La violence en Amérique centrale alimente une crise des réfugiés
Au Honduras, au Salvador, et au Guatemala, le climat de violence généralisé et le taux extrêmement élevé d’homicides piègent la population de ces trois pays dans une situation terrible.
Le nouveau rapport d’Amnesty, intitulé Home Sweet Home ? Honduras, Guatemala and El Salvador’s role in a deepening refugee crisis, révèle que les gouvernements d’Amérique centrale alimentent une crise des réfugiés de plus en plus grave en se révélant incapables de s’attaquer à la violence généralisée et aux taux extrêmement élevés d’homicides au Guatemala, au Honduras et au Salvador, qui poussent des centaines de milliers de leurs ressortissants à fuir.
Depuis ces trois dernières années, le nombre d’homicides au Salvador a explosé. Le Guatemala et le Honduras affichent également des taux de meurtres parmi les plus élevés au monde. Les Nations unies ont classé le Salvador parmi les États les plus dangereux de la planète hors d’une zone de guerre, avec plus de 108 homicides pour 100 000 habitants en 2015.
Au Honduras, ce taux s’élevait à 63,75 et au Guatemala, à 34,99 pour 100 000 habitants.
Les jeunes : victimes récurrentes des violences
Les jeunes sont les plus touchés par cette violence : plus de la moitié des personnes mortes dans les trois pays en 2015 avaient moins de 30 ans. Les garçons rejoignent souvent les gangs sous la contrainte, tandis que les filles sont obligées de devenir les « petites amies » de membres de gangs et subissent régulièrement des sévices sexuels.
Les commerçants et les chauffeurs de bus se voient couramment extorquer de l’argent et sont contraints de verser une « taxe » aux gangs contrôlant leur région. Il n’est pas rare que ceux qui ne respectent pas ces règles de conduite strictes mais tacites soient victimes de violence ou tués. Ce fut le cas pour Saul, 30 ans et chauffeur de bus, père de cinq enfants, tué au Honduras après avoir fui au Mexique à cause de plusieurs attaques à bout portant sur lui et ses fils.
De nombreux jeunes de ces trois pays ont confié à Amnesty International qu’ils avaient abandonné l’école car ils craignaient les membres de gangs et qu’ils n’avaient désormais d’autre choix que de passer leurs journées chez eux. Le ministère salvadorien de l’Éducation aurait déclaré qu’ils étaient 39 000 à ne plus être scolarisés à la suite d’actes de harcèlement ou de menaces de la part de gangs en 2015 – soit trois fois plus qu’en 2014 (13 000). D’après le syndicat des enseignants, ce chiffre pourrait en réalité être supérieur à 100 000.
Les adolescents accusés de faire partie d’un gang sont parfois harcelés et agressés par les forces de sécurité. Le témoignage d’Andrés lève le voile sur les exactions violentes des forces de sécurité gouvernementales : accusés d’avoir participé à une fusillade à tort, il a été torturé par les forces de sécurité salvadoriennes. Depuis il change de maison souvent pour échapper aux représailles.
Une justice difficile
Pour les témoins de violences perpétrées par les gangs ou les forces de sécurité, le silence reste la meilleure protection pour eux-mêmes. Dans le cas de Yomara, la jeune femme de 30 ans a dû fuir le Honduras suite à une agression et du harcèlement de part de ses voisins. Elle fut victime de ces abus car elle a témoigné contre deux hommes accusés d’avoir frappé son jeune frère à mort. Sa sécurité n’a pu en aucun cas être garantie : par peur elle a fui au Mexique.
Crise de sécurité : où vont les financements ?
Les gouvernements d’Amérique centrale affirment souvent qu’ils n’ont pas les ressources nécessaires pour faire face à la crise de la sécurité dans leur pays.
Pourtant, en 2015, le gouvernement américain a mis en place un fonds de 750 millions de dollars pour permettre au Salvador, au Honduras et au Guatemala de lutter contre la violence dans leur pays et d’empêcher leur population de fuir vers les États-Unis. L’Union européenne et d’autres organisations ont suivi et ont mis à disposition des fonds pour lutter contre les facteurs qui poussent à la migration.
Mais très peu de choses sont mises en œuvre au Salvador, au Guatemala et au Honduras pour aider ceux dont la vie dépend de la protection des autorités. Et une question majeure reste sans réponse : où va cet argent ?
Il n’existe pas de solution simple pour faire face à cette crise des réfugiés profondément enracinée et cachée. S’attaquer aux taux d’homicides de ces pays et les rendre sûrs sera une tâche ardue. Mais les gouvernements ne peuvent pas se permettre de ne rien faire. Ils ont la responsabilité de protéger ceux qui sont dans l’impasse et d’empêcher que les personnes comme Saúl ne soient tuées impitoyablement.
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