Élections - Changement climatique et droits humains

Le réchauffement climatique et son impact sur les droits humains ne sont plus remis en question aujourd’hui. Les conséquences de la crise climatique ne peuvent plus être ignorées en Belgique et dans le monde entier : vagues de chaleur, sécheresses, inondations, pollution, destruction de l’environnement, etc. La nécessité de transformer notre société pour respecter l’Accord de Paris et pour maintenir le réchauffement en dessous d’1,5°C doit se coupler avec une transition juste respectant les droits fondamentaux de tous et toutes.

Cette transition juste doit s’accompagner d’une sortie des énergies fossiles car celles-ci sont incompatibles avec la protection des droits humains. Le charbon, le pétrole et le gaz sont la source de l’essentiel des émissions de gaz à effet de serre dans presque tous les secteurs économiques et représentent plus de 70 % des émissions mondiales. Malgré l’urgence de la crise climatique et les engagements pris par les États aux termes de l’Accord de Paris, les émissions de carbone libérées par les combustibles fossiles continuent d’augmenter. Selon l’Agence internationale de l’Énergie, elles ont progressé de 6% en 2021, soit le plus haut niveau jamais atteint.

Le GIEC confirme que la seule manière de maintenir les températures sous le seuil de 1,5 °C est de se débarrasser rapidement des énergies fossiles. Pour cela, il faut agir au niveau aussi bien de l’offre que de la demande. Du côté de l’offre, il s’agit de réduire la production de combustibles fossiles, notamment en freinant les activités d’exploration, d’extraction, de production et de fourniture de combustibles fossiles à l’étranger et les investissements qui y sont liés. En parallèle, il faut réduire la demande et la consommation de combustibles fossiles, par exemple en prônant l’efficacité énergétique, en facilitant l’accès aux énergies renouvelables pour la production et l’utilisation d’énergie, et en encourageant les changements de comportement pour réduire la consommation.

Il est donc urgent de mettre fin à la production et à l’utilisation de combustibles fossiles, notamment en cessant de les subventionner, si nous voulons réduire les émissions à un niveau permettant d’atténuer ainsi les pires conséquences de la crise climatique sur l’exercice des droits humains. En parallèle, la transition vers les énergies renouvelables et une économie décarbonée doit être équitable, durable et conforme aux droits humains, afin de faciliter l’accès de toutes et tous à l’énergie et de veiller à ce qu’elle ne se fasse pas au détriment de groupes ou de personnes déjà marginalisés ou défavorisés.

La Belgique, en tant que pays riche et pollueur historique, doit également assumer ses responsabilités dans la crise climatique et envers les pays plus vulnérables qui souffrent aujourd’hui beaucoup plus des conséquences du réchauffement climatique, tout en en étant les moins responsables.

La Belgique doit fournir des moyens financiers, un soutien technique et un accès à la réparation, notamment via une indemnisation, aux habitant·es des pays les plus pauvres dont les droits ont été affectés par les pertes et préjudices engendrés par la crise climatique. Il faut notamment veiller à ce que de nouveaux financements supplémentaires soient mobilisés.

Ces moyens sont aussi une condition pour atteindre les objectifs climatiques, qui passent notamment par un développement à faible intensité carbone pour tous les pays. Face à ce constat, la Belgique doit prendre ses responsabilités. Cela implique une politique climatique cohérente avec le développement et qui garantisse une place centrale aux droits humains et à la justice sociale.
La Belgique a l’obligation de protéger les personnes contre les préjudices causés par des entreprises, y compris les préjudices résultant de la contribution des entreprises au changement climatique. Elle peut protéger les droits humains à travers la réglementation, la surveillance, la vérification, l’arbitrage et la sanction des activités des entreprises ayant un impact sur le changement climatique.

Enfin, la Belgique doit s’assurer que la liberté d’expression, de manifestation et de rassemblement pacifique en faveur du climat et de la protection de l’environnement soient respectés, soutenus et protégés.

