Introduction
Ces dernières années, dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme », les États-Unis ont procédé, parfois avec la complicité d’autres gouvernements, à la disparition forcée de personnes soupçonnées de terrorisme.
Une personne est victime de disparition forcée lorsqu’elle est arrêtée, détenue ou enlevée par l’État ou par des agents opérant pour le compte de l’État qui nient ensuite détenir cette personne ou qui refusent de révéler où elle se trouve. Ce faisant, ils la soustraient à la protection de la loi.
Très souvent, les victimes de disparition forcée ne sont jamais libérées et on ne sait pas ce qu’elles sont devenues. Leur famille et leurs amis ne découvrent parfois jamais ce qui leur est arrivé.
Pourtant, une personne disparue ne se volatilise pas comme ça. Quelque part, quelqu’un sait forcément ce qui s’est passé. Il y a toujours un responsable. La disparition forcée est un crime au regard du droit international. Or, dans de trop nombreux cas, les responsables ne sont jamais déférés à la justice.
Chaque disparition forcée viole une série de droits humains, notamment :
- le droit à la sécurité et à la dignité ;
- le droit de ne pas être soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
- le droit à des conditions de détention humaines ;
- le droit à une personnalité juridique ;
- le droit à un procès équitable ;
- le droit à une vie de famille ;
- le droit à la vie (lorsque la personne disparue est tuée).
La disparition forcée est une violation particulièrement cruelle puisqu’elle affecte non seulement la victime mais aussi ses proches.
La victime est souvent torturée et vit dans la crainte permanente d’être tuée. Elle est soustraite à la protection de la loi, privée de tous ses droits et à la merci de ses ravisseurs. La disparition forcée est une violation continue qui se prolonge souvent pendant des années après l’enlèvement de la personne.
Si la victime ne meurt pas, si elle est finalement libérée, elle risque de souffrir toute sa vie des séquelles physiques et psychologiques de cette forme de déshumanisation et des brutalités et tortures qui l’accompagnent souvent.
Les proches, qui ignorent ce que la victime est devenue, attendent parfois pendant des années des nouvelles qui n’arriveront peut-être jamais. N’ayant aucune certitude quant au sort de la personne, ils ne peuvent pas faire leur deuil. À l’angoisse s’ajoute souvent la détresse matérielle, lorsque la victime représentait la principale source de revenus de la famille. Et faute de certificat de décès, les proches ne peuvent pas toujours obtenir une pension ou une aide.
Que fait Amnesty International ?
Amnesty International condamne toutes les disparitions forcées, qui sont des crimes au regard du droit international.
L’organisation fait campagne pour que les États révèlent où se trouvent les victimes de disparition forcée et ce qu’elles sont devenues. Amnesty International demande également qu’elles soient libérées, à moins qu’elles ne soient inculpées d’une infraction légale et jugées équitablement dans le respect des normes internationales.
L’organisation s’efforce également d’obtenir que les responsables de disparitions forcées soient déférés à la justice.
Chaque année, le 30 août, à l’occasion de la Journée internationale des disparus, Amnesty International et des militants du monde entier se mobilisent pour que les disparus et leurs proches ne soient pas oubliés.
Travail de campagne au niveau international et en Belgique
En décembre 2006, les Nations unies ont adopté la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Ce traité vise à prévenir les disparitions forcées et, lorsque de tels crimes sont commis, à établir la vérité, à punir les responsables et à fournir réparation aux victimes et à leur famille.
Parmi les traités adoptés par l’ONU, ce texte est l’un de ceux qui vont le plus loin sur le plan des droits humains. Certaines de ses dispositions sont totalement nouvelles et introduisent des normes importantes.
Amnesty International et les autres membres de la Coalition internationale contre les disparitions forcées appellent tous les États à ratifier cette nouvelle convention. Pour qu’elle devienne effective, les gouvernements doivent adopter les lois nécessaires à sa mise en œuvre.
En Belgique : le 26 juin dernier, le Conseil des ministres a marqué son
accord sur l’avant-projet de loi portant assentiment à la Convention
internationale pour la protection de toutes les personnes contre les
disparitions forcées. Le Conseil d’Etat a formulé une série de remarques qui
sont à l’étude au ministère de la Justice. Tout porte à croire que le projet
de loi sera déposé au parlement fédéral dans le courant de l’automne.
