1.10) Les Ouïghours

La minorité ethnique des Ouïghours, qui
sont essentiellement musulmans, vit principalement
dans la région autonome
ouïghoure du Xinjiang.

Depuis les années 1980, cette minorité a
été la cible de violations graves et systématiques
des droits humains : arrestations et
détentions arbitraires, détention au secret,
restrictions sévères de la liberté de religion
et de l’exercice des droits sociaux et culturels,
notamment. Des prisonniers politiques
ouïghours ont été exécutés à l’issue
de procès inéquitables.

Ces dernières années, la Chine s’est servi de
la « guerre contre le terrorisme » menée au
niveau international pour réprimer les
Ouïghours, qu’elle accuse d’être des « terroristes
 », des « séparatistes » ou encore des
« extrémistes religieux ».

Rebiya Kadeer, un symbole pour la cause
des Ouïghours

Femme d’affaires de renom et mère de 10
enfants, Rebiya Kadeer a créé en 1997 le
« Mouvement des mille mères » dans la
région autonome ouïghoure du Xinjiang.
Ancien membre de la Conférence consultative
politique du peuple chinois (CCPPC),
elle a fait partie de la délégation officielle
de la Chine lors de la quatrième Conférence
mondiale des Nations unies sur les
femmes, qui s’est tenue à Pékin en 1995.

En août 1999, Rebiya Kadeer fut arrêtée à
Urumqi, la capitale du Xinjiang, et
condamnée à huit ans de prison sous la
charge d’avoir “divulgué des secrets d’État”,
et cela pour avoir envoyé des coupures de
presse à son mari. Celui-ci s’était enfui aux
États Unis et contribuait là-bas à des émissions
en langue ouigoure de la “Radio Free
Asia”, dans lesquelles il condamnait durement
la politique des autorités chinoises
envers la population ouigoure. Kadeer fut
arrêtée quand elle voulut rencontrer une
délégation du Congrès américain qui
faisait un examen de la situation des droits
de l’homme au Xinjiang.

Les autorités
chinoises prétendent que Kadeer était en
possession d’une liste de 10 personnes
« soupçonnées d’activités séparatistes ». Le 14
mars 2005, elle est mise en liberté prématurément,
selon la version officielle pour
des raisons de santé, mais en fait sous la
pression des États Unis, qui acceptent en
échange de retirer un projet de résolution
de l’ONU, condamnant sévèrement la façon
dont les autorités chinoises traitent les
populations minoritaires dans leur pays.
Sur les six ans que Rebiya Kadeer a passée
en prison, elle a vécu deux ans dans une
cellule complètement obscurcie.(5)

Le massacre de Gulja

Le 5 février 1997, des manifestations pacifiques
ont eu lieu dans la ville de Gulja
(Yining), dans la région autonome
ouïghoure du Xinjiang.
Des centaines, peut-être même des milliers
de personnes ont été tuées ou gravement
blessées.

Un très grand nombre ont été arrêtées au
cours des manifestations et par la suite. De
nombreux détenus ont été frappés ou
soumis à d’autres formes de tortures. On
reste sans nouvelles d’un nombre indéterminé
de personnes.

Au cours de la répression, les autorités s’en
sont également pris à des membres de la
communauté ouïghoure dans la région.
Selon des sources locales, les manifestations
ont été déclenchées par la répression
croissante de la religion et de la culture
ouïghoure à Gulja et dans ses environs.
Cette répression consiste notamment à
interdire les meshreps, des rassemblements
traditionnels organisés depuis 1994 pour
tenter de faire revivre des traditions culturelles
ouïghoures et islamiques. Des chefs
de communautés ouïghoures de Gulja et
de ses environs avaient également mis sur
pied des équipes de football ouïghoures
rassemblées au sein d’une ligue non officielle.
Mais ces équipes ont été dissoutes
par les autorités et les infrastructures sportives
détruites.

« Je n’avais jamais vu de ma vie une telle
barbarie [...] Des chiens militaires attaquaient
des manifestants pacifiques. Des
soldats chinois frappaient à coups de
gourdin les manifestants [...] Des gens,
certains vivants et d’autres morts, étaient
traînés sur le sol puis jetés et entassés pêlemêle
dans une dizaine de camions militaires.
 »
(6)

Rebiya Kadeer décrit des images qui ont été
prises lors du massacre de Gulja, le 5
février 1997, et dans les jours qui ont suivi.
Elle pense que ces images lui ont été
montrées par le chef de la police préfectorale
afin de l’intimider et de la pousser à
mettre fin à ses investigations. En les regardant,
elle a réalisé que ce massacre était
semblable à la répression sanglante de
Tianamen contre des manifestants pacifiques.
Mais cette fois, les autorités
chinoises ont réussi à empêcher que ces
événements ne soient connus du reste du
monde.

« Je fais entendre ma voix pour que l’on
n’oublie pas ceux qui ont perdu la vie à
Gulja et pour demander que les autorités
chinoises répondent de leurs actes. »

Dix ans après ces faits, Rebiya continue de
raconter le massacre qui a eu lieu à Gulja.
Elle continue aussi de se battre pour les
droits de la communauté ouïghoure de
Chine, essentiellement musulmane, qui est
systématiquement persécutée depuis les
années 1980.

Les proches de Rebiya Kadeer sont pris
pour cibles par les autorités depuis sa
première arrestation pour délit d’opinion,
en 1999. Ce harcèlement s’est intensifié
depuis qu’elle a été remise en liberté pour
raisons médicales, le 17 mars 2005, et autorisée
à quitter la Chine pour s’installer aux
États-Unis. Avant qu’elle ne soit libérée,
précise-t-elle, elle a reçu un avertissement :
si elle nouait des relations avec des
Ouïghours ou parlait en public de « questions
sensibles » une fois qu’elle serait en
liberté, « ses entreprises et ses enfants
n’aur[aient] plus aucun avenir ».

Le 27
novembre 2006, lendemain du jour où
Rebiya Kadeer a été élue présidente du
World Uyghur Congress (WUC, Congrès
ouïghour mondial), le tribunal a infligé à
Alim Abdiriyim et à son frère Kahar des
amendes s’élevant à plusieurs millions de
dollars américain, et Alim a en outre été
condamné à sept ans d’emprisonnement
pour fraude fiscale. Rebiya Kadeer a
affirmé à plusieurs reprises qu’elle n’avait
commis aucune infraction.

Amnesty International
estime que le caractère systématique
de ces « sanctions » contre les proches
de Rebiya Kadeer en raison de ses activités
de défense des droits humains met gravement
en doute la crédibilité des investigations
de la police.

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