Écrire Les charges pesant sur des défenseur·e·s de terres autochtones doivent être abandonnées

La Nation autochtone wet’suwet’en protège ses terres ancestrales et sources d’eau contre la construction d’un gazoduc. Des défenseur·e·s wet’suwet’ens de ces terres et certains de leurs sympathisant·e·s qui s’opposent à la construction du gazoduc sont victimes de surveillance, de harcèlement et d’intimidation de la part de la police canadienne.

La police canadienne a soumis des défenseur·e·s des terres wet’suwet’ens et des sympathisant·e·s de ceux-ci à des arrestations illégales. Sept défenseur·e·s sont déjà en jugement ou leur procès s’ouvrira le 30 octobre 2023 ou en janvier 2024.

Les autorités doivent abandonner les charges d’outrage de nature criminelle retenues contre les personnes arrêtées simplement pour avoir exercé leurs droits autochtones et leurs droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique.

L’arrêt Delgamuukw-Gisday’wa, rendu par la Cour suprême du Canada en 1997, affirme que les chefs héréditaires wet’suwet’ens sont les autorités de leur Nation, conformément à la structure de gouvernance des Wet’suwet’ens. Les cinq clans des Wet’suwet’ens s’opposent à ce gazoduc.

Le projet avance cependant, malgré l’absence d’un consentement préalable, informé et donné librement par ce peuple, ce qui est contraire à l’‘Anuc niwh’it’en (le droit wet’suwet’en), au droit constitutionnel canadien et aux obligations relatives aux droits humains auxquelles le Canada est tenu en vertu du droit international, notamment la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Coastal GasLink (CGL), filiale de TC Energy Corporation, est une entreprise de construction de pipelines. Le gazoduc de CGL, long de 670 kilomètres, transporterait du gaz de schiste jusqu’à la centrale de traitement de LNG Canada qui a été proposée.

En décembre 2018, la cour suprême de Colombie-Britannique a rendu une injonction temporaire ayant empêché des défenseur·e·s de la terre de bloquer la route principale traversant le territoire wet’suwet’en dans le but de faire cesser la construction du gazoduc. En février 2019, des chefs héréditaires wet’suwet’ens ont demandé que soit ordonnée la cessation des travaux sur le gazoduc. En décembre 2019, la cour suprême de Colombie-Britannique a accordé une injonction interlocutoire, qui contient des dispositions d’exécution.

En application de ces injonctions, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et son Groupe d’intervention pour la sécurité de la collectivité et l’industrie (GISCI) ont surveillé, harcelé et menacé des défenseur·e·s wet’suwet’ens de ce territoire, notamment des chefs héréditaires et des matriarches. La GRC et le GISCI ont par ailleurs emmené de force et arrêté illégalement des défenseur·e·s wet’suwet’ens de la terre et des sympathisant·e·s de ceux-ci lors de descentes policières militarisées sur leurs territoires.

Amnesty International a abordé ces questions dans des lettres envoyées à l’entreprise à l’origine du projet, le 12 juillet 2022, le 17 mai 2023 et le 17 juillet 2023, et a reçu des courriers vagues qui ne répondaient pas aux allégations formulées. En juin 2023, Amnesty International a rencontré des représentants de CGL et a de nouveau fait état de sa préoccupation face à ces abus, mais n’a là encore pas reçu de réponse concernant ces événements.

Lors de quatre interventions policières de grande ampleur menées en janvier 2019, février 2020, novembre 2021 et mars 2023 en réponse à l’action du peuple wet’suwet’en et de ses sympathisant·e·s visant à défendre leurs terres, l’arrestation et l’incarcération de plus de 75 personnes, dont des observateurs·trices juridiques et des professionnel·le·s des médias. En juin et juillet 2022, le procureur général de Colombie-Britannique a décidé de poursuivre 20 défenseur·e·s de la terre pour outrage criminel, pour avoir semble-t-il défié la décision de la cour (l’injonction interlocutoire) de se tenir à l’écart des chantiers de construction du gazoduc.

Cinq défenseur·e·s de la terre ont plaidé coupable en décembre 2022 ; trois d’entre eux ont été condamnés à une amende de 500 dollars et les deux autres à 25 heures de service d’intérêt général. Si la Couronne a ordonné une suspension de la procédure pour plusieurs observateur·trices, le reste des défenseur·e·s de la terre seront jugés de mai 2023 à janvier 2024. Près de 37 millions de dollars d’argent public ont été dépensés entre 2019 et mars 2023 afin de surveiller et de contrôler les défenseur·e·s wet’suwet’en de la terre, des peuples autochtones voisins, tels que les Gitxsans, et leurs allié·e·s.

Depuis 2009, les défenseur·e·s wet’suwet’ens de la terre ont établi plusieurs sites et structures sur ces terres afin d’affirmer leur souveraineté sur ce territoire. Les Wet’suwet’ens ont par ailleurs mis en place un protocole d’obtention d’un consentement libre, préalable et éclairé selon lequel toute personne souhaitant se rendre sur le territoire doit solliciter la permission auprès des chefs héréditaires avant de pouvoir y entrer.

CGL a fourni des documents concernant le processus de consultation mené auprès de la Nation wet’suwet’en à propos du projet de gazoduc ; cependant, après avoir analysé les documents fournis, Amnesty International a déterminé que ce processus de consultation ne respectait pas les normes internationales relatives aux droits humains et que la Nation wet’suwet’en n’avait pas accordé son consentement libre, préalable et éclairé pour que le projet puisse se poursuivre.

Dans le cadre de ses procédures d’alerte rapide et d’intervention d’urgence, le Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination raciale a demandé au Canada en décembre 2019 de suspendre tous les permis et autorisations concernant la construction du gazoduc de CGL jusqu’à ce que le peuple wet’suwet’en ait accordé son consentement libre, préalable et éclairé, après que l’obligation de consultation ait été pleinement et adéquatement acquittée.

Amnesty International a fait parvenir des demandes d’entretien officielles et des questions à diverses autorités canadiennes au niveau fédéral et des provinces. Si l’ensemble de ces autorités ont refusé de rencontrer Amnesty International, la Gendarmerie royale du Canada, le Premier ministre de la Colombie-Britannique, et la Régie de l’énergie de la Colombie-Britannique ont répondu par écrit. Ils ont fait des déclarations générales et n’ont pas répondu aux questions de l’organisation.

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