmes droits que les hommes en ce qui concerne le mariage, le divorce, la garde des enfants, l’héritage, les voyages et le choix vestimentaire.
Amnesty International appelle les autorités iraniennes à stopper ces discriminations à l’égard des femmes en abrogeant dans son entièreté le projet de loi 445, en amendant le projet de loi 315 et en réinstaurant le financement du programme de planning familial, supprimé en 2012.
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