Le principal objet de ce traité est de définir la disparition forcée.
Celle-ci vise l’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme
de privation de liberté par des agents de l’Etat ou par des personnes ou des
groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou
l’acquiescement de l’Etat, suivi du déni de la reconnaissance de la
privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne
disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la
loi.
Cette Convention est un traité mixte c’est à dire qu’il implique les entités
fédérées dans la mesure où leurs compétences sont sollicitées pour la bonne mise en oeuvre du traité. Dés le mois de septembre, nous allons écrire au président des nouveaux gouvernements régionaux pour leur demander de mettre en oeuvre au plus vite les démarches nécessaires pour procéder à la ratification parlementaire.
Notre section suivra de très près le déroulement de la procédure.
Vingt Etats doivent ratifier la convention pour que celle-ci entre en vigueur. Nous espérons que la Belgique figurera dans les 20 premiers.
Chaque mois, nous vous proposons d’agir en faveur de la ratification de cette convention en visant concrètement un pays.
Action Nepal
Afin que le Népal ratifie la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, cliquez ICI
Pendant la guerre civile qui s’est déroulée au Népal entre 1996 et 2006, Amnesty International a recueilli des informations faisant état de milliers de civils victimes d’homicides, de disparitions forcées ou de torture. Ces crimes, ainsi que d’autres atteintes aux droits humains, ont été perpétrés par l’armée, par la police et par les forces maoïstes.
Plus de deux ans après l’adoption d’un accord de paix global, pas un seul des responsables présumés de ces crimes odieux, qu’ils aient été commis par les forces de sécurité ou par des membres du Parti communiste népalais (PCN) maoïste, n’a toutefois été traduit devant les tribunaux. Les victimes continuent d’attendre justice et réparation.
Amnesty International a lancé au Népal, le 1er mai, une campagne nationale en faveur de la justice, de la vérité et des réparations.
L’arrivée d’un nouveau gouvernement, formé à la suite des élections de 2008, constitue une occasion d’agir contre l’impunité et de prendre des mesures pour que de tels crimes ne se reproduisent plus jamais au Népal.
La nouvelle équipe au pouvoir tarde cependant à mettre en œuvre ses engagements électoraux en la matière. On craint par ailleurs que les mesures envisagées – on parle notamment d’amnistie –, loin de mettre un terme à l’impunité, ne viennent au contraire la renforcer.
Durant les douze mois qui viennent, Amnesty International va lancer une série d’actions mondiales pour demander au gouvernement du Népal de prendre des initiatives sérieuses afin d’assurer aux victimes justice, vérité et réparations.
Amnesty International appelle le gouvernement du Népal à :
• Créer une commission indépendante et efficace chargée de faire la lumière sur le sort de plus d’un millier de personnes soumises à une disparition forcée, d’identifier les responsables et de faire en sorte que les victimes, si elles ont survécu, et leurs proches bénéficient de réparations.
• Mettre en place une commission vérité indépendante et efficace chargée de mener des recherches afin d’établir la vérité et d’identifier les responsables des multiples autres atteintes aux droits humains – homicides, torture, viols, notamment –, et de préconiser des mesures pour que les victimes de ces actes obtiennent pleinement réparation. Amnesty International va faire campagne en particulier contre les dispositions prévoyant une amnistie qui figurent dans l’actuel projet de loi portant création de la commission, un texte qui devrait être prochainement soumis au Parlement. Toutes les informations recueillies sur les crimes commis doivent au contraire être transmises aux autorités judiciaires afin que celles-ci puissent déclencher des poursuites.
• Modifier la législation et réformer la justice pour garantir que tous les crimes fassent l’objet d’une enquête, donnent lieu à des poursuites en bonne et due forme et soient jugés par les tribunaux nationaux lors de procès équitables, et que les victimes puissent sans entraves exercer devant la justice du pays leur droit de demander réparation.
• Faire en sorte que la justice soit rendue, que la vérité éclate et que des réparations soient octroyées dans trois affaires emblématiques, dont celle de Maina Sunuwar, une adolescente de quinze ans torturée et tuée par les forces armées en 2004.
• Apporter la preuve de sa détermination à faire en sorte que de tels crimes ne se reproduisent plus jamais au Népal en ratifiant le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.