Recommandations d’Amnesty International à propos du changement climatique et des droits humains :

  • adopter et mettre en œuvre un plan national sur le climat, comme de nouvelles contributions déterminées au niveau national et des stratégies à long terme de décarbonation. Ces plans doivent être conformes aux obligations relatives aux droits humains, tenir compte de la capacité et de la part de responsabilité de la Belgique, qui doit mettre ses objectifs de réduction des émissions, ses plans de mise en œuvre connexes et ses politiques climatiques et énergétiques en conformité avec la nécessité de limiter au maximum l’augmentation de la température mondiale moyenne et de ne pas dépasser 1,5 °C au-dessus du niveau de l’ère préindustrielle ;
  • abandonner rapidement la production et la consommation d’énergies fossiles et mettre en œuvre une transition juste vers d’autres formes d’énergie dans les plus brefs délais, en commençant par supprimer les subventions aux énergies fossiles et les combustibles fossiles et modes de production les plus polluants, comme le charbon, la tourbe, le gaz de schiste et les sables bitumineux, et en interrompant immédiatement l’expansion des énergies fossiles ;
  • adopter des politiques durables compatibles avec le respect des droits humains dans la filière alimentaire, notamment des politiques publiques visant à promouvoir et faciliter une transition juste entre une filière agroalimentaire intensive, intenable, et des pratiques foncières et agricoles durables, compatibles avec le respect des droits humains ;
  • adopter des mesures conformes aux droits humains pour réduire les émissions dans le secteur des transports, notamment en adoptant des politiques et des mesures globales, multisectorielles et respectueuses des droits afin de réduire la demande de voitures particulières et de voyages aériens ; remplacer les véhicules fonctionnant aux combustibles fossiles par des véhicules électriques tout en s’attaquant aux risques pour les droits humains et aux dommages environnementaux liés à la chaîne d’approvisionnement et au cycle de vie des batteries lithium-ion ; exiger des compagnies aériennes qu’elles fixent des engagements assortis de délais pour réduire les émissions en termes absolus sans recourir à des compensations ; et établir des réglementations pour réduire les émissions de la navigation maritime d’une manière compatible avec le maintien du réchauffement climatique dans les limites de l’objectif de 1,5 °C ;
  • augmenter de manière significative le financement d’initiatives en faveur de l’action sur le climat qui soient compatibles avec le respect des droits humains, dans les pays moins riches, notamment en cas de pertes et préjudices. La Belgique doit prendre des engagements concrets en fonction de sa part de responsabilité et de ses capacités en respectant une échéance précise pour leur exécution, afin d’atteindre et de dépasser conjointement l’objectif de mobiliser 100 milliards de dollars par an. La Coalition Climat estime qu’une contribution équitable s’élèverait 500 millions d’euros par an. La coopération et la solidarité internationales sont indispensables pour garantir le respect des droits humains et la préservation d’un environnement sûr, propre, sain et durable ;
  • recueillir, mettre à jour et diffuser les informations sur le changement climatique, donner accès aux informations relatives à l’environnement, notamment au changement climatique, et veiller à ce que les enfants reçoivent une sensibilisation à l’environnement à l’école ;
  • protéger les droits de toute personne à faire entendre sa voix et à mobiliser les autres en faveur de l’action pour le climat ou de la protection de l’environnement, des moyens de subsistance et de l’accès à la terre, y compris par la désobéissance civile, en garantissant les libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique et en veillant à ce que règne une culture de tolérance zéro à l’égard des agresseurs de défenseur·es des droits liés à l’environnement ;
  • adopter une loi nationale belge sur le devoir de vigilance obligeant toutes les entreprises établies ou actives en Belgique à respecter, dans l’ensemble de leur chaîne de valeurs, les droits humains, les droits des travailleurs et les normes environnementales, en les rendant responsables des violations et des dommages causés à l’environnement ;
  • privilégier les mesures de prévention et de réduction des émissions afin d’éviter le recours aux mécanismes d’élimination du CO2 et autres mesures de compensation qui enfreignent les droits humains. D’abord, les mesures de compensation ne permettent pas la réduction effective des émissions de CO2, hors celle-ci est indispensable pour respecter l’Accord de Paris. Ensuite, il n’y a pas assez de garantie que ces compensations se fassent dans le respect des droits humains. Par exemple, la mise en œuvre de projets REDD+ (récompensant financièrement un État qui a réduit les émissions générées par le déboisement et la dégradation des terres) ouvre la possibilité de relier les récompenses financières REDD+ au système d’échange de quotas d’émissions. Or, un certain nombre de préoccupations relatives aux droits humains sont associées à des projets REDD+, notamment : la centralisation de la propriété des terres aux dépens des populations locales et au profit des organes gouvernementaux ; la confiscation des terres ancestrales des peuples autochtones, entraînant des expulsions forcées et une perte de l’accès à la forêt ; et des violations du droit des populations autochtones au consentement préalable, libre et éclairé.
  • rejeter tout mécanisme multilatéral d’échange de droits d’émission de carbone n’aboutissant pas à de véritables réductions des émissions et ne comportant pas de garanties de protection des droits humains.
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